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Convention de jumelage entre Mamoudzou et Mutsamudu I Un citoyen saisit le juge constitutionnel

Convention de jumelage entre Mamoudzou et Mutsamudu I Un citoyen saisit le juge constitutionnel

Société | -   Abdou Moustoifa

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Certains juristes estiment que la signature d’une telle convention constitue “une violation de la constitution laquelle ne reconnait qu’une seule Union des Comores composée de 4 îles dont Mayotte”.

 

Un citoyen en la personne d’Ahmed-Hachim Said Hassane a saisi, le 25 juillet, le juge constitutionnel pour se prononcer sur un avis de constitutionnalité sur les accords liant les villes comoriennes de Mutsamudu et Mamudzu, d’une part, Tsidjé et Mamudzu, d’autre part.La saisine intervient ainsi plus de quatre jours après la signature des accords de jumelage, entre la commune de Mamoudzou à Mayotte et celles des villes citées. L’accord le plus récent est celui qui a été signé le 22 juillet dernier à Ndzuani en présence du maire de la capitale de Mayotte, Ambdiwahedou Soumaila et de son homologue de Mutsamudu, Bouchrane Zarouki. Les domaines de coopération retenus vont de la culture, à l’implantation des entreprises mais pas seulement. Problème, certains estiment que “ces accords de jumelage sont inconstitutionnels”.

“Une violation de la constitution”

Dans son courrier de 4 pages, le requérant rappelle que les Comores sont composées de 4 îles, à savoir Ngazidja, Ndzuani, Mwali et Maoré. “ Or le représentant de la commune de Mamoudzou, signataire de cet accord est en conséquence un élu français, régi par les lois de la République française de ce territoire revendiqué par l’Union des Comores. Tout comme le village de Tsidjé que la ville de Mutsamudu sont des territoires communaux régis par les lois comoriennes”, a introduit dans un premier temps, l’auteur du courrier.


Ahmed-Hachim Said Hassane estime qu’une telle signature constitue “une violation de l’article 6 de la loi fondamentale de 2018 dans la mesure où la ratification desdites conventions est assimilable à une reconnaissance de fait de la francité de l’île comorienne de Mayotte”. Il demande à la présidente de la section constitutionnelle de se prononcer sur la constitutionnalité de ces conventions. Interrogé sur le sujet, le docteur en droit public, Mohamed Rarfsandjani a d’abord souligné que de manière générale, un accord de jumelage entre villes comoriennes serait légal car prévu et autorisé par la loi sur la décentralisation.


Celle-ci, donne la possibilité aux communes de nouer des coopérations intercommunales quelles que soient les formes. En revanche, estime-t-il, les conventions signées entre Mamoudzou et Mutsamudu sont un peu particulières car elles sont en contradiction avec la constitution. “Ces accords divergent de l’exigence constitutionnelle qui fait du retour de Mayotte une priorité nationale mentionnée même dans le préambule de la constitution de 2018 en ce sens qu’ils peuvent être perçus comme des accords ratifiés avec une ville française et non comorienne”, a avancé ce constitutionnaliste si bien que les Comores, se fondant sur le droit international, ne reconnaissent pas Mayotte comme un territoire français.


A l’entendre, le seul moyen de rendre ces accords conformes à la constitution est de viser l’article 68 de la loi sur décentralisation du 7 avril 2011. “Cela nous permettrait de retourner davantage la situation à notre avantage en considérant Mamoudzou au même titre que Tsidjé et Mutsamudu comme des villes comoriennes”, a détaillé le récipiendaire du prix Guy-Carcassonne 2019.

Cour suprême habilitée ?

Toujours est-il que “ces conventions sont dépourvues de toute base légale pour avoir été entérinées sans l’aval du conseil municipal”, selon le constitutionnaliste. Sur cette seule base, les accords en question auraient pu être attaqués devant le tribunal administratif, a fait remarquer Mohamed Rafsandjani. Mais au-delà de cet aspect-là, se pose par ailleurs une autre question juridique. La section constitutionnelle est-elle habilitée à statuer sur la requête d’Ahmed-Hachim Said ? La réponse est non estime un juriste de la place.


“La section constitutionnelle se prononce sur la constitutionnalité des lois, les engagements internationaux, les questions de priorité constitutionnelle, la conformité du règlement de l’Assemblée à la constitution et enfin elle garantit les droits fondamentaux.En dehors de ce champ de compétences, on ne peut la saisir”, croit savoir ce deuxième juriste qui a requis l’anonymat. Le bémol, a relevé Rafsandjani, en lisant la constitution et toutes les ordonnances organiques de la Cour suprême, la procédure relative à l’avis n’a pas été expliquée. “ Seul le contrôle de constitutionnalité a été mentionné.On sait seulement que la cour suprême peut être saisie pour avis. Comment on la saisit ? Qui peut le faire ? Sous quel délai. Rien n’a été prévu”, déplore le constitutionnaliste qui estime encore “que seule la haute Cour est habilitée à donner un avis sur la requête de Hachim”.

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