Selon le dernier rapport du ministère de la Santé sur le choléra, Ndzuani a enregistré 87 cas de cette maladie et 3 décès rien que le jeudi 11 avril, pendant que Ngazidja a seulement compté 3 nouveaux cas. A la même date, Ndzuani cumulait 647 cas, soit près du double de Ngazidja avec 344 cas cumulés. Pourtant Ndzuani a été bien tardivement atteinte. Qu’est-ce qui explique cette flambée ?
Effectivement Ndzuani a été tardivement touchée par l'épidémie et pourtant l'île est à ce jour très touchée. Le choléra étant une maladie liée à la promiscuité et aux conditions d'assainissement, plusieurs facteurs contribuent à cette situation. Une forte densité de la population qui va jusqu'à 770 habitants au kilomètre carré contre une moyenne nationale de 465. Se pose également la question des rivières agonisant avec de faibles débits d'eau, où s'entassent les déchets plastiques, les couches et où les gens y viennent faire leurs besoins, leurs lessives, laver leur vaisselle, y puiser leur eau...
Autre constante : les quartiers les plus touchés sont les quartiers périurbains essentiellement constitués de bidonvilles où les questions d'assainissement sont criantes, avec des populations très mobiles vivant de petits métiers. L'autre grosse épine c'est le traitement de l'eau courante de nos ménages.
En quoi a consisté jusqu’à présent votre plan de riposte ? A-t-il été suivi comme il faut ?
Notre plan de riposte pour les premiers foyers (Mwamwa, Page), bien qu’il ait été difficile à réaliser, a permis d’endiguer ces premiers foyers. Nous n'y avons presque pas de cas maintenant. Mais tu te rends compte que les facteurs cités sont des facteurs structurels ; y agir dans l'urgence n'est pas chose aisée. Le déni de la maladie par la population ne nous aide pas.
Peut-on prévoir la période du pic de l’épidémie au niveau de l’île, et peut-on prévoir un délai pour son élimination ?
Nous ne sommes pas dans le secret de Dieu, mais la dernière épidémie de 2007 avait duré 11 mois. Nous n'espérons pas en arriver là mais nous nous préparons en conséquence.
En quoi la riposte contre le choléra diffère-t-elle de celle contre la Covid-19 ?
La première différence entre le choléra et la Covid-19 est que le choléra est une épidémie que l'humanité connaît depuis des siècles. Donc du point de vue de la gestion de l'épidémie et de la prise en charge, il y a un savoir-faire et une expérience mondiale. A l'échelle même du pays, nous sommes à notre 6ème épidémie, depuis celles de 1974,1975, 1998,2002,2007 jusqu’à l'actuelle. A l'opposé, la Covid-19 était une nouvelle maladie qui concernait la planète entière (pandémie). Elle prenait de court la médecine et le monde scientifique, et à plus forte raison un petit État insulaire comme le nôtre.
Il semble que le gouvernement ait refusé l’option du vaccin contre cette épidémie, proposée par l’Oms. Savez-vous pourquoi?
La dernière information que je détiens semble plutôt en faveur d'un acheminement du gouvernement vers un vaccin. En sachant que la vaccination est un élément parmi l'arsenal déployé en termes d'assainissement, d'accès à l'eau potable.
Quel traitement est réservé aux agents engagés dans la riposte ?
A ce jour, les équipes qui interviennent au niveau des centres de prise en charge de Samba, Fomboni et Hombo reçoivent des motivations. Un deuxième centre est ouvert à Domoni depuis hier.
De même les équipes appelé Cati, qui interviennent dans les ménages pour la décontamination, le porte à porte et la sensibilisation sont également motivés. Par contre les équipes intervenant aux points d'entrée (port, petit port de Dodin) ne le sont pas encore, de même que les équipes dites d'intervention rapide.