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Ahmed Ali Amir : «En acceptant ce nouveau poste, j’ai décidé en âmes et conscience de franchir le pas et de me reconvertir»

Ahmed Ali Amir : «En acceptant ce nouveau poste, j’ai décidé en âmes et conscience de franchir le pas et de me reconvertir»

Société | -   Mohamed Youssouf

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Ayant donné son accord au président de la République pour piloter la coordination de la communication du régime en place, l’ancien directeur général d’Al-watwan, Ahmed Ali Amir, vient de prendre congé de ses fonctions de journaliste et de collaborateur avec plusieurs médias. Cette décision suscite incompréhensions, attentes, tant le défi est immense. Dans cette interview, il revient sur les missions qui seront les siennes, les objectifs qu’il entend atteindre… «Mes motivations sont nombreuses». La première est de continuer à me battre au niveau institutionnel pour protéger ce métier fragile et souvent meurtri qu’est le journalisme dans notre pays. Nous avons été souvent victimes de la censure, des licenciements et autres suspensions, de confiscations de journaux, d’emprisonnements, sous tous les régimes. Nous avons deux journalistes en prison à l’heure qu’il est. Il faut que ça cesse», a-t-il affirmé.

 


Vous allez diriger une coordination qui n’existait pas jusque-là, qu’elles en seront vos principales missions ?




Il a été créé une coordination de la communication et de la presse de la présidence. Il aura, entre autres, tâches, de créer des moyens, des actions, permettant d’assurer la visibilité des actions de la présidence et du gouvernement. La tâche essentielle est de concevoir la stratégie et le plan de communication, de piloter leur mise en œuvre à l’échelle nationale et internationale. Cette coordination devra émettre des propositions sur la presse, pour établir des relations saines mais pour aussi soutenir les entreprises en difficultés et protéger l’exercice de la fonction de journaliste.


A plusieurs reprises et parfois publiquement, le président de l’Union a manifesté sa volonté de vous compter parmi ses collaborateurs. Pourquoi avez-vous accepté aujourd’hui plutôt qu’hier ?


 


C’est la sixième fois que le président de la République formule la demande de me compter parmi ses collaborateurs. Il ne comprenait pas qu’on continue à indexer publiquement les dysfonctionnements de la communication institutionnelle alors que nous refusons d’apporter notre expertise. Vous n’êtes pas sans savoir que depuis six mois, je n’écris plus dans la presse nationale. Mes papiers paraissent uniquement à l’extérieur, sur le site de Reuters et ses abonnés et le New York times mobile. J’estime que je ne peux pas continuer par conséquent à officier en qualité de pigiste et de formateur à Al-watwan et prétendre en même temps exercer la fonction de journaliste. En acceptant ce nouveau poste, ce nouveau challenge, j’ai décidé en âmes et conscience de franchir le pas et de me reconvertir.


Cette nomination suscite incompréhensions et scepticismes pour beaucoup de personnes. Que pouvez-vous répondre à ces personnes sur vos motivations ?


 


J’ai lu les critiques. Je ne tiens rigueur à personne de tirer à boulets rouges. Mes motivations sont nombreuses. La première est de continuer à me battre au niveau institutionnel pour protéger ce métier fragile et souvent meurtri qu’est le journalisme dans notre pays.  Nous avons été souvent victimes de la censure, des licenciements et autres suspensions, de confiscations de journaux, d’emprisonnements, sous tous les régimes. Nous avons deux journalistes en prison à l’heure qu’il est. Il faut que ça cesse. Si le contenu des journaux ne plait pas, il y a des règles de droit de réponses, de travail de communication à faire et non de verser dans la répression, les menaces, les intimidations, entre autres. Comme je l’ai dit haut et fort lors de la célébration du 3 mai, le pays peut atteindre des niveaux d’excellence. Je vais ainsi tenter de proposer des pistes.


Au regard des propos du chef de l’Etat sur sa communication, le défi s’annonce immense pour vous…


 


C’est parce qu’il ya des défis à relever que j’ai accepté de retrousser les manches. Nous devons imaginer une approche nouvelle en communication. Il ne s’agira plus désormais d’asséner des messages, pour espérer susciter l’adhésion de la population. Nous devons faire le choix de communiquer les politiques définies, de prendre les décisions qui concernent les populations en les associant au préalable. Notre communication sera horizontale, pour échanger, écouter en espérant apporter les réponses appropriées aux communautés, aux partis, aux organisations…
Comme je l’ai dit dans mon message adressé aux lecteurs, avec les enjeux de communication moderne, l’avènement du numérique, les bouleversements apportés par les réseaux sociaux, nous devons penser autrement et se réinventer.


En tant que journaliste de formation et de carrière, étant mieux placé pour connaître les difficultés qui accompagnent ce secteur, qu’est-ce que la presse peut attendre de cette nomination ?


 


Je dois dresser des passerelles entre le pouvoir et la presse, établir des discussions franches sur les difficultés économiques qui assaillent la presse, en général, écrite, en particulier. D’où l’idée de tenir des assises nationales de la presse. Nous devons amorcer avec les responsables concernés, un travail d’élaboration de projet pour légiférer et réglementer. La finalité est de protéger la profession, le libre exercice du métier, renforcer le rôle du régulateur et définir une politique claire de subvention de l’État dans le but de soutenir les entreprises des Médias indépendants (presse écrite et radios).


Il faut dire qu’entre la presse et le pouvoir, les relations ne sont pas au beau fixe. La preuve, un boycott inédit avait été organisé contre les évènements organisés par le régime actuel …


 


J’ai observé ce boycott de 15 jours des événements du pouvoir. C’était la réponse appropriée. Quand les journalistes se sentent menacés, ils pratiquent l’autocensure, il n’y a plus de liberté. Je l’ai dit et redit, quand un peuple n’est pas formé et mieux informé, naissent les régimes autoritaires. Notre rôle est de stopper ces dérives.


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