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«La France a accepté de parrainer cette conférence pour inviter les autres partenaires à apporter leurs propres contributions»

«La France a accepté de parrainer cette conférence pour inviter les autres partenaires à apporter leurs propres contributions»

Politique | -   Nazir Nazi

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«L’accent est mis sur plusieurs secteurs structurants tels que le tourisme qui offre des perspectives importantes de développement aux Comores, en particulier l’écotourisme de manière durable. L’idée est d’allier développement économique et préservation de cette belle nature de cet archipel qui est magnifique qui constitue un patrimoine naturel unique». Alors que la conférence des bailleurs s’ouvre aujourd’hui à Paris, Bassa-Mazzoni Jacqueline, nous a accordé l’interview qui suit.

 

Depuis ce lundi, Paris accueille la conférence des partenaires au développement des Comores. Pouvez-vous nous parler des préparatifs pour l’accueil? Et pourquoi en France?


Nous avons commencé à parler de cette conférence lors de la visite officielle que le président Azali Assoumani a effectuée à Paris, en juillet dernier. C’était une demande des autorités comoriennes de pouvoir organiser une conférence de développement des Comores avec l’ensemble des partenaires. Pourquoi Paris? Tout naturellement parce que nous avons signé un document cadre de partenariat avec à la clé un plan de développement de France-Comores de 150 millions d’euros. Et il s’avère logique aux autorités comoriennes que Paris abrite cette conférence parce que la France donnait l’exemple.
La France a accepté de parrainer cette conférence pour inviter les autres partenaires à apporter leurs propres contributions. Et cela bien évidemment pour permettre au pays de se développer dans des secteurs clés tels que les infrastructures, l’énergie, l’environnement, le tourisme. Dans le document de la Cpad, l’accent est mis sur plusieurs secteurs structurants tels que le tourisme qui offre des perspectives importantes de développement aux Comores, en particulier l’écotourisme de manière durable. L’idée est d’allier développement économique et préservation de cette belle nature de cet archipel qui est magnifique qui constitue un patrimoine naturel unique. Une telle approche permettra à la fois de recueillir des revenus générés par le tourisme tout en maintenant la préservation de ce bel environnement naturel.
Nous allons accueillir à Paris avec le concours précieux de la Banque mondiale car c’est elle qui met à disposition ses locaux et qui a participé avec le Pnud à la préparation des travaux ainsi d’ailleurs que l’Afd qui a dépêché sa responsable pays pendant une dizaine de jours aux Comores pour participer à l’élaboration des fiches projets sur lesquelles des équipes comoriennes ont travaillé sans relâche.

 

Vous venez d’effectuer une visite sur le site où sera construite la première centrale photovoltaïque des Comores. Pouvez-vous parler de l’état d’avancement des travaux?


S’agissant de cette centrale solaire, je ne peux que me féliciter du fait que j’ai pu faire venir aux Comores une entreprise française spécialiste dans le développement des énergies renouvelables, que j’avais connue en Namibie, Innovent, où elle a installé une centrale de 20 mégawatts. Elle travaille aussi en Afrique du sud et dans d’autres pays d’Afrique. Ses projets portent sur des centrales solaires mais aussi des éoliennes. Elle est venue à ma demande pour aider les Comores à combler le déficit énergétique avec une énergie propre. Je l’ai accompagnée dans cette démarche. Elle a été bien accueillie par les autorités locales qui ont tout à fait compris sa démarche.
Je dois dire que les autorités m’ont aidée à accompagner cette entreprise pour faciliter toutes les démarches administratives, bureaucratiques, fiscales qui sont parfois complexes pour tout nouvel investisseur. L’entreprise a d’ores-et-déjà pu commencer les travaux à Fumbuni où se trouve le terrain qui lui a été alloué, lequel constitue un défi au plan technologique dû au fait de sa nature faite de roches volcaniques et de sa déclivité, mais les ingénieurs sont optimistes. Ils vont y arriver. Ils ont déjà commencé tout ce qui est génie civil et génie électrique. Cette centrale aura une capacité de trois mégawatts et sera constituée de panneaux solaires placés sur des traqueurs qui vont suivre la courbe du soleil, ce qui augmentera évidemment l’efficacité et le rendement de la puissance énergétique fournie par la centrale.

 

La date de la mise en réseau est-elle déjà fixée?


Au cours du premier semestre de 2020 au plus tard juin 2020. Innovent va travailler par étape. Il y aura vraisemblablement une première tranche de mise en production, sachant qu’il va aussi installer des batteries pour qu’il n’y ait pas, à la tombée du soleil, interruption de la fourniture électrique dans la région. Ces trois mégawatts seront injectés dans le réseau général et de ce fait vont contribuer à 13% de la consommation énergétique de la Grande-Comores, même si c’est la région du sud qui en sera la première bénéficiaire. Je rappelle que c’est la première grande centrale solaire aux Comores.


Bassa-Mazzoni Jacqueline, Ambassadrice de France à Moroni 

 


Et la possibilité de construire, sur le même site, une station de transfert de pompage (Step)?


Ça sera une deuxième étape. Le projet Step, c’est de l’hydro-solaire. Ça serait une première aux Comores et c’est possible à Fumbuni compte tenu du terrain qui est en pente avec la construction d’un bassin versant. Il faut de l’eau et des turbines. Ça fonctionne comme un petit barrage. L’eau monte grâce à l’énergie produite par les panneaux solaires dans la journée. Et pendant la nuit, l’eau redescend pour faire fonctionner les turbines. Enfin, je schématise. Ça illustre un peu l’ensemble du projet. Mais c’est une deuxième étape une fois que la centrale sera mise en production.

Que symbolise, pour vous, la cérémonie inaugurale de la première voiture 100% électrique à Moroni?


Innovent, qui construit la centrale solaire, a fait venir la voiture électrique pour montrer l’efficacité en matière de protection de l’environnement en évitant les émissions de gaz à effet de serre, c’est ce qu’on a trouvé de mieux. Le personnel d’Innovent, dans tous les projets de l’entreprise en Afrique, circulent en voitures électriques. Ils ont fait venir cette voiture pour leur équipe sur place et j’ai trouvé que c’était très sympathique et intéressant pour le public comorien de leur présenter la voiture électrique en leur disant que ça pourrait être une voiture d’avenir. Le but n’est pas de l’importer, mais de montrer simplement que c’est très avantageux de conduire cette voiture car, au niveau du coût, à partir du moment où vous avez des panneaux solaires, vous avez un chargement de la batterie à coût nul. Et vous faites deux fois le tour de Ngazidja avec une batterie chargée à 100%. Ça vous donne une certaine autonomie. Pour moi, c’est une présentation d’un prototype aux Comores, c’est pour montrer combien on peut allier modernité et respect de l’environnement.

 

Les 20 et 21 novembre derniers, la toute première session du comité franco-comorien de haut niveau s’est tenue à Moroni. Qu’en devrions-nous retenir?


Je suis très satisfaite qu’on ait pu tenir cette première réunion du comité. Vous savez que c’est le comité de suivi des accords de Paris, donc du document cadre de partenariat qui a été signé à Paris en juillet à l’occasion de la visite du président Azali en France. Ce document-cadre est le symbole d’un partenariat renouvelé entre la France et les Comores.
Il y a trois volets. Un premier volet consacré à la sauvegarde des vies humaines en mer parce que nous estimons qu’il faut éviter à tout prix que les gens risquent leurs vies et de se noyer en mer pour gagner Mayotte à la recherche d’un avenir meilleur plus qu’hypothétique. Ce premier volet a pour objectif accompagner les Comores dans la lutte contre les trafiquants d’êtres humains, un problème mondial. Le deuxième volet de ce document cadre de partenariat est consacré au mouvement des personnes. Dans ce domaine également, nous sommes prêts à étudier les différentes étapes à affranchir pour assouplir, dans la mesure du possible, le régime des visas de manière à faciliter la circulation des biens et des personnes et notamment des publics porteurs de projets intéressants pour le développement régional et pour les rapprochements socioculturels.
C’est dans le but de faciliter les échanges économiques, commerciaux, sportifs, culturels, familiaux éventuellement. Parce que nous savons très bien que le développement des îles, de toute la région de l’Océan indien repose sur les échanges. Mais, il est nécessaire de progresser sur cette voie, avec prudence, pour éviter les drames humains et un afflux incontrôlé de personnes.

 

Et le troisième volet?


Le troisième volet du plan de développement France-Comores de 150 millions a pour objectif d’assister les Comores dans leurs efforts de développement, pour entre autres fixer les populations afin qu’elles n’aillent pas risquer leurs vies en mer mais trouver sur place un hôpital pour se soigner, l’école pour inscrire leurs enfants, des centres de formations pour se former, des équipes qui aident les jeunes à trouver du travail etc. C’est l’objet essentiel des quatre secteurs prioritaires, santé, éducation, formation professionnelle et insertion, économie durable notamment en agriculture, qui ont été définis dans le cadre de ce plan de développement France-Comores.
Nous accompagnons les Comores pour développer ces secteurs essentiels. Dans ce document signé à Paris, il est prévu qu’il y ait des clauses de rendez-vous. C’est ainsi que dans un délai de trois à quatre mois, le comité se réunira à nouveau pour faire le point sur les initiatives prises par les deux parties et tout ceci en concertation. Qu’en est-il de ces trois volets ? Où en sommes-nous ? Quels progrès avons-nous faits ou pas ? Et quels progrès restent à faire ? Quels projets sont à achever pour atteindre les objectifs que l’on s’est fixés ? Voilà ce qui sera à l’ordre du jour.

Propos recueillis par
Nazir Nazi

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