Quelles sont aujourd’hui les capacités matérielles dont dispose le pays pour lutter contre le coronavirus ?
Je commencerai d’abord par les ressources humaines, même si ce n’est pas matériel, parce que c’est le plus important. Nous avons des hommes et des femmes qui se donnent corps et âmes dans ce combat contre la Covid-19.
Pour ce qui est du matériel, nous disposons de trois centres dédiés au coronavirus (Bambao-Mtsanga, Samba et Fomboni) en plus de l’hôpital El-maarouf qui est une unité de transit pour les cas suspects. On les garde ici avant de confirmer ou d’infirmer le diagnostic. Pour ce qui est du gaz, l’Etat a mis les moyens pour éviter toute pénurie.
Un contrat a été signé avec Gazcom pour l’achat de 1.500 bouteilles de gaz à raison de 500 bouteilles par mois à compter de ce mois de juillet. Si le gaz n’est pas un problème, Gazcom a fait savoir qu’il pourrait y avoir une pénurie de bouteilles au vue de cette quantité. L’Etat a ainsi acheté 200 bouteilles vides pour pallier à toute pénurie. La première centaine est déjà arrivée par avion et la deuxième, qui est acheminée par bateau, sera bientôt là. A noter que l’Etat a également a pris des dispositifs qui permettent l’utilisation d’une bouteille par deux personnes en même temps et ce en plus de manomètres.
Et au niveau des équipements de protections individuelles ?
On en reçu 11.900 combinaisons. 5.200 ont été distribués dans les différents centres. Le stock actuel est donc de 6.700. Sur ces 6.700 il faut ajouter 4.000 blouses envoyées par le Royaume du Maroc.
Ce ne sont pas des combinaisons à proprement parler mais accompagnées d’autres éléments comme les masques et les charlottes médicales, elles peuvent bien protéger le personnel médical.
On peut facilement atteindre cinq ou six mois avant d’épuiser tout ce stock sauf s’il y a un pic. Sachez aussi que ces combinaisons sont utilisées par plusieurs acteurs comme le Croissant-rouge, la sécurité civile ou encore le personnel d’El-maarouf. Au niveau des gels, on en avait de l’Ocopharma.
On a commencé avec ça, puis on a reçu 60 flacons de gels de Madagascar. Les Emirats nous ont ensuite envoyé 5.800 flacons et le Maroc nous en a donné 4.000. Ainsi, nous avons distribué 4.260 et 5.600 sont stockés. Je tiens ici à saluer le travail de l’Ocopharma qui est chargé de la distribution de ce matériel. Il y a un logiciel de suivi et tout est fait avec transparence.
Nous avons reçu beaucoup d’aides de pays amis et de sociétés privées notamment, quelle est la quantité exacte de masques que nous avons eus et qu’en reste-t-il ?
En tout, nous avons reçu un million quarante-huit mille masques. L’Etat en a acheté 300.000 et le Royaume du Maroc et la République populaire de Chine nous en ont respectivement donné 500.000 et 100.000. L’homme d’affaires chinois, Jack Ma, nous a également donné 100.000 masques et les Malgaches 1.000 (en tissu). Jusqu’ici nous en avons utilisé 300.000 puisqu’on a donné 156.000 au ministère de l’Education nationale dans le cadre de la reprise des cours. Le personnel de santé en a utilisé 144.000. A noter que les 1.000 masques en tissu et le gel venus de Madagascar ont été distribué dans les trois prisons. Ces derniers sont adaptés à leurs conditions contrairement aux masques à jeter. En tout le stock qui reste nous permettra de tenir jusqu’à un an s’il n’y a pas une explosion des cas. L’utilisation moyenne par mois est de 30 à 35.000 masques.
Les masques sont désormais obligatoires, est-ce qu’ils vont être distribués à la population ? Comment comptez-vous soutenir la population précaire à ce niveau-là ?
Il n’est pas prévu de distribuer de masques à la population. Pour autant, le gouvernement et le comité scientifique ont approché une trentaine d’artisans pour que la confection des masques artisanaux puisse répondre aux normes requises. Le prix a aussi été débattu et le masque artisanal coutera 500 francs. Si jamais les artisans, pour une raison x, ont des difficultés à confectionner les masques par exemple parce que le tissu manque, le gouvernement pourra intervenir. A savoir que l’Etat ne va pas acheter ces masques. Il s’agit de faire en sorte à ce qu’ils soient disponibles dans les magasins pour toute personne qui veut acheter.
Certaines personnes affirment avoir acheté des masques qui proviennent des aides qu’on a reçu, que pouvez-vous nous dire sur ce sujet ?
Effectivement, les masques venus du Maroc ont été volé et mis en vente. Deux pharmaciens sont d’ailleurs impliqués dans cette affaire et sont aux mains des forces de l’ordre dans le cadre d’une enquête ouverte suite à notre plainte.
Cependant, le vol de ces masques, contrairement à ce qui se dit, n’est pas l’œuvre des autorités ou des personnes en charge des différents comités. Ils ont été volés par des petits voyous. Le vol a eu lieu soit à l’Aéroport international Moroni prince Saïd Ibrahim, soit lors du transport entre Hahaya et Moroni ou soit à leur arrivée dans les locaux d’Ocopharma.
A notre arrivée à Moroni, on a constaté que certains cartons ont été ouverts et qu’il manquait des masques mais on n’en a pas tenu rigueur au vue de la quantité du lot (500.000). Nous parlons ici de quelques centaines de masques volés sur la totalité du lot. On nous a ensuite fait savoir que les masques en question étaient en vente à Volo-volo et on a envoyé quelqu’un en acheter pour identifier le vendeur mais en vain.
Samedi dernier, nous avons appris par le biais de la gendarmerie que deux pharmacies de Moroni les vendaient aussi. J’espère que les sanctions envers ces personnes seront exemplaires et qu’elles n’auront plus le droit d’exercer. On ne peut pas avoir une pharmacie et se permettre d’acheter des produits au noir.
Au niveau des médicaments, est-ce que la quantité est suffisante ? Quel protocole utilisé ?
Pour ce qui est de la prise en charge, on a l’artequick qui est la molécule principale. On a déjà utilisé ce médicament dans le traitement de masse contre le paludisme. Et en deuxième ligne on a la chloroquine avec d’autres médicaments utilisés dans ce traitement. Au niveau des médicaments, nous n’avons aucun problème. Nous en avons suffisamment en stock pour traiter jusqu’à cent mille personnes.
Le président a parlé de renforcement du dépistage, est-ce que chacun peut se présenter pour le faire ? Comment ça va se passer ?
Au niveau de la détection du virus, nous avons trois PCR. Ceux acheté par l’Etat et l’Organisation mondiale de la santé sont à l’Inrape ici à Ngazidja.
Celui acheté par la Nouvelle Opaco est à Ndzuani, car il demande des conditions moins rigoureuses et il est donc adapté à l’île étant donné qu’aucun laboratoire, mise à part celui de l’Inrape, ne répond aux critères d’un PCR comme celui de l’Oms.
En plus du PCR à Ndzuani, il y a le GeneXpert qui est un test habituellement utilisé dans les cas de tuberculoses notamment. Le GeneXpert est également utilisé à Mwali. J’ajouterai aussi les tests rapides nasaux et sanguins. En somme, chaque île a la capacité de diagnostiquer le virus. L’Etat a également profité pour acheter des tests de la dengue. Ces outils ont été achetés pour tester les personnes suspectes. Pour pouvoir tester tout le monde, il faudrait acheter plus de tests.
Qu’en est-il des personnes asymptomatiques et de leurs dépistages ? Comment vont se passer leurs suivis et leurs traitements ?
Comme je vous l’ai dit, il n’y a pas de dépistage systématique. Si une personne consulte un médecin et que ce dernier a des doutes sur la présence ou non du virus sur le patient, il peut évidemment lui prescrire un test. L’échantillon sera alors analysé.
Si une personne est malade et on lui a diagnostiqué le virus, on fera aussi des tests sur les sujets contacts. Des fois, ces gens n’ont rien mais le test est nécessaire dans ces cas-là pour écarter le doute. Le troisième cas de figure où le test est nécessaire, c’est quand il y a des gens qui veulent voyager à l’étranger et que le pays de destination exige un test.
C’est d’ailleurs ce qui s’est passé avec nos compatriotes qui étaient à Dubaï par exemple. On a exigé qu’ils viennent avec des tests. Ce que je veux donc dire, c’est qu’on ne va pas prendre quelqu’un dans la rue et venir faire un test.
D’ailleurs, ce n’est pas productif au niveau sanitaire sauf dans les cas d’études de santé publique et ça c’est autre chose. Les patients asymptomatiques, nous les isolons à l’hôpital. Et s’il y a un pic et qu’on est en manque de lits, on peut dans ce cas les suivre à la maison mais nous ferons tout pour éviter une telle situation, puisqu’elle n’est pas sans conséquence, surtout avec la réalité qui est la nôtre, nous Comoriens. Dans ce sens, nous comptons augmenter les lits.
A Samba, on avait une quarantaine de lits au début, là on est à un peu plus de soixante et nous comptons à atteindre une capacité d’une centaine de lits. A Mwali, il y a une dizaine et à Ndzuani, ils ont une forte quantité de lits à l’hôpital de Bambao-Mtsanga. Ici à Ngazidja on peut même envisager la réquisition d’un autre hôpital en cas de besoin.
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