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Santé et autopsie des corps I Des professionnels de la santé déplorent l’inexistence d’un médecin légiste dans le pays

Santé et autopsie des corps I Des professionnels de la santé déplorent l’inexistence d’un médecin légiste dans le pays

Santé | -   Abouhariat Said Abdallah

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Le pays enregistre ces dernières années, une recrudescence de cas de cadavres découverts en dehors des foyers ou des hôpitaux. Dr Djabir Ibrahim, le médecin en chef du service des urgences au centre hospitalier national El-Maarouf, parle de deux décès en moyenne par mois. Certains de ces décès ne sont pas identifiés, et parfois leurs causes ne sont pas élucidées. C’est ainsi que nos reporters sont allés à la rencontre de la gendarmerie, de la Dgsc (autrement dit Cosep, Ndlr), du parquet et auprès des médecins pour connaitre les difficultés rencontrées, leurs limites et les travaux qui se réalisent pour pallier l’absence d’un médecin légiste.

 

A la direction générale de la sécurité civile (Dgsc), le commandant de l’unité de Ngazidja, Abderemane Mahmoud, se confie en ce qui concerne la première intervention de ses agents à la découverte d’un cadavre. «Une fois arrivés sur place, nous appelons la gendarmerie. Et cela dépend bien de l’état du corps découvert. A notre niveau, nous nous indiquons si le corps est privé de tête, s’il est raide ou décomposé et s’il dégage une odeur. Si nous trouvons ces trois cas, nous ne pouvons en aucun cas le déplacer, nous appelons la gendarmerie, cette dernière contacte le procureur puis un médecin pour la procédure légale jusqu’à la levée du corps», confie-t-il, insistant qu’ils n’ont pas le droit de le déplacer. L’ordre de levée du corps est ordonné par le parquet.


Si les pompiers se trouvent devant un corps frais, ils procèdent à un massage cardiaque, ou à une réanimation, car seul un médecin est appelé à confirmer le décès. Abderemane Mahmoud explique avec regret que, souvent, ils trainent beaucoup avec le corps une fois arrivé à El-Maarouf, les pompiers se chamaillent avec les médecins qui disent qu’ils leur ramènent des cadavres. D’ailleurs, des fois, ils refusent de s’occuper du corps. «Il est inadmissible que dans un pays, il n’existe pas de médecin légiste, il est temps que le pays prenne conscience, à un moment on peut être confronté à de grandes difficultés», souligne-t-il.

Levée du corps non respectée

Appelé souvent à intervenir, le médecin en chef du service des urgences du Chn El-Maarouf, Dr Djabir Ibrahim, se lance dans l’explication de la médecine légale et la gestion du corps pour aider la justice. Selon lui, la levée du corps de tout mort suspect doit se faire par un médecin en présence de la justice. Il regrette que dans notre pays, la levée du corps ne soit pas respectée. Or, pour connaitre la cause du décès, l’enquête commence sur place, parfois le dossier peut être fermé sur place car il y a des éléments qui font qu’on reconnaisse la cause du décès.
La première chose à faire, selon lui, lorsqu’on découvre un cadavre quelque part, c’est d’appeler le parquet et ce dernier va réquisitionner le médecin qui va procéder à la levée du corps. Et toutes les instances compétentes doivent être au courant, les pompiers, la police judiciaire et la gendarmerie. La deuxième étape est l’examen du corps. «Tout médecin peut procéder à un examen du corps», précisera-t-il, expliquant la procédure de cet examen. «Si dans l’examen du corps tu n’arrives pas à répondre à la justice, on passe à la deuxième étape, faire appel à un chirurgien pour opérer le corps, l’intervention chirurgicale d’un corps mort commence par le crâne, puis le thorax et l’examen des reins. Même si on découvre la cause, on est obligé de continuer identifier s’il n’y a pas d’autres indices», avance le médecin urgentiste à propos de la procédure normale.


Il rappellera que certains médecins sont formés par l’Etat comorien pour l’examen et la levée du corps. Ainsi, on peut ouvrir une unité médico-judiciaire et en cas de problème, la justice fera appel à cette unité en attendant qu’on ait un médecin légiste. «C’est ainsi qu’on pourra répondre à la justice», a-t-il proposé. Concernant les moyens, Dr Djabir Ibrahim regrette le manque de fonds réservés à ces interventions, et qu’il appartient à la justice d’indemniser, même si ce dernier ne le fait pas forcément. «Les médecins doivent être payés pour ce travail, mais la justice ne paie pas. Parfois, ce sont les familles qui l’indemnisent», déplore-t-il.

L’absence de médecin légiste n’handicape pas l’autopsie

«S’il faut opérer, l’Etat et la famille doivent être prêts, il devrait y avoir également les moyens de conserver le corps et faire appel à un médecin légiste», a-t-il souligné. Et de rappeler que le pays a déjà fait une autopsie en faisant appel à un médecin tanzanien en 2011. «La première chose difficile est l’identification du corps, mais si cette question ne se pose pas, on doit faire la datation de la mort, une tâche qui n’est pas non plus facile. Après, on déterminera la cause. Si la mort est naturelle, on ferme le dossier, s’il y a une cause on ouvre le dossier», a expliqué le médecin urgentiste. «C’est la justice qui demande l’examen du corps et la gendarmerie doit être présente car le travail doit être validé», devait-il préciser.


Pour le docteur Djabir Ibrahim, tout médecin ayant le titre de docteur [dans un pays francophone], est capable d’examiner un corps, jusqu’à un certain stade. «Tout médecin est en mesure de répondre à la question de la justice et déterminer la cause du décès, mais peut fermer le rapport médical en disant que ce n’est pas fini, il faut une intervention chirurgicale. Maintenant, si nos chirurgiens peuvent opérer et répondre à la justice, ils vont opérer, faire les prélèvements et les autorités compétentes vont envoyer les données dans les laboratoires requises pour répondre aux questions», a détaillé l’urgentiste, selon qui, «l’absence de médecin légiste n’handicape pas l’autopsie, puisque nous avons des chirurgiens, même si le chirurgien ne fait pas office de médecin légiste. L’autopsie consiste à opérer le corps et répondre, et le chirurgien peut être coincé quelque part et faire appel à des spécialistes». Dr Djabir indique qu’il enregistre deux interventions en moyenne, pour deux morts suspects, par mois. «Là, on parle uniquement de celles sur lesquelles on intervient, mais certains sont enterrés sans qu’on le sache», dit-il.
En ce qui concerne les problèmes avec la Dgsc (autrement dit Cosep, Ndlr), le médecin indique que les urgences sont faites pour gérer des vivants. En cas d’une mort déclarée, il y a désormais un endroit spécial pour le mettre. «Si le corps est amené par la famille, le service des urgences devrait agir au cas où il nécessite une réanimation», a-t-il expliqué.


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