Le sit-in prévu pour contester la décision prise par les chefs de juridiction pour suspendre Me Idrisse Mze Mogne de toute activité professionnelle n’a pas eu lieu. Au moment du rassemblement, un agent des forces de l’ordre est venu mettre les avocats au courant de la décision des chefs de juridiction qui interdit le sit-in au palais de justice. «Vous devrez donc évacuer les lieux», les a-t-il informés. Choqués par cette décision, certains avocats ont voulu tenir tête aux forces de l’ordre pour tenir leur sit-in comme prévu et d’autres étaient décidés à se rendre sur la Place de l’indépendance. Après une courte consultation, la majorité des avocats a fait le choix de marcher jusqu’à la place de l’indépendance et au retour jusqu’au cabinet de Me Youssouf Atiki, siège provisoire du Conseil de l’Ordre.
«Une mesure disciplinaire illégale»
Ayant décidé de faire cette marche pacifique improvisée, le bâtonnier de l’Ordre des avocats, Me Mohamed Abdouloihabi a expliqué à la presse les raisons de ce rassemblement. «C’est pour contester la mesure disciplinaire illégale prise par les chefs de juridiction pour sanctionner notre confrère», a-t-il dit. Cette mesure ne peut pas être prise par les chefs de juridiction, mais plutôt le Conseil de l’Ordre. Aux yeux du barreau, en agissant de la sorte, ces chefs de juridiction ont fait «usurpation de pouvoir». Pour revenir à cette mesure jugée «illégale», le bâtonnier a devant la presse rappelé que les chefs de juridiction ont été informés de l’arrêt de travail qui allait être suivi d’un sit-in si la mesure n’est pas levée et aussi d’autres mouvements qui auront lieu.
Au sujet de ce refus, le bâtonnier a ajouté être consterné par cette décision qui empêche un avocat en tenue professionnelle d’être au palais de justice. «Nous avons prévu de contester pacifiquement, sans déranger le fonctionnement du palais de justice, cependant, cela ne présage rien de bon. Si aujourd’hui, nous ne pouvons pas tenir un sit-in au palais de justice, où allons-nous le faire», fulmine Me Mohamed Abdouloihabi.
Le parquet demande au barreau à saisir les juridictions compétentes
à son tour, Me Fahmi Said Ibrahim renchérit en décrivant une situation inédite. «Cela fait plus de 20 ans que j’exerce cette profession et je n’ai jamais vu une telle situation. Nous avons porté nos toges. Et en principe un avocat vêtu de sa robe est couvert d’immunité. Nous prenons à témoin la population comorienne et les autorités pour qu’elles réalisent la gravité de ce qui se passe. Cela laisse un précédent. Et, nous sommes tous surpris de cette décision».
En route vers la Place de l’indépendance, durant la marche, les avocats chantaient en chœur l’hymne national. Mais un pick-up rempli d’éléments du Peloton d’intervention de la gendarmerie nationale (Pign) se trouvait à quelques mètres des lieux, prêt à intervenir. Les avocats dans leur logique d’effectuer une marche pacifique à la place d’un sit-in comme ils l’auraient voulu ont continué à chanter l’hymne national et ont repris le chemin retour pour atteindre leur lieu de rendez-vous situé à Mangani. A quelques pas de leur lieu de rendez-vous, les éléments du Pign ont formé un cordon pour empêcher les avocats de passer. Pour le haut gradé de la gendarmerie, il ne les laissera passer qu’un à un car il est hors de question qu’ils aient l’air de manifester et oublie qu’ils ont fait une grande partie de leur trajet.
Au terme de cette marche pacifique des avocats, le procureur général, Mohamed Soilihi Djaé a convoqué une conférence de presse en guise de riposte. Devant la presse, le parquetier a invité les avocats à saisir les juridictions compétentes pour faire annuler cette décision qu’ils qualifient «d’illégal». Les sit-in, les passages médiatiques ne sont pas un acte de saisine. Tant que cette décision n’est pas annulée, Me Idrisse Mze Mogne reste suspendu. Cette suspension prise par les chefs de juridiction et martelé par le chef du parquet général est suivie d’une requête qu’il a lui-même introduite afin de demander au conseil de discipline de sanctionner l’avocat incriminé.