Le 12 septembre 2025 restera une date sombre pour Azad Abdallah. Ce soir-là, alors qu’il circulait en trottinette dans sa localité natale, Niumadzaha ya Bambao, ce jeune homme, qui avait toute la vie devant lui, est victime d’un grave accident de la circulation vers 21h. Blessé, il est transporté à l’hôpital El-Maarouf vers 22h, où l’on constate des fractures à l’humérus et au péroné gauche. Ce séjour, qui aurait dû être une étape de guérison, va le marquer à jamais.
Le soir même, Azad subit une intervention. Mais le médecin, selon les proches, n’aurait pas correctement nettoyé la plaie avant de la refermer. Le lendemain, les douleurs s’intensifient et une odeur inquiétante envahit la chambre. Les proches décident rapidement de l’évacuer vers la Tanzanie. Sur place, la nouvelle tombe : la plaie, sévèrement infectée, ne peut être sauvée que par l’amputation de sa jambe gauche.
Abattu mais lucide, Azad accepte cette décision, déterminé à sauver le reste de son corps. Aujourd’hui, il porte une prothèse, mais refuse de se laisser abattre. Hier mardi, accompagné de son avocat, Me Abdoulbastoi Moudjahidi, Azad, rentré le 6 décembre dernier et appuyé sur une canne quadripode, a gravement et difficilement escaladé les escaliers du parquet de Moroni pour déposer une plainte pour « négligence médicale ».
Faillite des obligations
Celle-ci vise l’hôpital El-Maarouf et le médecin traitant en service le soir de son accident. « L'hôpital est accusé d'avoir failli à ses obligations structurelles et fonctionnelles en laissant un praticien opérer dans des conditions non conformes aux règles d'hygiène et de sécurité ; ne mettant en œuvre aucun mécanisme de contrôle ou de signalement de l'erreur médicale ; ne garantissant pas la qualité et la sécurité des soins », précise un communiqué, transmis à la presse.
Me Abdoulbastoi Moudjahidi espère qu’au regard des éléments versés dans le dossier, la justice donnera une suite favorable. « Nous avons relevé plusieurs manquements du médecin, qui selon nous n’a pas pris les dispositions adéquates. Si la meilleure décision avait été prise, cela aurait pu éviter l’amputation de mon client. L’hôpital est cité parce qu’il a manqué à ses obligations en termes d’organisation. Or il est de son devoir de veiller sur ses employés », a déclaré l’avocat, à la sortie du bureau du procureur de la République.
Azad a expliqué avoir introduit cette plainte pour éviter que d’autres patients ne subissent le même sort que lui. Si une plainte est déposée à la gendarmerie, une enquête est menée et les conclusions sont par la suite transmises au procureur. Il appartient à ce dernier de décider de l’ouverture d’une information judiciaire ou du classement du dossier. « Mais on espère que les éléments versés sont suffisants. Avec la détermination d’Azad qui a sollicité notre accompagnement, nous comptons aller jusqu’au bout », a ajouté Abdoulbastoi Moudjahidi qui a rappelé qu’El-Maarouf reste le premier hôpital du pays, où tout le monde peut être admis. " Même ceux qui ont les moyens de partir se soigner à l’étranger ont besoin d’y passer d’abord pour être stabilisés avant de s’envoler vers l’extérieur. Donc, personne n’est à l’abri », a-t-il souligné devant les médias.La plainte déplore surtout une prise en charge défaillante caractérisée par de nombreuses négligences graves dont l’absence de diagnostic rigoureux.

