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Vice-président de l’Assemblée de l’Union, Maoulana Charif : “Des juristes de référence démontent l’idée d’une violation de la constitution”

Vice-président de l’Assemblée de l’Union, Maoulana Charif : “Des juristes de référence démontent l’idée d’une violation de la constitution”

Politique | -   Mohamed Youssouf

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En pleine session parlementaire, le premier vice-président de l’Assemblée de l’Union a accordé hier, une interview à Al-watwan dans laquelle, il revient sur la décision du président de la République de transférer provisoirement les compétences de la Cour constitutionnelle vers la Cour suprême. Maoulana Charif parle également de la question de Mayotte, des échauffourées devenues monnaie courante au parlement, de l’opposition entre autres sujets.

 


L’actualité est dominée dernièrement par la décision du président  de la République de transférer les compétences de la Cour constitutionnelle. Les avis divergent entre juristes. Quelle lecture faites-vous de cette décision ?


Sur cette question concernant le transfert de la Cour constitutionnelle, l’opposition accuse sans fondement le président de la République d’avoir foulé à ses pieds la constitution. Cette accusation a été formellement démentie par l’analyse et les déclarations des experts en droit. Des juristes de référence se sont en effet prononcés sur la question et il ressort de leurs analyses qu’il n’y a eu aucune entorse à la constitution. Je vous rappelle que ces experts, que vous connaissez bien, ne sont ni membres du gouvernement ni partisans de la Crc. Leurs analyses sont donc d’une neutralité irréprochable.

Ce que je voudrais, c’est d’appeler l’opinion à une prise de conscience pour ne pas tomber dans le spectre de la médisance car il ne suffit pas d’accuser pour qu’automatiquement il y ait de la vérité. La vérité est que le chef de l’Etat n’a eu de recours qu’aux pouvoirs qui lui sont conférés par la constitution. Donc il a usé avec raison de ses prérogatives exceptionnelles en sa qualité d’arbitre et de modérateur des institutions. Au-delà du débat juridique, il faut noter qu’une très bonne partie de la classe politique a apporté son soutien à cette importante décision, certes provisoire, mais qui faisait néanmoins partie des recommandations des assises nationales pour en finir avec le blocage de ladite institution.

 


D’aucuns estiment qu’en tant que premier magistrat et garant des institutions, le président avait la latitude de ramener les récalcitrants à nommer leurs représentants à la Cour pour en finir avec le blocage…


Avant de répondre à cette question, permettez-moi de souligner que le terme de “récalcitrants” me parait beaucoup plus excessif et inapproprié pour les personnes en question. Quant à la question au regard du chef de l’Etat, je ne manquerai pas de vous signaler que le pouvoir de nomination est un pouvoir discrétionnaire, c’est à dire que seule l’autorité compétente décide de nommer ou pas. Tout forcing de la part du chef de l’Etat serait à mon sens contraire au principe de séparation et de partage des pouvoirs.

 


Diriez-vous que la décision présidentielle a été précipitée par les derniers événements à l’Assemblée de l’Union. L’on se rappelle que l’armée avait bouclé les lieux et les deux listes des conseils des îles de Ngazidja et Ndzuwani n’étaient pas admises à l’ouverture de la session.


Certains esprits voudraient voir dans la décision du président le résultat des récents événements à l’Assemblée. Mais ils oublient au passage l’inertie qui avait caractérisé l’institution depuis juin 2017. Quant au problème des conseillers qui n’ont pas pu encore intégrer l’Assemblée, il faut savoir que la décision du président de l’Assemblée de sursoir leur arrivée a été motivée par les contestations qui lui sont parvenues et qui lui ont rappelé les antécédents fâcheux des années précédentes.

Donc l’Assemblée a tout simplement tiré les leçons du passé. C’est la raison pour laquelle le président de l’Assemblée a demandé qu’il y ait d’abord une entente au niveau du conseil de chaque île afin d’éviter tout désagrément.

 


L’Assemblée de l’Union a encore une fois été le théâtre d’affrontements et suite à la décision du président de l’Assemblée de ne pas reconnaitre les conseillers désignés à Ndzuwani et Ngazidja. La question de l’ouverture officielle de la session se pose selon certains députés.


Contrairement aux déclarations de certains, l’ouverture de la session a eu lieu conformément aux dispositions du Règlement intérieur en vigueur. Il est regrettable de devoir constater que trois ans après le début de cette législature, il y a encore des députés qui ignorent le Règlement intérieur.

Il faut savoir que trois conditions sont requises pour déclarer ouverte une session parlementaire selon les articles 38 et 39 de notre Règlement intérieur. Il s’agit de la lecture de versets du Saint Coran, l’exécution de l’hymne nationale et l’appel nominatif pour s’assurer du quorum de 17 députés sur 33. Ces conditions étant réunies nonobstant les tribulations ravageuses et les outrages de la part de certains, l’ouverture de la session ne souffre d’aucune contestation.

 

 

 


Pourtant depuis l’ouverture de ladite session, aucun projet ni proposition de loi n’avait été déposé


Ce que je peux vous dire, c’est que nous avons reçu trois projets de lois que nous allons examiner je l’espère dans un climat apaisé pour que chacun puisse exprimer son point de vue. Nous allons donc travailler sur le projet de lois relatif au droit d’auteur qui consiste à assurer la protection du bien intellectuel dans notre pays ; le projet de lois autorisant le président de la République à ratifier les traités internationaux de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle et enfin le projet de lois autorisant le président de la République à ratifier le protocole additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée.

 


Justement comment expliqueriez-vous le fait que systématiquement, à chaque rentrée parlementaire, des échauffourées éclatent ?


C’est la révision constitutionnelle de 2009, qui a introduit  le système du suffrage indirect par le renouvellement des trois représentants de chaque île désignés annuellement par leur conseil respectif, qui pose problème aujourd’hui.

C’est pourquoi dans le cadre des assises nationales, il a été recommandé que l’ensemble de députés soient élus directement dans leur circonscriptions.

 


Parlons de l’opposition qui crie régulièrement à la dictature. La décision du président de transférer les compétences de la Cour constitutionnelle provisoirement et les batailles à intervalles régulières à l’Assemblée ne risquent-elle pas de renforcer ce sentiment ?


Je crois que l’on doit relativiser sur ce qui se passe à l’Assemblée eu égards aux événements que nous voyons tous les jours dans les autres parlements du monde. Toutefois, cela n’excuse pas les incivilités à répétition commises par une petite frange de l’opposition.

Il convient aussi de remarquer que le comportement hostile et farouche de cette opposition, qui brave l’infamie au mépris du devoir imposé par le devoir commun, vise à maintenir en permanence la querelle comme règle pour porter ensuite en accusation la faute sur les autres.

 


L’autre question qui préoccupe les Comoriens concerne Mayotte. Qu’elle est votre regard par rapport à la position comorienne ? Devons-nous poser des conditions préalables à toute négociation ?


S’agissant de l’île comorienne de Mayotte, les députés ont toujours fait bloc derrière le gouvernement et voté à      l’unanimité les résolutions visant au retour de notre île dans son giron naturel. La montée de la violence, de l’intolérance et de l’insécurité durant ces derniers temps à Mayotte a conduit les députés à soutenir à l’unanimité la position du gouvernement. L’Assemblée compte sur ce dernier pour trouver une issue qui nous serait favorable.

La rencontre des deux ministres des Affaires étrangères, français et comorien, prouve non seulement le dynamisme de notre diplomatie mais aussi et surtout notre volonté de parvenir à une solution pacifiquement négociée entre toutes les parties.

 


Il y a également la question du rapport sur le programme de la citoyenneté économique remis au chef de l’Etat. Que vous inspire le travail de la commission parlementaire ?


Le travail effectué par la commission d’enquête parlementaire sur la citoyenneté économique ne souffre d’aucune anomalie. Il a été conduit avec beaucoup de professionnalisme, sans passion ni pression.

Pour les députés ayant participé à l’enquête et qui tournent aujourd’hui leur veste en remettant en cause, après publication du rapport, le travail qu’ils ont eu même effectué, il est à se demander s’il ne s’agit pas purement et simplement de la politique politicienne. Maintenant nous avons confiance en la justice et nous espérons qu’elle ira jusqu’au bout.

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