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Ce que pensent des femmes de la réforme constitutionnelle

Ce que pensent des femmes de la réforme constitutionnelle

Société | -   Abouhariat Said Abdallah

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Les partisans favorables au projet de révision de la constitution de l’Union des Comores clament haut et fort que la nouvelle loi fondamentale accorde beaucoup d’avantages aux femmes. Nous avons interrogé certaines femmes pour recueillir leur avis.

 


Naila Abbas Thabit, chef d’entreprise



«On peut effectivement noter une avancée sur la question de la parité dans l’article 61 qui prévoit que «le gouvernement est composé de manière à assurer une représentation juste et équitable répartition entre les hommes et les femmes «. Les deux autres articles traitant des droits de la femme (art. 30 et 34) garantissent respectivement les droits de la femme contre toute forme de violence et le droit d’accès aux instances politiques de représentation locale et nationale, ce qui est déjà prévu dans la constitution actuelle. Mais aucune mesure n’a jamais été prise dans ce sens.
Je suis d’autant plus sceptique sur la volonté réelle de promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives, voire électives, lorsqu’on sait que la loi sur la promotion du genre adoptée  le 22 juin 2017, n’a pas encore été promulguée par le président.
On juge sur les actes et non sur les mots. Malgré les textes imposant aux communes de respecter le principe de parité homme-femme dans les listes lors des élections municipales de 2015, seules trois femmes ont été élues maires et la majorité des conseillers municipaux sont des hommes. Cela s’explique par le fait que la majorité des têtes de liste étaient des hommes. Il faut donc aller plus loin dans la législation.
On note toutefois que grâce à cette réforme du code électoral, la part des femmes élues locales a augmenté, soit 30% des conseillers municipaux sont des femmes. Il est vrai qu’il a été difficile de convaincre les femmes d’intégrer les listes municipales, beaucoup hésitent, faute de temps, parfois aussi par manque d‘informations. Pourtant  beaucoup de femmes comoriennes ont parfaitement les compétences pour assumer ces fonctions. Le poids de la société et des traditions constitue également un obstacle majeur de la sphère politique aux Comores.
Il faut des dispositions contraignantes pour les partis politiques, comme imposer dans leurs statuts un nombre de femmes dans les candidatures aux mandats électifs. il faut des mesures incitatives, donner plus de moyens aux organisations de la société civile qui font la sensibilisation, le plaidoyer voire les formations auprès des femmes.»


Maissara Adam, secrétaire générale du ministère de la santé



«Il n’y a rien de particulier dans ce texte pour la femme, on a juste repris dans ce projet, les droits de la femme. Il ya par exemple deux articles, 30 et 38, qui parlent d’elle, et donnent à l’Etat l’obligation des garanties des droits à l’égard de la femme.
Le présent texte permet à la femme de s’épanouir sur le plan politique aussi et lui donne sa place dans la sphère politique. Mais nous le savons tous, le problème de la femme dans notre pays, ce n’est pas une question de texte, le problème est dans la pratique comorienne. Il faut donc un changement de mentalité.
Il est  vrai qu’à l’Assemblée, il n’y a qu’une seule femme élue, mais il faut aussi se demander combien de candidates enregistrées  aux  dernières législatives? Si les femmes se mettent d’accord pour qu’il y ait une candidature féminine, je suis sûre qu’elle  se ferait élire.
La première des choses c’est de travailler d’abord sur le plan social et sensibiliser la femme pour qu’elle soit prête.»

 


Sitti Farouata Mhoudine commissaire au genre


 


«51% de la population comorienne est composées de femmes et le taux de participation des femmes au vote est égal à celui des hommes. La femme prend une part active. Mais, on constate que nous avons une seule femme député sur 33 hommes. Il n’y a aucune femme élue parmi les 51 conseillers des îles et nous comptons seulement 3 femmes maires sur 54, soit 7% des élus. Cette nouvelle constitution va nous servir de plaidoyer selon les articles 30 et 34 pour mieux nous impliquer dans les sphères de décision. C’est une opportunité inédite dans l’histoire des Comores, car pour la première fois, la femme  y est prise en compte. Avec elle, la femme sera beaucoup plus soutenue et pourra s’investir.
Je pense que les femmes commencent à se rendre compte. Elles s’impliquent davantage dans les activités et ont pris une part prépondérante aux Assises Nationales. J’estime que les femmes sont prêtes, mais pour avoir plus de chance d’être élues, il faut qu’elles soient soutenues par leurs partis politiques.»


Hadjira Oumouri, élue de la Nation et auteure de la proposition de la loi sur la promotion du genre



«Pour moi, c’est comme si la loi sur le genre était promulguée. Lors des Assises, je faisais partie du groupe qui travaillait sur la thématique du genre. Le fait que nos doléances soient pris en compte et que la femme soit introduite dans la nouvelle constitution,  est un pas en avant. Le partage des postes doit être fait de manière équitable, or dans l’ancienne constitution, on ne parlait pas de cela.  
Nous ne pouvons pas être négatives. Par contre, il n’est pas mentionné que les partis doivent à tout prix presenter des femmes candidates. Cela est à déplorer. Le problème réside en outre dans l’application de ces textes, le fait que la femme soit evoquée dans la nouvelle constitution est une chose, mais l’application des textes en est une autre. Si j’étais sûre qu’ils  seraient appliqués, j’appellerais les femmes à voter la nouvelle constitution. Mais cela n’engage que moi, Hadjira.»


Propos recueillis par
Abouhariat Saïd Abdallah

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