Réunis en Amazonie, symbole mondial de résilience écologique, les dirigeants de la planète ont assisté hier mardi à l’intervention remarquée du ministre comorien de l’Environnement. Au nom de l’Union des Comores, Abubakar Ben Mahamoud a tout d’abord exprimé la gratitude envers le président brésilien Lula Da Silva pour «l’accueil chaleureux» et «l’organisation exemplaire» de cette Cop qualifiée d’«historique».
Le ministre a rappelé la gravité de la situation : le réchauffement climatique atteint désormais 1,2 °C, et le monde se dirige vers +2,7°C d’ici 2100 en l’absence de changement radical. Selon lui, «chaque dixième de degré supplémentaire aggrave les risques», citant notamment la disparition possible de 99 % des récifs coralliens à +2 °C, ou encore le déplacement forcé de plus d’un milliard de personnes d’ici 2050. Les pays en développement, malgré leur faible contribution aux émissions mondiales, subissent les impacts les plus lourds, à savoir «des pertes économiques pouvant dépasser 500 milliards de dollars par an dès 2030».
Les Comores en première ligne
Etat insulaire particulièrement vulnérable, l’Union des Comores vit déjà les effets du dérèglement climatique. Plus de 60% de la population vit sur le littoral, et est menacé directement par la montée des eaux. L’érosion côtière fragilise les terres, tandis que les cyclones gagnent en intensité. Le ministre a rappelé le traumatisme du cyclone Kenneth en 2019. «345 000 personnes affectées et des dégâts estimés à 185 millions de dollars, soit 16% du Pib national», a-t-il mentionné.
Face à cette urgence, Abubakar Ben Mahamoud a plaidé pour une reconnaissance officielle et opérationnelle des circonstances particulières des petits Etats insulaires en développement (Peid). Ce principe, a-t-il insisté, doit être intégré dans les procédures, les financements et les mécanismes de décision, afin de garantir une participation équitable des pays les plus vulnérables.
Le ministre a estimé que le Global Stocktake (Bilan mondiale) doit marquer un changement de cap. Les contributions nationales actuelles ne couvrent que 30 % des réductions nécessaires pour maintenir l’objectif de 1,5 °C. Il a ainsi proposé trois objectifs structurants pour restaurer la crédibilité de l’action climatique, à savoir «mettre fin à la déforestation d’ici 2030, tripler les capacités en énergies renouvelables d’ici 2035 et doubler le financement de l’adaptation avant 2030».
Il a déclaré que les engagements financiers pris lors de la Cop29 doivent être concrétisés, notamment «les 300 milliards de dollars par an promis» qui représentent une étape indispensable. Le ministre a cité les besoins réels qui sont bien supérieurs. «Plus de 1 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 pour les pays en développement», ont été évoqués. Actuellement, selon le ministre comorien de l’Environnement, seuls 10% des financements d’adaptation atteignent les pays les plus vulnérables. Abubakar Ben Mahamoud a demandé des mécanismes d’accès simplifiés, des critères d’éligibilité adaptés et des financements non générateurs de dette.
Le ministre a par ailleurs souligné l’importance vitale des écosystèmes naturels. «L’Amazonie stocke 150 milliards de tonnes de carbone, tandis que les mangroves comoriennes en séquestrent quatre fois plus par hectare que les forêts tropicales. Les populations locales et autochtones, gardiennes de ces écosystèmes, doivent être pleinement impliquées», a-t-il affirmé.Abubakar Ben Mahamoud a insisté sur la nécessité d’investir dans la jeunesse, la science et l’innovation. «Aujourd’hui, seulement 2% de la finance climatique mondiale est consacrée à l’éducation et à la formation, alors que 60% de la population africaine a moins de 25 ans. Un potentiel immense pour une transition juste et durable», a-t-il conclu.
