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Cancers gynécologiques : L’après-dépistage, un chaînon manquant

Cancers gynécologiques : L’après-dépistage, un chaînon manquant

Santé | -   Abdallah Mzembaba

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Depuis 2019, chaque mois d’octobre, débute une campagne de sensibilisation à l’endroit de la population sur l’intérêt du dépistage précoce des cancers gynécologiques, notamment celui du sein. Comme à l’accoutumée, l’Association comorienne pour la lutte contre le cancer chez la femme (Accf) relance sa campagne annuelle. Avec le soutien de plusieurs partenaires, l’association continue de mobiliser la population autour d’une cause qui, progressivement, parvient à briser le tabou qui entoure ces maladies.

 

La lutte contre le cancer du sein, notamment, prend une nouvelle dimension chaque mois d’octobre grâce à l’Association comorienne contre le cancer chez la femme (Accf), créée en 2017. À l’occasion d’Octobre Rose, une campagne mondiale dédiée à la sensibilisation et au dépistage précoce des cancers gynécologiques, l’Accf intensifie ses efforts pour briser les tabous autour de cette maladie. Selon Soudjay Asnouna, sage-femme et membre active de l’association, l’idée est née d’une expérience personnelle d’une des cofondatrices de l’association. «Une femme, (Moinafatima Charani, ndlr…) après avoir été dépistée, a pu être soignée en France et est aujourd’hui guérie, Alhamdoulillah», explique-t-elle. Ce cas de succès a mis en lumière la nécessité de sensibiliser la population locale, surtout celles qui n’ont pas les moyens de se faire soigner à l’étranger.

La prise en charge des patientes

Le cancer reste un sujet difficile à aborder dans la société comorienne selon les membres de l’association. La maladie est souvent perçue comme un tabou, voire une honte. Toutefois, grâce aux campagnes régulières de l’Accf, le regard des Comoriens commence à évoluer. «Les gens comprennent de plus en plus que le cancer est une maladie comme les autres et qu’il est crucial de se faire dépister tôt pour augmenter les chances de guérison», souligne Soudjay Asnouna.

 

L’association s’efforce non seulement de sensibiliser, mais aussi de soutenir les patientes dans leurs démarches administratives, notamment celles qui doivent se rendre à l’étranger pour bénéficier de soins spécialisés. Le manque d’infrastructures médicales adéquates dans le pays pose un défi majeur pour la prise en charge des patientes. Hazna Assoumani, responsable de la sensibilisation pour Octobre Rose, dresse un constat alarmant : «Malheureusement, les malades doivent souvent aller se faire soigner ailleurs. Certaines risquent même leur vie en prenant des kwasas pour rejoindre Mayotte». Elle regrette également «la fin de la convention avec l’île Maurice, qui permettait autrefois aux patientes de bénéficier de soins à des coûts moindres. Le système de santé comorien, en particulier l’hôpital El-Maarouf, n’est pas en mesure de répondre aux besoins des malades, notamment en matière de soins palliatifs».


Si l’Accf multiplie les initiatives, comme l’organisation de soirées de levée de fonds avec des partenaires tels que le Rotary Club de Moroni (le 26 octobre prochain), les besoins restent immenses. «Les fonds récoltés sont principalement destinés à financer des mammographies», précise Hazna Assoumani. Toutefois, malgré ces efforts, l’association se heurte à des limites financières importantes. «Nous ne pouvons pas couvrir les frais de billets d’avion pour les patientes qui doivent se rendre à l’étranger ni payer l’intégralité des traitements, qui restent très onéreux», déplore-t-elle.


L’un des objectifs de l’Accf est également de convaincre les autorités publiques de renforcer les infrastructures locales. «On espère que le nouvel hôpital en construction pourra offrir des services adaptés, mais pour l’instant, il n’y a pas grand-chose», constate Hazna Assoumani. Face à cette situation, elle appelle à une véritable prise de conscience des pouvoirs publics et à la mise en place de coopérations avec des pays voisins pour faciliter l’accès aux soins des patientes.
Un autre point essentiel, soulevé par Moinafatima Charani, membre fondatrice de l’Accf, aujourd’hui installée en France, concerne la difficulté à suivre précisément l’évolution des malades. «Nos compétences se limitent à la sensibilisation pour un dépistage précoce. Comme il n’y a pas de prise en charge locale, celles dont les résultats sont anormaux se débrouillent pour partir à l’étranger, mais elles ne reviennent pas toujours vers nous», précise-t-elle. En raison de ce manque de retour, «il est donc impossible de quantifier précisément le nombre de cas guéris, et encore moins les décès liés au cancer», ajoute-t-elle.

560 mammographies
réalisées en 2023

 

Actuellement, on dénombre «11 cas de cancers gynécologiques au pays. Certains de ces patients sont en attente d’évacuation, tandis que d’autres sont déjà rentrés après des soins à l’étranger, nécessitant un suivi régulier». L’Accf a récemment bénéficié de consultations d’une oncologue comorienne résidant à La Réunion, venue en visite aux Comores, qui contribue au suivi des patientes. Cependant, «malgré cet appui ponctuel, la prise en charge à l’extérieur reste le seul espoir pour beaucoup». Depuis sa création en 2017, l’Accf a réalisé d’importants progrès dans la sensibilisation et le dépistage. Sur les six dernières années, l’association a permis de réaliser «2133 mammographies sur les trois îles, dont 1050 ont été entièrement prises en charge, représentant 40,22 % des dépistages pour un montant total de 17 569 800 de francs comoriens. En 2024, l’absence de réponses de l’île Maurice (dans le programme Evasan) pour les demandes d’évacuation sanitaire a compliqué davantage la situation».


Les chiffres avancés par l’Accf révèlent également que sur les 560 mammographies réalisées l’an dernier, 133 ont révélé des anomalies (20,17 %), «ce qui ne signifie pas nécessairement des cancers, mais souvent des fibromes ou des kystes. Des examens complémentaires sont nécessaires pour confirmer un diagnostic de cancer».


Par ailleurs, l’Accf suit actuellement «onze cas de cancers gynécologiques au pays. Certains de ces patientes n’ont pas encore réunies les conditions leur permettant de se rendre à l’étranger, tandis que d’autres sont déjà rentrés après des soins à l’étranger, nécessitant un suivi régulier», fait savoir, depuis la France, Moinafatima Charani ajoutant que cela a notamment été rendu possible grâce à une oncologue comorienne vivant à La Réunion, Dr Maoulida Souriante. Durant cette campagne, «des mammographies à 15 000 francs à El-maarouf et à la polyclinique de Mutsamudu, et à 17 500 francs au centre d’imagerie médicale Cim sont prévus du 5 octobre au 5 novembre». Demain samedi, l’Accf organise une conférence de presse pour lancer officiellement le début de cette campagne 2024.

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