Le délibéré du procès concernant les attouchements sexuels présumés à l’Office de radio et télévision des Comores (Ortc), qui avait été reporté une première fois le 27 juillet dernier, a été rendu hier, jeudi 24 août. Bien que nos confrères n’aient pas écopé de peines de prison ferme, les condamnations qui ont été prononcées les placent tout de même dans une situation difficile.
En effet, le tribunal correctionnel a décidé d’une peine de neuf mois de prison avec sursis, accompagnée d’une amende de 150 000 francs comoriens pour chacun des journalistes. Ces sanctions visent les journalistes poursuivis par le directeur opérationnel de la télévision nationale, Hablani Assoumani, pour diffamation et injures. Les journalistes concernés sont Toufé Maecha, Adjouza Abouheir, Abdallah Mzembaba et Oubeidillahi Mchangama.
La défense prévoit de faire appel
Il est à rappeler qu’après les débats et les plaidoiries tenus le 22 juin dernier, le ministère public avait requis une peine d’un an de prison, dont trois mois fermes. Cette requête incluait également une interdiction d’exercer et une amende de 250 000 francs.
Le tribunal n’a pas suivi ces propositions à la lettre, mais la défense estime que « les peines sont injustifiées », considérant que « les éléments constitutifs de la diffamation ne sont pas présents » dans cette affaire. « La diffamation est une infraction purement matérielle au sein même de la consommation du délit. Ces éléments ne sont pas constitués ; nous l’avons prouvé d’ailleurs et démontré que ceux-ci faisaient défaut. Donc cette condamnation est surprenante. Maintenant les juges ont cru bon de condamner, mais nos clients ont aussi le droit de contester la décision», a déclaré Me Fahmi Said Ibrahim, avocat de la défense. Son confrère, Saïd Mohamed Saïd Hassane, s’est quant à lui interrogé sur la base juridique des sanctions infligées aux quatre journalistes. Il a même rappelé que le code pénal « n’a pas prévu de telles peines».
Faïza Soulé Youssouf, présidente du Syndicat national des journalistes comoriens, a estimé, à son tour, que ce verdict vise, selon elle, à réduire au silence les journalistes, surtout à quelques mois d’une campagne électorale. « Le tribunal de première instance, par son verdict injuste qui ne repose sur rien, vient de porter un coup de massue à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Il a clairement choisi son camp.
Le tribunal correctionnel veut nous faire taire en maintenant cette épée de Damoclès au-dessus de nos têtes. Mais nous refusons de nous laisser faire», a-t-elle promis.De son côté, l’organisation Reporters sans frontières (Rsf) a exprimé des regrets quant à l’absence d’enquête de la part des autorités judiciaires, sept mois après le début de l’affaire.
Il est à noter qu’au cours de l’audience, le plaignant, Hablani Assoumani, avait admis qu’il ne se sentait pas visé par le discours du syndicat. Pour cette raison, le Snjc, dans un communiqué publié après les réquisitions, avait vivement critiqué les peines requises, car aucun nom n’avait été mentionné. Selon nos informations, la défense prévoit de faire appel, considérant que la justice n’a pas été correctement rendue.