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Ali Karani : «Nous sommes contraints de faire de l’urgence»

Ali Karani : «Nous sommes contraints de faire de l’urgence»

Société | -   Djaaffar Ahamed

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Directeur national du Fonds d’entretien routier (Fer), Ali Karani détaille dans cet entretien l’état d’avancement des chantiers routiers engagés dans les trois îles. Il revient sur les difficultés de financement, l’entretien insuffisant du réseau et le recours fréquent aux entreprises étrangères faute de prestataires locaux capables d’assumer certains travaux.

 

Quels sont les principaux chantiers routiers en cours dans le pays, et à quel stade d’exécution en sont-ils ?


Depuis l’arrivée du président Azali Assoumani au pouvoir en 2016, les trois îles ont constamment connu des travaux routiers. Parmi les chantiers majeurs en cours, on peut citer la route Mtsangadjuu–Dimani–Fumbuni, longue d’environ 17 kilomètres et dont le coût oscille entre neuf et dix milliards de francs. À Ndzuani, les travaux Domoni–Mremani ont été lancés après la signature du contrat à Nyumakele. La route Bahani–Mitsamihuli, qui s’étend sur 47 kilomètres, représente quant à elle un investissement d’environ douze milliards. S’ajoute le chantier Nyumashiwa–Wala, à Mwali.

Parallèlement à ces grands axes, nous intervenons sur plusieurs voiries urbaines : Hahaya–Moroni, Mbwangoma–Fomboni, ainsi que Wani–Mutsamudu–Hombo. Ces travaux consistent en des opérations de réfection et de réparation sur l’ensemble du réseau, incluant les ponts et les ouvrages de protection. Nous avons notamment réparé le pont de Tratrenga et traité les zones fragilisées par l’érosion, comme à Page. À Ngazidja, la route Bonzami–Iconi, longue de trois kilomètres sur un gabarit de 14 mètres, a nécessité une intervention urgente en raison de sa dégradation avancée.

Le secteur routier dépend largement des financements extérieurs. Quels sont aujourd’hui les principaux bailleurs ?


Depuis 2019, aucun financement étranger n’a été alloué directement au Fonds routier. Nos ressources proviennent essentiellement des recettes internes : mines, plaques d’immatriculation, visites techniques, amendes, vignettes et permis dans les trois îles. Une part provient également du budget de l’État, qui prévoit en principe cinq pour cent des investissements consacrés aux grands chantiers. Les taxes sur les hydrocarbures représentent normalement une source majeure de financement. Or, seuls 25 % de ces taxes nous parviennent ; les 75 % restants ne sont plus reversés depuis 2019.

L’un des problèmes récurrents reste l’absence d’entretien régulier après la construction des routes. Quelle stratégie comptez-vous mettre en place pour inverser cette tendance ?


Ma stratégie est celle définie par les textes. Le décret encadrant le Fonds routier fixe clairement les missions et les mécanismes de mobilisation des ressources. Si ces dispositions étaient pleinement respectées, nous serions en mesure d’élaborer une planification pluriannuelle cohérente. Avec seulement 25 % des recettes attendues, nous devons nous limiter aux interventions d’urgence, ce qui empêche toute projection à moyen ou long terme. Dans ces conditions, il est difficile de bâtir une stratégie globale conforme à nos missions.

Pourquoi recourir à des sociétés étrangères pour certains travaux alors qu’il existe des entreprises locales ?


Le problème ne vient pas d’un manque de volonté. Durant six mois, j’ai recherché une entreprise locale capable de réhabiliter la route Bonzami–Iconi. Aucune n’a accepté de s’engager. Lorsque les dégradations se sont aggravées, nous avons dû réévaluer le chantier. Deux entreprises se sont finalement manifestées, dont une seule, la Cgc [entreprise chinoise], disposait des équipements et du matériel nécessaires. J’ai moi-même sollicité plusieurs sociétés nationales pour d’autres travaux, sans succès. Aujourd’hui encore, certains chantiers restent sans preneur local. Lorsque les entreprises comoriennes seront prêtes à traiter, par exemple, les nids-de-poule, je serai le premier à leur confier ces travaux, car le besoin est réel.

 

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