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Achmet Said Mohamed : Autopsie d’une révolte sans fin

Achmet Said Mohamed : Autopsie d’une révolte sans fin

Société | -   A.S. Kemba

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L’ancien doyen de la Faculté des Sciences et techniques (Fst) cache une colère noire qui se résume par deux évènements majeurs : le vote annulé (au deuxième tour) du président de l’Université des Comores en 2018 et l’élection du 24 mars 2019. Retour sur le nouveau corpus idéologique de cet universitaire respecté mais qui se nourrit de méthodes ambiguës contre le système dont il veut combattre à jamais.

 

Tout a commencé en mai 2018. Jusqu’ici discret, Dr Achmet Said Mohamed décide de se porter candidat à l’élection du président de l’Université des Comores. La communauté universitaire devrait élire le quatrième président de l’institution après Damir Ben Ali, Dr Mohamed Rachad Ibrahim, Dr Said Bourhane. Une fonction prestigieuse. Mais surtout une ascension fulgurante pour Achmet Said Mohamed, lui qui rêvait toujours être au sommet de ses semblables.


Le doyen de la Faculté des Sciences et techniques, arrivé en tête au premier tour de l’élection, était pressenti gagnant. Il avait déjà tissé un vaste réseau au sein du corps enseignant. Ses collègues appréciaient «son franc-parler et surtout son projet pour l’Université» et voulaient le porter à la tête de l’institution. «Il a du sang neuf, ouvert, intègre et intelligent», disaient, à l’époque, des membres de son comité de soutien.


Mais tout bascule après le premier tour de l’élection. Une note signée par Salim Mohamed Abderemane, alors ministre de l’Education nationale, et de l’enseignement supérieur suspend irréversiblement le processus électoral à l’Université. Aucune raison officielle n’a été communiquée à la presse. Mais, selon des sources à prendre avec précaution, Achmet Said Mohamed paierait le prix de « ses liens » avec de groupements suspects basés à l’extérieur.

 

Un destin brisé. Une carrière qui s’estompe brusquement «à cause de la haine des gens», selon ses mots. L’enseignant-chercheur a mal vecu cette decision. Une mise à l’écart transformée en carton rouge contre celui qui a abandonné «une vie de luxe en France» pour apporter sa pierre à l’édifice. L’ancien doyen parlera «d’une injustice» et d’une décision délibérée prise «en violation des textes » de l’Université. L’homme ne s’est jamais relevé de cet épisode jugé «douloureux» par ses amis immédiats. « Il a pris cela comme une volonté de briser sa carrière, c’était dur à avaler, il faisait même des cauchemards », avait indiqué un proche fidèle.

Achmet Said Mohamed, conscient qu’il n’a pas été victime d’une simple note d’un ministre mais de tout un système reste vent debout contre celui-ci et finira par se lancer en politique. Il créera dans la foulée le mouvement Hury avec des amis et se présente à l’élection de mars 2019. L’homme se révoltera encore contre ce qu’il qualifie «d’élections truquées» et «d’une volonté d’en finir avec lui une bonne fois pour toute». Un deuxième évènement qui nourrit encore le sentiment d’injustice et d’atteinte aux droits, comme il le disait régulièrement dans ses déclarations publiques depuis la France où il s’était exilé.


Mais c’est le nouveau corpus idéologique d’Achmet Said Mohamed qui inquiète. L’ancien doyen fait le choix des actions obscures, banalisant la violence jusqu’à ériger celle-ci en mode d’action contre le système. Il fait recours à des méthodes ambiguës, «loin des valeurs qui ont été toujours les siennes », selon un ancien ami. En 2019, il était soupçonné d’actes graves dans le pays dont l’incendie de bâtiments publics. Et d’atteinte à la sûreté de l’Etat, selon le parquet de la République. Ses agissements pourraient-ils conforter la thèse des autorités qui le soupçonnent toujours de liens suspects avec des structures obscures étrangères ?

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