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Pharmacies de garde I Chaque pharmacie de garde sommée de disposer de médicaments de première nécessité

Pharmacies de garde I Chaque pharmacie de garde sommée de disposer de médicaments de première nécessité

Santé | -   Abouhariat Said Abdallah

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Un conflit est engagé entre les organisations professionnelles et les agences de l’Etat en charge de la gestion de stock des médicaments génériques et essentiels destinés à la population. Estimant que l’Ocopharma et l’Anamev s’arrogent des pouvoirs qui dépassent leur champ de compétences, les pharmaciens veulent se dédouaner de toute responsabilité en cas de pénurie de médicaments le week-end. Les structures de l’Etat ont décidé d’en assurer la vente après avoir constaté «une hausse injustifiée» des prix des médicaments dans certaines pharmacies. Retour sur un la guerre sans fin que se livrent les acteurs du secteur.

 

Tout pharmacien en exercice qui est inscrit à l’Ordre des pharmaciens est tenu à faire la garde. Cela fait partie des obligations prévues dans le code de la santé et que l’Etat impose aux pharmaciens, si l’on en croit les propos du secrétaire général de l’ordre des pharmaciens. Selon Hassan Barwan, il n’y a pas de critères spécifiques qui font qu’une pharmacie observe la garde. Dès qu’elle est inscrite sur le tableau de l’Ordre, paie sa cotisation annuelle, et dispose d’une autorisation, la pharmacie est obligée de faire la garde. Toutefois, la question de la disponibilité des médicaments de première nécessité dépend de la gestion de chaque pharmacien. «C’est le gros soucis qu’on a», regrette le pharmacien Hassan Barwan, selon qui, le sujet a fait l’objet de plusieurs discussions entre le ministère de tutelle et les organisations professionnelles.


Des solutions étaient avancées. Des paniers de gardes devaient être mis en place. L’Ocopharma et l’Ordre des pharmaciens devaient élaborer la liste des médicaments de première nécessité. Et chaque pharmacien était tenu de disposer systématiquement de cette liste. Mais avec le changement du ministre et des responsables de l’Ocopharma, la liste n’a pas été faite. Le pharmacien regrette l’absence d’un comité de contrôle et d’inspection qui peut s’en occuper. «Et nous en tant que pharmaciens, on ne peut pas empêcher quelqu’un de faire la garde alors que la loi l’autorise», avance-t-il. Ainsi, pour pallier à ce vide, les pharmaciens se chargent de s’enquérir des médicaments qui leur manquent auprès des collègues pendant les jours de garde. «Personnellement, si je suis en manque de produits, je m’en procure chez un collègue, certains ne voient pas l’utilité. A chacun sa conscience, si c’est moi qui assure la garde, je me prépare davantage» déclare le Dr Hassane Barwan.

Présence d’un pharmacien obligé

Par ailleurs, avec la mise en place de l’agence nationale des évacuations sanitaires et des médicaments (Anamev) les pharmaciens disent ignorer tout. «On ne sait pas si c’est l’Anamev ou l’Ocopharma qui va faire la liste des produits du panier de garde. A notre niveau, on demande ceux qui ne sont pas en mesure d’assurer la garde à ne pas le faire. Certaines pharmacies qui ne répondent pas aux critères ou qui sont en retard au niveau de la cotisation n’observent pas la garde. Tout comme ceux qui ont des dossiers incomplets au niveau de l’Ordre et dans certaines pharmacies, il n’y a pas de pharmaciens…», a largement expliqué M. Barwan, précisant que certains pharmacies acceptent de ne pas assurer la garde car ils n’ont pas suffisamment de produits.


Sur un total de 18 pharmacies à Moroni, 14 font les gardes avec des rotations en fonction des disponibilités de chacune. Chaque pharmacie est tenue à assurer la garde une semaine durant et c’est le syndicat des pharmaciens qui se charge d’établir la liste. «La garde est assurée du lundi au lundi suivant, et les gardes c’est surtout le samedi-dimanche, ce qui explique qu’il y a parfois des ruptures. Il arrive des fois qu’on épuise la commande courant de la semaine et le week-end on se retrouve avec quelques médicaments. C’est ainsi qu’on incite les pharmaciens à s’en procurer auprès de leurs collègues», a détaillé le secrétaire général de l’Ordre des pharmaciens.
A ce propos, le directeur général de l’Ocopharma, Dr Nakib Ben Ali Mbaraka, indique que la liste des médicaments de première nécessité est disponible à l’Ocopharma. «C’est la mission principale de l’Ocopharma. Cette liste de médicaments essentiels est là depuis, de même que les médicaments génériques sont disponibles. Il suffit de réactualiser la liste», avance le patron de l’Ocopharma. Au sujet des ruptures constatées parfois lors des gardes, il indiquera qu’il y’a lieu à se paniquer. «L’Etat nous a confié la commande des médicaments essentiels ainsi que certains médicaments de spécialité, et cela ne fait pas plaisir aux pharmaciens, mais les médicaments génériques de premier nécessité sont disponibles à tout moment», a souligné le chef de l’Ocopharma. Et son adjoint, le Dr Radjab Alhadhur, de renchérir : «c’est l’Etat, à travers le ministère de la Santé, qui structure la liste des médicaments essentiels en fonction du pays. Et nous exploitons et commandons tous les génériques et toutes les pharmacies s’approvisionnent à l’Ocopharma». A un moment, l’idée de deux pharmacies de gardes étaient en étude, mais cela a été écarté avec l’absence de panier de garde et donc de médicaments de premier nécessité.

10% de marge

Il parait que certaines pharmacies se permettent d’augmenter le prix de médicaments les jours de garde, sachant qu’on est obligé d’acheter dans sa pharmacie quel que soit le prix. A ce propos, le secrétaire général de l’Ordre des pharmaciens dit ignorer cette pratique et indique qu’aucun pharmacien n’a le droit de modifier la structure des prix le jour de garde. Il soutient par contre que souvent les pharmacies de garde sont obligées d’aller prendre les médicaments chez un collègue, mais logiquement, le collègue observe une remise de 5 à 10%, et le pharmacien doit tenir compte de cette remise, mais ne doit pas remettre encore une marge de 35% sur le produit. «On est tenu de vendre 38%, c’est la marge commerciale des pharmacies on ne peut pas aller au-dessus ni au-dessous. La marge de 10% est mise en place par l’Etat et le pharmacien doit en tenir compte», dit-il.


Le Dr Hassan Barwan avance tout de même que dans certains pays, à partir d’une certaine heure, il y a certains prix qui augmentent mais aux Comores, cela n’a jamais été discuté, nulle part. Les pharmaciens sont en outre tenus de s’approvisionner des médicaments lors des gardes à l’Ocopharma. Mais un problème se pose, cette dernière observe les gardes aussi samedi et dimanche. «Cela nous pose préjudice car des fois on fait des commandes et leur pharmacie ouvre, or au lieu de commander des médicaments de spécialités, on commande aussi les produits génériques de l’Ocopharma. Logiquement, ou bien ils n’ouvrent pas et nous, pharmaciens privés, on commande tous les produits qu’on a besoin chez eux, ou bien ils ouvrent mais dans ce cas il ne faudrait pas qu’on nous reproche de ne pas disposer de leurs produits. Nous leur avons demandé de fermer pendant les gardes, mais ils disent qu’ils sont obligés de le faire parce que l’hôpital ne fonctionne pas bien», indique le pharmacien.


Sur ce sujet, le directeur général adjoint de l’Ocopharma indique que l’origine des gardes de l’Ocopharma est qu’il y avait une épidémie et que les pharmacies privées n’arrivaient pas à assumer la disponibilité des médicaments et le ministère de la Santé a obligé à l’Ocopharma d’assurer des gardes pour pallier ce vide afin qu’il n’y ait plus de pénurie des produits génériques. «Nos pharmacies ouvrent jusqu’à 17h, mais le gouvernement nous a obligés d’aller jusqu’à 23h, mais cela ne nous arrange pas, car nous avions à déployer des moyens en dehors des heures normales. Maintenir le personnel jusqu’à 23h me pose un problème à moi aussi, mais le gouvernement m’y oblige», avance le directeur général de l’Ocopharma qui confie en outre que le gouvernement leur a également exigé d’assurer le fonctionnement et la gestion de la pharmacie d’El-Maarouf.

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