Inauguré en mai 2014, le Centre de formation technique et professionnelle de Singani ya Hambu a débuté la formation dans l’année académique 2015-2016, avec une première promotion de vingt-quatre élèves dont huit en mécanique et seize en électricité, si on devait se contenter du nombre qui a terminé le cursus. L’objectif principal est selon les dirigeants de l’établissement de faire évoluer l’enseignement professionnel des Comores et résoudre le manque de main d’œuvre constaté dans le pays.
Un objectif qui vise sans doute à fléchir la courbe du chômage qui, ces derniers temps, ne cesse de croître. Cette année, la deuxième promotion qui compte trente-six élèves dont vingt-deux en mécanique et quatorze en électricité effectue sa première année de formation.
Le centre dispense depuis son ouverture trois formations, à savoir, une formation en électricité, une autre en mécanique et une dernière en informatique. Dans cette école, on distingue deux parties, à savoir, celle qui apprend l’électricité et l’autre qui suit la mécanique.
Par contre, les deux classes apprennent l’informatique pour, selon le directeur général de cette école, Assir Ali Mohamed, être en mesure d’utiliser les logiciels et composer tous les schémas techniques souhaités. A part les matières d’enseignement technique, le centre dispense des matières d’enseignement général que sont la physique, l’anglais, le français et les mathématiques. L’école enseigne du lundi au jeudi, de 8h à 12h00 et octroie après deux ans un certificat d’aptitude professionnelle (Cap), l’équivalent du brevet.
Quand on parle de cela, tout le monde penserait que tout marche comme sur des roulettes, que le centre fonctionne à merveille, que les jeunes élèves qui se sont inscrits dans cet établissement apprennent sans difficultés. Loin de là. Mille et une difficultés abondent au sein de l’établissement. Celles-ci sont engendrées par, si on en croit la version des élèves et encadreurs, la négligence de la partie comorienne, notamment le commissariat à l’éducation de Ngazidja qui n’honore pas ses engagements comme le contrat le stipule.
Selon le directeur général adjoint, Mohamed Youssouf Ahamada, le contrat entre le gouvernorat de Khartoum et celui de Ngazidja dispose que la partie soudanaise devait assurer la construction, acheter le matériel de l’école, former les enseignants et assurer deux ans de formation, tandis que la partie comorienne devait assurer les charges de fonctionnement de l’école, à savoir, la fourniture annuelle, l’électrification du site, le recrutement des enseignants comoriens pour accompagner leurs collègues soudanais, le logement de ces derniers, leurs déplacements, entre autres.
Abandon
Niet. Il suffit de se rendre dans le site de Dabiwu, à l’entrée de Singani, où se situe cet établissement, pour constater que la musique sonne fausse note. Les notes et les cordes vont chacun à son sens. On se sentirait dans un champ abandonné où les herbes poussent sauvagement pour empêcher les cultures de pousser.
Aucun inspecteur pédagogique ne s’est jamais rendu sur les lieux pour savoir ce que nous apprenons à ces jeunes, regrettera Mohamed Youssouf Ahamada
avant de poursuivre que les enseignants comoriens de Français, de Physique, d’Anglais et d’informatique qui devaient accompagner les autres enseignants soudanais ont, après un an de service sans rémunération aucune, quitté le navire. De ce fait, actuellement, les élèves n’apprennent pas l’anglais et le français.
Pour la Physique et l’Informatique, Mohamed Youssouf Ahamada et Madjdi Youssouf Mahmoud, l’enseignant soudanais de l’informatique, assurent les cours avec beaucoup de difficultés. Le directeur général de l’établissement tient à mettre en avant le souci de la traduction qui paralyse les cours théoriques.
Les cours théoriques ne se passent pas bien car la communication ne passe pas . Les enseignants comoriens qui devaient faciliter la communication et les explications ne viennent plus. Seuls les cours pratiques enregistrent les résultats escomptés, racontera Assir Ali Mohamed
estimant que si ces enseignants étaient là, l’école allait enregistrer beaucoup de succès voyant les résultats actuels. “La plupart des élèves de la première promotion travaillent dans des garages et ateliers, à l’instar de Ali Saïd de Singani et Nourdine M’madi de Dzahadju ya Hambu”, se réjouit le directeur.
Sans accompagnement des autorités
Autre problème, l’électrification du site. Le centre devait être branché sur un triphasé, ce qui n’est pas le cas. Actuellement, même le monophasé qui était raccordé ne l’est plus.
Pendant les dernières vacances, le branchement a été vandalisé. Le vigile qui est engagé ne fait pas son travail comme il faut, parce qu’il n’a jamais été payé, sept ans durant, a expliqué le directeur général adjoint.
Donc, le centre n’est pas sécurisé et rien n’est en sécurité. Plusieurs infrastructures devaient être déposées à l’extérieur du bâtiment, notamment le groupe électrogène qui allait permettre de ramener l’eau de la citerne aux toilettes, mais faute de sécurité, rien ne peut se faire. “Dans les six toilettes mises en place, nous fonctionnons à la traditionnelle, avec un gobelet et un seau d’eau.”, devait-on détailler remerciant au passage la société Salsabil qui ravitaille en eau potable.
Par ailleurs, le contrat du projet a souligné que les trois premiers de chaque filière devaient poursuivre avec leurs enseignants comoriens leurs formations au Soudan pour assurer la formation dans le centre dans les années à venir.
Non seulement le commissariat à l’Education de Ngazidja n’arrive pas à embaucher et/ou à payer ces enseignants, mais en plus, il n’arrive pas à payer les billets pour les six élèves qui devaient partir cette année pour Khartoum, a informé Mohamed Youssouf Ahamada
qui demande aux autorités de Ngazidja de se pencher pour de vrai sur le fonctionnement de ce centre car, pour lui, la formation technique et professionnelle est très importante pour un pays comme le nôtre.
En tout cas, pour le moment, rien n’avance et le projet d’extension du centre qui concernait la réhabilitation des bâtiments des anciens colons qui se trouvent dans le site dans le but de loger les élèves est tombé à l’eau comme le projet entier qui est en train de couler, lentement mais sûrement, et il le sera entièrement si les autorités ne réagissent pas.