Une équipe du Fonds monétaire international (Fmi) a démarré hier ses consultations formelles avec la partie comorienne au sujet du programme conclu avec le pays, visant à accompagner les Comores à améliorer leur situation macroéconomique, à reformer ses administrations financières et les sociétés à capitaux publics mais aussi à créer les bases d’un environnement propice au financement de l’économie.La première rencontre a eu lieu mercredi 2 octobre au cabinet du secrétaire général du gouvernement entre Nour El Fath Azali et Mme Suchanan Tambunlertchai et son équipe.
Les finances publiques, la stabilité bancaire et la gouvernance financière
La mission d’évaluation entre dans le cadre du plan de soutien aux réformes au titre de la Facilité élargie de crédit (Fec) qui permet à l’institution d’apprécier le niveau d’évolutions du programme et les capacités du pays à satisfaire les repères convenus par la mise en œuvre des réformes recommandées. L’équipe du Fmi va rencontrer toutes les institutions du pays, les administrations, les patrons des sociétés d’Etat et le secteur privé
La satisfaction des mesures arrêtées ouvre la voie à des appuis budgétaires comme ce furent les cas en juin et en décembre 2023 où les Comores ont pu bénéficier respectivement 43 et 4,7 millions de dollars. Un appui budgétaire minimum de «20 millions de dollars» est prévu en décembre 2024 en cas d’atteinte des repères quantitatifs (hausse des recettes et maîtrise des dépenses) et des repères structurels (réformes préconisées pour améliorer la gestion des entités publiques et le secteur bancaire).
Rien n’a filtré d’officiel, hier, à l’issue de la rencontre mais les échanges devraient se limiter sur le cadre général du programme et les réajustements éventuels à opérer pour être en phase avec les ambitions du pays en matière de développement socio-économique. Les Comores et le Fmi ont conclu un programme qui tourne autour de trois axes essentiels : les finances publiques, la stabilité bancaire et la gouvernance financière.
L’équipe du Fmi, à travers ses revues régulières, souhaite accompagner le pays à mieux disposer de ressources financières à la hauteur de ses ambitions. D’une part, pour mieux répondre à sa politique budgétaire et, d’autre part, pour réduire les fragilités du pays par la maîtrise de ses dépenses, la réduction de sa dette intérieure, le renforcement des actifs de l’Etat et l’amélioration de ses réserves à la Banque centrale des Comores (Bcc).
Une amélioration des recettes et une maîtrise des dépenses
Les recettes de l’Etat ont connu une augmentation «de 16,7% en 2023 passant de 82,8 milliards FC à 96,7 milliards FC sur la période», selon le rapport 2023 de la Banque centrale des Comores qui explique que «cette bonne performance est attribuable à la mesure douanière portant sur la généralisation de la taxe sur la consommation (TC), avec 14 produits désormais taxés à 10%, ainsi qu’à la TC à l’importation». L’on apprend aussi la hausse des recettes intérieures de 9,6% et les appuis budgétaires (+31,9%) et que cette embellie des recettes publiques s’explique en grande partie de la hausse des ressources fiscales qui «ont atteint 49,6 milliards FC après 44,4 milliards FC en 2022, soit un accroissement de 11,9% équivalent à 101% du niveau prévu par la loi de finances rectificative».
Les dépenses publiques, elles, ont connu une hausse de «12,3% en 2023», passant de « 93,4 milliards FC en 2022 à 104,8 milliards de francs en 2023 » en raison « de la progression de 66,2% des dépenses d’investissement », selon toujours la Bcc. Quant à la Position nette du gouvernement (Png), elle « s’est fortement détériorée de 7,4 milliards FC durant 2023», passant «de -1,6 milliard FC au 31 décembre 2022 milliards FC à -9 milliards FC au 31 décembre 2023 ».
Au sujet de la stabilité bancaire, le programme prévoit de nombreuses mesures visant, en gros, à renforcer les trois principales institutions financières et bancaires aux mains de l’Etat : la Bdc, la Bfc et la Banque postale des Comores (Bpc) avec l’idée «d’assurer les équilibres financiers », d’engager un plan de recapitalisation ou retrouver des repreneurs capables de mettre de l’argent pour mieux soutenir les ménages et les autres agents économiques.
Accompagner le secteur privé
Le gouvernement et le Fmi veulent explorer les conditions du financement de l’économie en permettant aux établissements de disposer de moyens pour accompagner le secteur privé national. Les crédits à l’économie ont augmenté de «3,7% en 20223 », passant de « 124,9 milliards FC à fin décembre 2023 contre 120,5 milliards FC un an avant », selon la Bcc qui nous apprend que « la hausse du financement du secteur privé avec un encours passant de 101,7 milliards FC à 111 milliards FC, soit + 9,1%».
Mais une telle tendance n’est pas de nature à favoriser des plans d’investissements ambitieux et à la hauteur de la vision du pays. Les deux parties explorent d’autres outils pour appuyer le secteur privé comme la Finance islamique, les assurances garanties par des partenaires, le crédit-bail ou encore les fonds de garantie, lesquels pourraient aider les opérateurs économiques à mieux développer des activités pour créer de la richesse et des emplois.
L’exploration de nouvelles niches fiscales
L’autre volet au cœur du programme conclu avec le Fmi : la gouvernance des sociétés à capitaux publics dont les finances sont presque dans le rouge. Onicor, Sonelec, Sonede, Comores Télécoms, Société comorienne des ports (Scp), Société comorienne des hydrocarbures (Sch), la gouvernance est à revoir pour améliorer leurs performances. La baisse des capacités contributives des entreprises publiques complique l’Etat à mieux réorienter sa politique budgétaire. Les dettes s’accumulent et les contreperformances s’enchaînent.
La partie comorienne a pu engager de nombreuses réformes structurelles pour répondre aux objectifs fixés par le Fmi. L’on citera la mise en place de la commission nationale de la concurrence, les réformes de la Direction générale des impôts (Dgi), le mécanisme de mobilisation des recettes via le Cut (Compte unique du Trésor), la réforme des marchés publics, l’adoption d’une loi sur la gouvernance des sociétés d’Etat ou encore la libéralisation du riz ordinaire, entre autres.
L’équipe du Fmi entend apporter son expertise en vue de la continuité des réformes en profondeur pour mieux renforcer la politique de mobilisation des ressources publiques par l’exploration de nouvelles niches fiscales et la généralisation de la Taxe sur la consommation (Tc), la redynamisation des établissements bancaires de l’Etat, la hausse des capacités financières des sociétés d’Etat et le soutien au secteur privé. D’autres volets comme l’analyse du niveau de la dette extérieure et son plan de soutenabilité sont à l’ordre du jour de la mission de l’équipe du Fmi qui prendra fin dans 15 jours.
«La partie comorienne a pu engager de nombreuses réformes structurelles pour répondre aux objectifs fixés par le Fmi. L’on citera la mise en place de la commission nationale de la concurrence, les réformes de la Direction générale des impôts (Dgi), le mécanisme de mobilisation des recettes via le Cut (Compte unique du Tresor), la réforme des marchés publics, l’adoption d’une loi sur la gouvernance des sociétés d’Etat ou encore la libéralisation du riz ordinaire, entre autres.» |