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Accouchement par césarienne I Entre nécessité et mythes

Accouchement par césarienne I Entre nécessité et mythes

Santé | -   Abdallah Mzembaba

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L’accouchement par voie haute, appelée également césarienne, est devenu plus courant ces dernières années. Pourtant, l’acte, réputé par certaines, choisi par d’autres, n’est pas anodin et reste flou pour beaucoup de parents. Il faut dire aussi que certaines rumeurs qui tournent autour de la césarienne contribuent aux questionnements liés à sa nécessité lors de l’accouchement. Parents et médecin nous livrent ici leurs témoignages et points de vue. 

 

La césarienne est une intervention chirurgicale visant à extraire un enfant de l’utérus par incision de la paroi abdominale et utérine. La césarienne est l’accouchement par voie haute, en ouvrant l’utérus, dont l’indication est retenue pour sauver la mère et l’enfant si l’accouchement par voie basse risque de mettre leur vie en danger», selon le docteur Abdou Ada, gynécologue obstétricien et chirurgien digestif. Pour ce dernier, «le but de la césarienne est de sauver le couple mère-enfant». 


Pourtant, aux yeux de beaucoup de Comoriens, il s’agit d’un acte «motivé» par des raisons financières. C’est aussi ce que croit, Omar Mondoha dont la femme a été césarisée il y a deux ans dans un hôpital public. «Ma femme a effectué tous les examens nécessaires et jusqu’à la veille de l’accouchement, on nous disait que tout était normal pour qu’elle accouche par voie basse. Mais le soir venu, patatras ! Elle a passé la soirée à souffrir avant que l’équipe médicale ne décide finalement de pratiquer une césarienne arguant que le cordon ombilical est enroulé autour du cou du bébé». 

La sécurité avant tout

Une situation que le père de famille a toujours du mal à digérer deux ans après la naissance de sa fille. Pour lui, les «raisons sont purement financières». 
De son côté, docteur Abdou Ada explique que les motivations d’un tel acte sont nombreuses. «On enregistre de moins en moins de complications graves des accouchements. Cela est sans doute dû à l’amélioration de la prise en charge des femmes enceintes, mais aussi aux bonnes décisions des équipes responsables.

 

Dans le même temps, certaines personnes restent réfractaires aux indications des professionnels et l’issue est parfois tragique, malheureusement», assure-t-il avant de déclarer que si «l’augmentation des cas de césariennes s’observe tant dans les cliniques privées que dans les hôpitaux publics, il est permis de conclure que leur indication n’est pas motivée par des raisons pécuniaires. C’est aussi une occasion de rappeler l’apport complémentaire et indispensable des cliniques dans notre système de santé, comme c’est le cas pour les écoles privées dans l’enseignement».


Pour le médecin, la césarienne peut être programmée ou effectuée en urgence lors de l’accouchement. La première intervention est motivée par «la taille du bassin, la disproportion fœto-pelvienne quand le fœtus est plus gros que le bassin de la mère : le diagnostic est vite posé avec l’échographie ; souvent, ce sont des femmes de petite taille». 


Aussi, la césarienne peut être programmée «en cas de présentation de siège lors de la première grossesse, de toute autre présentation atypique, ou de grossesses gémellaires également lors de la première grossesse». Pour le médecin, «aucune grossesse à risque ne devrait se terminer par un accouchement à haut risque. L’esprit qui anime l’obstétricien, c’est que la grossesse se termine bien tant pour la mère que pour le nouveau-né. On pratique rarement des césariennes à convenance personnelle par peur de l’accouchement».

 


 Parallèlement, la césarienne réalisée en urgence est posée «à partir d’un monitoring fœtal qui montre une souffrance fœtale».Et là également les raisons sont multiples comme «sur un utérus cicatriciel en cas de persistance de la cause à l’origine de la première césarienne, un utérus bi cicatriciel, un gros bébé… «. Les complications peuvent aussi être liées à la tension artérielle de la mère pendant la grossesse ou encore si le placenta se place devant et recouvre le col.

Techniques opératoires

Et contrairement, aux raisons financières évoquées, ces causes, aujourd’hui facilement détectables grâce à l’arrivée de nouveaux outils, de l’évolution des techniques opératoires et d’anesthésie, notamment, seraient à l’origine de la montée du nombre d’accouchements par voie haute.


Car, «malgré les recommandations de l’Oms de ne pas dépasser un taux de césariennes de 10 à 15 % des accouchements, on note une recrudescence de la césarienne actuellement dans tous les pays du monde, surtout dans les pays développés et les pays en développement», nous dit le docteur Abdou Ada pour qui «la pratique de la césarienne varie en fonction des pays, du niveau de l’hôpital, de la formation de l’équipe intervenant et selon les exigences sociales».


À noter que sur ce volet, certaines femmes «préfèrent la césarienne». «Je crains l’accouchement par voie basse et préfère, sous l’aval du médecin, me faire opérer. Il y a moins de souffrance et de stress, c’est donc nettement mieux», affirme Amina N, qui «pour des raisons évidentes», ne veut pas divulguer son identité. «Dans notre pays, nous avons des moyens de surveillance et de sécurité peropératoires et postopératoires comparables à ceux des pays en développement, ce qui explique les bons résultats sur les césariennes», déclare docteur Abdou Ada. Une sortie qui conforte Amina N dans son choix.


Et sur 100 naissances, docteur Abdou Ada, gynécologue obstétricien et chirurgien digestif, affirme que le taux est de «25 %, ce qui s’explique par le fait que notre service reçoit des patientes référées pour césarienne uniquement, tandis que le gynécologue obstétricien fait ses accouchements par voie basse dans un autre centre». Le médecin déclare par ailleurs que leur taux de mortalité par «césarienne est nul». Car il faut le dire, si les accouchements par césarienne ont certes augmenté, le taux de mortalité a quant à lui fortement baissé même s’il reste encore beaucoup de choses à faire.

«4 à 5 césariennes» sous réserve

L’année dernière, par exemple, il y a eu une trentaine de décès maternel et au premier semestre de 2021, on est à une dizaine de femmes décédées.
Des chiffres qui restent conséquents même si on est, encore une fois, loin des 172 sur 100 000 naissances vivantes recensées lors de l’Enquête démographique et de santé et à indicateurs multiples de 2012.


Pour revenir à la césarienne, Al-watwan a demandé au docteur Abdou Ada combien de fois une femme peut accoucher par césarienne. «Après une première césarienne, si la raison de la césarienne antérieure n’est pas liée au bassin de la mère, on peut commencer une autre grossesse après un délai de deux ans. Avant ce délai, on estime que la cicatrice intérieure n’est pas assez solide pour accepter une nouvelle grossesse», assure notre source. Actuellement, «avec les antibiotiques, les moyens de limitation du saignement et les bonnes sutures, les cicatrices sur l’utérus sont solides.

Il nous arrive, pour nos patientes, d’aller jusqu’à 4 à 5 césariennes, selon leur désir». Toutefois, «nous déconseillons de tenter un accouchement par voie basse après une césarienne si l’on ne connaît pas les raisons qui avaient motivé la première césarienne, car les ruptures d’utérus peuvent aller jusqu’à 6 %». Le gynécologue affirme par conséquent qu’il «faut rester prudent et éviter un accouchement par voie basse sur utérus cicatriciel, afin de se mettre à l’abri d’éventuelles complications».

 

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