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Marchés douteux et salaires fictifs I La gestion d’El-Maarouf épinglée par la section des comptes de la cour suprême

Marchés douteux et salaires fictifs I La gestion d’El-Maarouf épinglée par la section des comptes de la cour suprême

Santé | -   Abdou Moustoifa

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Dans leur rapport, les auditeurs de la section des comptes de la cour suprême ont également constaté une augmentation constante des salaires à chaque mois au cours de l’année 2022 ainsi que des salaires fictifs versés à des agents.

 

Le centre hospitalier national d’El-Maarouf ne serait pas un bon élève en matière de gestion financière. Cela a été confirmé par un récent rapport, rendu le 13 mai dernier par la section des comptes de la cour suprême. Le gendarme des finances publiques a en effet mené un contrôle au sein de l’établissement hospitalier de référence. L’enquête couvrait deux exercices, à savoir 2022 et 2023.

Selon l’audit, administrativement, El-maarouf ne fait pas mieux que les autres sociétés publiques. D’abord il fonctionne sans budget prévisionnel ni conseil d’administration. Ensuite, les recettes que font rentrer les services de l’hôpital semblent s’évaporer, selon les constats des auditeurs. En 2023, les fonds propres présentés par le service de comptabilité s’élevaient à 838 millions 084 francs, alors qu’après calculs, la section des comptes a découvert que les recettes auraient dû atteindre 1 milliard 552 mille francs, soit un écart de 714 millions 375 mille francs, non justifié. « Il est difficile de se prononcer sur la sincérité des recettes présentées dans les comptes du centre national hospitalier El-maarouf pour les années 2022_2023 », préviennent les enquêteurs.

Selon ces derniers, l’établissement hospitalier attribuait des marchés publics de gré à gré en violation des lois. Sur les 12 marchés recensés, évalués à plus de 960 millions de francs (des achats de voitures en majorité), il manquait parfois les contrats, les factures, ou encore les justificatifs de paiement.

Augmentation mensuelle des salaires

La cour a aussi noté dans son rapport de 39 pages, « des contradictions au niveau des recettes enregistrées dans le compte d’exploitation et celles contenues dans les comptes des régies communiquées par la comptabilité ». S’agissant des dépenses engagées sans la présentation de pièces (une pratique observée souvent durant les audits menés par la section des comptes), El-Maarouf n’y échappe pas. « En 2022, des virements effectués sans pièces ont atteint 227 millions 982 mille francs, tandis qu’en 2023, les dépenses engagées sans le moindre document avoisinaient les 28 millions 170 mille francs », déplore le rapport. Sur les virements, on a recensé parmi les gros montants, 30 millions de francs pour une avance de travaux externes, 21 millions qui auraient servi à la construction du centre d’imagerie et enfin 28 millions de francs d’un scanner de marque Hitachi, sans facture.

 

Au niveau des salaires, là encore, des incohérences sont décelées. Durant ses investigations, le gendarme des finances publiques a découvert une hausse des salaires à chaque mois, tout au long de l’année 2022. « Entre janvier et février, il y a eu une augmentation de 42 millions de francs tandis que le mois suivant, c’est-à-dire mars à avril, la hausse était de 1 million 24 mille francs », pointe l’audit, qui s’appuyait sur les états de salaires.

Des agents fantômes

Il faut savoir qu’entre 2022 et 2023, le personnel d’El-maarouf est passé de 736 à 803 agents. Ceux-ci sont composés entre autres de médecins, infirmiers, aides-soignants, sage-femmes, techniciens et agents de maintenance.  Au-delà de la hausse de la masse salariale, les auditeurs ont constaté l’existence de salaires fictifs versés à des agents fantômes pendant la période passée en revue.

Des employés auraient touché 2 millions 29 mille francs ainsi que des primes. Entre 2022 et 2023, des anomalies identifiées comme des fraudes dans les comptes de 11 agents font apparaitre un préjudice de 13 millions 363 mille francs. Un tableau qui retraçait les dettes contactées par l’établissement hospitalier envers des fournisseurs indique aussi la somme de 123 millions 685 mille francs. Ces créances ne comportent pas de dossiers justifiant des paiements. 

 

Dans ses recommandations, la section des comptes a demandé des remboursements. « La cour a constaté que la direction payait des agents fictifs et faisait des virements indus à des agents. Ces paiements et virements représentent des fraudes et des manques à gagner pour l’établissement. Les montants en question doivent être remboursés, sur le champ, par les fraudeurs et les bénéficiaires des virements. Ces fraudeurs doivent être sanctionnés et une action en justice doit être engagée à leur encontre », écrivent les enquêteurs à la fin du rapport, qui a déploré des incohérences dans les charges personnelles et les indemnités. En 2022, un écart de 51 millions 300 mille francs n’a pas pu être justifié entre les montants présentés dans les comptes de résultat (tableau qui récapitule les produits et les charges) et les états de salaires.

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