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Banque populaire des Comores (Bpc) I Le salaire d’un client disparait «sans explications»

Banque populaire des Comores (Bpc) I Le salaire d’un client disparait «sans explications»

Société | -   Abdou Moustoifa

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Un agent de l’État a constaté la ponction sur son compte de la somme de 95.634 sans qu’il ne soit averti. Jusqu’ici la banque n’a pas officiellement donné d’explication au client qui a porté l’affaire devant le tribunal commercial de Mutsamudu.

 

Les faits se sont déroulés à l’agence de la Bpc de Mutsamudu. Le mois dernier, Ahmed Zaidou, un employé du journal Al-watwan se rend à l’agence pour récupérer son salaire. Mais une fois sur place, il apprend que «son compte a été débité de la somme de 95. 634 francs comoriens». Cette nouvelle le surprend. Parce que non seulement aucune opération n’a été effectuée par le titulaire du compte, mais aussi ce dernier n’a pas contracté un prêt auprès de cette banque. Les deux hypothèses qui auraient peut-être justifiés des ponctions plus ou moins inhabituelles. La seule activité bancaire effectuée durant la période est «le dépôt, le 13 mai, d’un chèque émis par une radio locale».


En effet, selon l’intéressé, la Radiotélévision de Ndzuani (Rtn), avec laquelle notre collègue collabore, avait bénéficié d’une subvention provenant du Sanduk de Nzduani. Le 16 mai, on informe Zaidou que son chèque ne peut pas être encaissé. Est-ce-la cause de cette ponction ? «Le chèque ne portait pas de nom et j’ai mis le mien. Mais il a été refusé par le Bpc, sans explications. Le Sanduk nous a remis un autre et l’opération est passée», a souligné Ahmed Zaidou, qui s’est aperçu plus tard en consultant son relevé bancaire qu’en fait, les 95. 634 volatilisés sont classés dans la catégorie «commission».

Mise en demeure

Là encore une fois, personne ne donne le moindre détail, du moins officiellement. «Un jour j’ai appris que mon affaire se trouvait devant le conseil de direction sans rien de plus. De mon côté, je me suis tourné vers la justice», explique-t-il. Une mise en demeure a été déposée à la banque le 17 juin. «Entre temps, j’apprends que la banque s’est permise de ponctionner des frais pour le rejet du chèque. Ils appliqueraient un taux de 4.35% du montant global. Et comme par magie, on a vu un tableau expliquant ces nouvelles taxations trois jours seulement après ma mise en demeure», s’étonne Ahmed Zaidou, qui a porté l’affaire devant le Tribunal commercial de Mutsamudu.


L’audience s’est tenue le 2 juillet dernier. Mais la banque populaire a snobé l’assignation. Si le juge s’est déclaré incompétent, le conseiller juridique du requérant, Ibraza Omar, lui, maintient sa position sur le caractère «illégal» de la ponction dont a été victime Zaidou.A noter que le cas de ce dernier n’est d’ailleurs pas isolé. En 2024, un agent de l’État a subi le même désagrément à Mwali. Lorsqu’il s’est rendu à l’agence de Fomboni, le service commercial a tenté d’utiliser son prêt en cours à l’époque, pour justifier la disparition d’une partie de son salaire. Ce n’est qu’après une longue bataille que le Bpc avouera son erreur en reversant la somme dûe.

Loi bancaire violée

Mais là, l’institution se mure dans le silence, et ne s’est pas présentée à l’audience devant le juge des référés, lequel argue que ce litige dépasse ses pouvoirs, limités à l’urgence. «Il évite de trancher un dossier sensible impliquant une banque publique ou influente, car pour moi l’urgence est là, et la banque n’a pas daigné se présenter. Il s’agit là d’un père de famille dont le salaire ponctionné sans base légale ni fondement devait payer des frais médicaux», déplore le conseiller Ahmed Zaidou.


Le directeur de la Bpc au niveau de Ndzuani n’a pas répondu à nos sollicitations. « S’ils veulent invoquer une grille tarifaire, on leur rappelle qu’un usage bancaire ne peut jamais primer sur la loi. L’article 34 de la loi bancaire comorienne impose une information préalable sur toute tarification», relève Ibraza Omar. Cet enseignant et docteur en droit d’économie et de finance, a enfin rappelé que «le juge des référés Ohada est compétent pour prendre des mesures urgentes, même sans jugement sur le fond. Il peut prononcer des astreintes ou des mesures conservatoires dès lors que la créance paraît fondée».

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