L’affaire dite des «mines » a été jugée hier lundi 21 mars par la Cour de sûreté de l’Etat, qui a siégé pour la troisième journée consécutive au palais de justice de Mutsamudu. A l’issue de près de dix heures d’audience, la juridiction d’exception a déclaré Kamaledine Anliane, Nourdine Absoir et Ardine Issouf coupables d’ "association de malfaiteurs et complot", a prononcé contre eux une peine de 20 ans de réclusion criminelle et émis contre eux un mandat d’arrêt. Une quatrième personne absente dans le territoire, Chamsidine Maanfou, écope de 15 ans ; un mandat d’arrêt est également émis à son encontre.
Le célèbre Insa Mohamed alias Bouboucha, qui a été à deux reprises extradé de Madagascar, a pris 8 ans. Naib Kassim, Archimed Dhoubidane, Sayane Malide alias Djaoula et Ambdi Ahmed dit capitaine sont condamnés à 10 ans de prison ferme. Cinq autres accusés ont pris 4 ans, quatre autres ont écopé de 5 ans, tandis deux ont pris seulement 21 mois et bénéficié d’une main levée de leur mandat de dépôt hier même. Ce troisième groupe de condamnés à des peines plus ou moins légères avait pour charges une "détention illégale d’armes" (des Ak47) ou une "non révélation de crimes et délits". Un autre accusé, un militaire, a bénéficié d’un renvoi de son dossier en enquête car n’ayant pas été enquêté ni par la gendarmerie, ni par le juge d’instruction. Il a toutefois été maintenu en détention.
Mine artisanale
Pour rappel, cette affaire avait commencé par l’explosion d’une mine le 18 avril 2020, en milieu de journée, dans la localité de Bandrani à Ndzuani. Ansidi Ahmed Salim, celui qui la transportait, avait été grièvement blessé et admis à l’hôpital. Une enquête de la gendarmerie et de la justice s’en est immédiatement suivie, qui a abouti à la conclusion que cette mine artisanale, fabriquée par un certain Nourdine Absoir, devait être introduit dans l’avion du président Azali Assoumani, qui devait partir de Ndzuani ce jour-là pour Mwali avec sa délégation.
L’enquête a également établi que cet attentat devait être suivi, le lendemain, par une série d’attentats toujours à la mine artisanale, visant notamment des ponts. Tous ces actes, selon l’enquête préliminaire et l’ordonnance du juge d’instruction, confirmée aujourd’hui par la Cour, faisaient partie d’un projet global de "déstabilisation" du régime en place, dont les principaux meneurs sont les personnes jugées par défaut, ainsi que celles précédemment citées ayant écopé de la peine de dix ans de prison.
Il faut toutefois noter qu’au cours de l’audience, plusieurs accusés ont donné une version des faits différente de celle contenue dans leur dossier d’instruction.
Certains, comme Insa Mohamed (accusé d’avoir envoyé des mines à Ndzuani depuis Madagscar), Archimed Dhoubidane et Naib Kassim (tous deux considérés comme des acteurs-clés de ce projet de déstabilisation), rejetant même les accusations portées contre eux. Plusieurs accusés ont également dit avoir "subi des coups et des tortures pendant leur interrogatoire à la gendarmerie", ce qui a conduit un des avocats de la défense à demander qu’un texte puisse enfin leur permettre d’être auprès de leurs clients pendant les interrogatoires, afin d’éviter ce genre de chose.Le même avocat a, après le délibéré, regretté le peu de temps (juste un soir pour chaque affaire) que lui et ses collègues, commis d’office, ont disposé pour étudier les dossiers de leurs clients.