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Santé publique I Les dangers des aliments produits avec des engrais chimiques

Santé publique I Les dangers des aliments produits avec des engrais chimiques

Santé | -   Ahmed Zaidou

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Les professionnels de santé ne cessent d’alerter sur les conséquences des aliments génétiquement modifiés ou les cultures faites à base d’engrais chimiques. Dans l’un ou dans l’autre, les spécialistes sont unanimes sur la toxicité des produits et les répercussions négatives sur la santé humaine. Malgré l’absence de statistiques officielles, les victimes qui se comptent par centaines aux Comores développent des maladies cardiovasculaires, entre autres, suscitant l’inquiétude des autorités sanitaires. Retour sur ce phénomène qui connait une ampleur particulière à Ndzuani et les efforts entrepris sur place pour développer une agriculture bio.

 

Saindou Bacar est un agriculteur pas comme les autres à Mramani dans la région de Nyumakelé. Il a décidé, il y a 10 ans, de travailler sans produit chimique depuis qu’il a su que «les engrais sont la cause de plusieurs maladies». Il cultive des produits bios dans une petite parcelle au Centre d’insertion professionnelle de l’Ong Maecha. Il est un passionné des cultures du maïs, du piment, mais surtout des tomates cerise. Sa seule préoccupation : préserver son sol des matières chimiques quelconques. C’est ainsi que, là où les autres vont mettre deux mois pour produire, ses produits ont besoin d’un mois de plus pour être consommés.


La technique de Saindou Bacar est ancienne et sans conséquence. Ses engrais sont naturels. Il pratique également l’association de cultures. «Là où les autres vont mettre deux mois, moi, il va me falloir entre trois et quatre mois pour que les fruits et légumes soient prêts à la consommation. Je n’utilise pas d’engrais chimiques, mais des engrais naturels. Ce sont des excréments d’animaux. Mes plantes poussent naturellement. Mes productions ont également plus de valeur sur le marché», explique-t-il. Ne pas utiliser de produits chimiques s’avère être un grand défi pour ce sexagénaire.Seul inconvénient, près de 10 % de sa production est détruit par les insectes chaque année. «Les difficultés sont liées aux insectes qui détruisent les plantations surtout au moment de la récolte. Et tout ça, c’est parce que je n’utilise pas de produits chimiques. Les pertes ne sont pas énormes que ça. Ceux qui tombent par terre, je les laisse. Ils servent de fertilisant du sol», dit-il.

Produire plus, mais sans risque ?

Les engrais chimiques se substituent aux nutriments essentiels des sols. Ils restituent aux sols des éléments qui en ont été extraits et exportés par la récolte ou après les pluies. Et l’azote compte parmi les éléments qui sont particulièrement importants à restituer au sol. «Déjà, il faut comprendre, comment est composé le sol. Ce dernier est composé d’eau, d’air et de matières organiques, plus 3 minéraux qui doivent être dans le sol. Ce sont l’azote, le phosphore et le potassium», explique la jeune ingénieure agronome Layat Touffaiel Allaoui.

Cette dernière ajoute que «la plupart des sols manquent certains de ces éléments ou ne sont pas suffisants pour que les plantes puissent pousser. Les engrais que les gens utilisent contiennent ces nutriments essentiels aux sols. Et qui dit agriculture biologique, c’est la non-utilisation des pesticides et des insecticides. Ces derniers sont ce qu’on arrose au-dessus de la plante pour que celle-ci n’attrape pas de maladie». Layat Touffaiel Allaoui ajoute que «les gens préfèrent utiliser les engrais dans le but commercial pour que la plante ait les ressources nécessaires à son développement. Les agriculteurs ne savent pas malheureusement utiliser les engrais. Si aujourd’hui, les tomates sentent le Decis (D6) jusqu’à chez le consommateur, c’est que l’agriculteur a abusé des quantités. Ils doivent suivre des formations. Il est possible que les gens plantent sans engrais chimiques. Les pays développés le font. Il n’y a pas de technologie moderne. C’est une question de conservation du sol et de l’environnement pour que le sol garde les minéraux nécessaires au bon développement des plantes».

Rapport qualité-prix au mépris de la santé

La situation socio-économique et les habitudes alimentaires actuelles font que la population comorienne consomme souvent des produits dangereux. Il y a aussi le rapport qualité-prix lié à la cherté des produits issus de l’agriculture biologique ou des «produits sains». Les clients veulent toujours acheter moins-cher. «Aux Comores, puisque nous ne plantons pas comme nous devrions, les engrais biologiques ne peuvent pas substituer les engrais naturels. Des tonnes d’excréments animales, c’est l’équivalent d’une boîte d’engrais. En plus, nous sommes un pays montagneux, particulièrement l’île de Ndzuani avec beaucoup d’érosion. Les nutriments, la richesse des sols sont emportés vers la mer».


Elle ajoute : «même avec les engrais chimiques, nous n’arrivons pas à produire suffisamment. Ici, nous devons avoir une agriculture raisonnable. Nous ne devons pas trop être biologiques ni abusés des matières chimiques. Il faut favoriser les légumes et les produits maraîchers dans les serres. Il y a beaucoup d’avantages puisque nous pouvons contrôler le flux lumineux, la température entre autres. Nous pouvons aussi produire en hauteur», explique la jeune agronome. Saindou Bacar, pour sa part reconnaît la nuisance des produits agricoles contenant des substances chimiques. «Les engrais chimiques profèrent beaucoup de maladies cardiaques graves. C’est après que j’aie su que les produits chimiques utilisés pour booster les plantes sont dangereux que je n’en utilise plus. Les agriculteurs eux mêmes connaissent les conséquences de leurs produits. C’est ce qui fait que beaucoup de personnes dans la région préfèrent mes fruits et légumes», dit-il.

L’intoxication chronique

Quant aux dangers, la direction régionale de la santé de l’île parle d’intoxications aiguës et chroniques. «L’intoxication aiguë se produit immédiatement ou peu après une exposition ponctuelle ou de courtes durées à un pesticide. Les adultes et enfants pourraient s’intoxiquer parce qu’ils ont manipulé des pesticides sans prendre toutes les précautions nécessaires. La gravité d’une intoxication aiguë peut varier selon la toxicité du pesticide, la quantité et la concentration de l’ingrédient actif dans le produit et la voie d’exposition».


S’agissant des symptômes, les autorités sanitaires les énumèrent en détail. «Les symptômes ou signes les plus fréquents d’une intoxication aiguë aux pesticides sont les maux de tête, les nausées, les vomissements, les étourdissements, la fatigue, la perte d’appétit et l’irritation des yeux ou de la peau à l’endroit du contact avec le produit», souligne la responsable «Nutrition» à la Drs de Ndzuani, Asmarate Halidi.«L’intoxication chronique, c’est quand une personne peut aussi ressentir des effets toxiques après avoir été en contact avec de faibles doses de pesticides pendant des jours, des mois ou des années. La personne est alors victime d’une intoxication chronique. Les principaux symptômes ou signes qui peuvent indiquer la présence d’une intoxication chronique sont la fatigue, les maux de tête fréquents, le manque d’appétit ou même la perte de poids», a-t-elle conclu.

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