L’hépatite B prend de l’ampleur dans notre pays. C’est ce qu’affirme le point focal du sida et de l’hépatite, le Dr Ahmed Mohamed Abdourazak. Il indique que, comme les autres pays du monde, les Comores ont mis en place un système de surveillance et la sécurité transfusionnelle en 1987. L’année suivante a été découvert le premier cas du Vih/Sida, et cela a permis de découvrir d’autres maladies comme la syphilis et l’hépatite B. Depuis, aucune transfusion ne peut être réalisée sans analyse du sang, au préalable, pour vérifier si le donneur ne présente aucune de ces maladies.
Au niveau de l’hépatite B, l’analyse est faite systématiquement aux donneurs de sang et aux femmes enceintes. Selon le Dr Abdourazak, les Comores ont commencé à réaliser les analyses de l’hépatite C en 2000 à Ngazidja et Ndzuani et en 2008 à Mwali. «Mais c’est l’hépatite B qui est plus répandue», a-t-il indiqué.
Absence de données
au niveau national
Les Comores ont mis en place la vaccination contre l’hépatite B en 2003. «Ce vaccin est gratuit de 0 à 11 mois, ainsi les enfants nés à partir de 2003 sont protégés à vie contre l’hépatite B». Par ailleurs, les données dont disposaient les Comores jusque-là sont des données de routine des donneurs de sang et des femmes enceintes, le pays n’ayant jamais effectué une enquête nationale.
Ce n’est qu’en 2018 qu’une enquête sur une population cible, à savoir les homosexuels hommes (Hsh), les travailleurs de sexe, les personnes qui se droguent par injection et les jeunes de 15 à 24 ans a été faite. Cette enquête montre que l’hépatite B chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans représente 6%, les travailleuses de sexe 2%, les Hsh 4% et les drogués par injection 1,54%.
Au niveau mondial, deux milliards de personnes sont infectées par le virus de l’hépatite B. Trois cent cinquante millions de porteurs sont chroniques. Il est à préciser que si un adulte attrape l’hépatite B, il a 90% de chance de guérir spontanément au bout de six mois contre 10% pour devenir un porteur chronique. Parmi les 350 millions de personnes, on peut trouver des porteurs inactifs qui peuvent vivre de nombreuses années et au bout du temps ils peuvent guérir, tout comme ils peuvent devenir actifs.
Décès non argumentés
Les personnes porteuses d’hépatite B chroniques actives finissent par arriver à un certain stade où le foie peut être infecté. C’est un stade qui peut entrainer la cirrhose puis le cancer du foie. «Il n y’a pas de symptôme de l’hépatite B autre que la jaunisse au niveau des yeux et du corps. Ainsi, il faut faire l’analyse pour savoir si on a la maladie ou non», a conseillé Dr Abdourazak.
Un million de personnes décèdent par an à cause de l’hépatite B dans le monde. Aux Comores, à en croire le médecin, il y a des décès dus à l’hépatite B mais non répertoriés. «Quatre personnes de la même famille de la région d’Itsandra sont mortes à cause de l’hépatite B, mais ces décès ne sont pas argumentés», témoigne le médecin qui précise que parmi les facteurs qui causent le cancer, l’hépatite B vient en deuxième position après le tabac.
Etude sur des
personnes cibles
Le Dr Ahmed Abdourazak, qui encadre chaque année des étudiants de l’école de santé pour la préparation de leur mémoire, a en substance mené une étude en 2011 sur les données de 2007 à 2010 concernant les donneurs de sang. Cette étude indique que sur 8.521 donneurs de sang 284 sont positifs à Ngazidja, soit une prévalence de 3%, au niveau de Ndzuani 2,3% et Mwali 11%. «Une autre étude que j’ai faite en 2014, réalisée sur les femmes enceintes, indique une prévalence de 3% sur 1.600 femmes enceintes suivies à El-Maarouf. Donc on a conclu que la prévalence de 2007 à 2014, était à 3%. De même, une étude sur la tendance évolutive de la femme enceinte que j’ai effectuée sur 1.691 femmes enceintes suivies à El-Maarouf cette année a montré que la prévalence qui était de 3% en 2016 est passée à 5,4% en 2017». Le Dr Ahmed Abdourazak indique que la tendance a doublée car on est passé de 3 à 6%. Face à cette situation, le point focal de la maladie souligne qu’il est impératif de mettre en place une prévention, à savoir, dépister systématiquement les donneurs de sang et les femmes enceintes, car ils sont représentatifs. Dépister les partenaires positifs et leur entourage familiale, mais aussi le suivi et la prise en charge de la femme enceinte porteuse de l’Ag Hbs. «Parmi les mesures à prendre, il faut vacciner à la naissance les nouveau-nés dont les mères sont infectées, effectuer la vaccination de routine chez les enfants», propose le médecin, selon qui, le pays dispose des médicaments moins chers pour les personnes atteintes de l’hépatite B. «Un médicament serait également disponible pour guérir l’hépatite C, mais dans notre pays, on ne dispose pas des cas d’hépatite C», rassure-t-il.
La transmission se fait soit par voie sexuelle et/ou sanguine (transfusion, instrument souillé à l’hôpital, lors de la circoncision, l’excision, ou l’opération de ventouse, si la lame utilisée pour la scarification sert à d’autres personnes, elles risquent d’être contaminées, et la corne), ou de la mère à l’enfant (pendant la grossesse, l’accouchement ou l’allaitement).
Le médecin propose la vaccination des personnes à risque dont le personnel soignant, les éboueurs, les personnes qui font la dialyse, et les donneurs de sang ou d’organes. Il recommande également une enquête nationale sur toute la population pour que le pays dispose de données fiables.