logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

Cotisation des enseignants à la Caisse de retraite I Des dizaines de victimes d’un système jugé «défaillant»

Cotisation des enseignants à la Caisse de retraite I Des dizaines de victimes d’un système jugé «défaillant»

Société | -   Abdallah Mzembaba

image article une
Les enseignants partis à la retraite remuent ciel et terre pour espérer bénéficier des pensions proportionnelles à leurs années de services. Mais le déficit causé par le non-versement des charges patronales (l’Etat en l’occurrence) ne permet pas à la Caisse de retraites des Comores (Crc) de verser la pension mensuelle espérée. Celle-ci les pousse à «chercher de l’argent ailleurs» pour combler le gap alors qu’un autre souci résume, selon un syndicaliste, le fond du problème : le gel des carrières des enseignants à l’origine des salaires dérisoires et un blocage de l’indexation de l’indice de rémunération. Les techniciens appellent à un dialogue social pour mettre fin au statu quo actuel.

 

A l’heure de la retraite, deux choses peuvent arriver : «soit une nouvelle vie commence, soit une vie se termine». Pour les enseignants comoriens, du moins la majorité d’entre eux, c’est plutôt la deuxième option qui les attend faute d’avancements. Certains, sont obligés de combler un gap pour espérer toucher une meilleure pension, affirme-t-on du côté de la Caisse de retraites des Comores (Crc). Seulement, cette situation, plutôt inédite pour des retraités, n’est pas du pain béni pour ces enseignants qui, pour la plupart, gagnaient un salaire dérisoire tout au long de leurs carrières.  

Voilà qu’on leur demande encore d’aller «chercher de l’argent ailleurs pour aspirer à des jours heureux, et encore, et ce, au crépuscule de leurs vies». À la Fonction publique, si notre rendez-vous avec le directeur général, Omar Chehani, n’a pas pu avoir lieu, une source anonyme parle, elle, d’une «supercherie» et de «malhonnêteté». Elle s’explique : «pourquoi ne pas les payer leur pension sur la base de ce qu’ils ont cotisé au lieu de leur vendre du rêve et de les pousser à s’endetter ? C’est juste malhonnête. Ce que fait la caisse, c’est comme si l’État demandait aux fonctionnaires d’aller chercher de l’argent et de le lui remettre pour qu’il leur paie au retour».

La part patronale ces compensations

De son côté, Chabane Mohamed de l’Intersyndicale des agents de l’Education affirme pour sa part que «la Caisse de Retraites des Comores demande presque systématiquement aux personnes nouvellement admises à la retraite de mobiliser des sommes parfois très importantes, en guise de compensation des indices non cotisés, et ce, à cause du dégel de notre carrière depuis 1994». Une affirmation que partage la directrice générale de la Caisse de retraite des Comores, Fatima Mouigni, pour qui cette situation est due aux problèmes d’avancements et d’évolution des carrières.


La Caisse de retraites et l’Intersyndicale se rejoignent là-dessus puisque Chabane Mohamed tout en dédouanant la caisse sur ce point reconnait que cela n’est pas normal. C’est à l’État de combler ces trous dans nos cotisations, car la cause, c’est le blocage de la systématicité de nos avancements. Ce que nous revendiquons à ce sujet, c’est le versement par l’État de la part patronale de ces compensations. On demande au retraité des compensations alors qu’il n’est pas responsable des trous creusés dans ses cotisations». Et, effectivement, «il y a un gel des avancements et des valeurs indiciaires depuis la présidence de Saïd Mohamed Djohar. Ce n’est pas donc pas notre faute. Une série d’évènements peut influer, surtout qu’on ne gère pas les agents de l’État, c’est la Fop et le budget». Et justement sur ce sujet, notre source à la Fop rappelle que la Caisse de retraites «n’a pas pour mission de gérer des carrières, mais de payer des gens sur la base de ce qu’ils ont cotisé. Ni plus ni moins.


Au lieu de ça, la caisse utilise la sensibilité des agents en les incitants à payer de l’argent qu’ils n’en ont pas. Elle devrait uniquement traduire l’effet pécuniaire et non administratif. Aussi, à défaut d’interpeller l’employeur, la caisse préfère discuter directement avec les affiliés. Je suis ici depuis plusieurs années, et je vous assure que la Caisse n’a jamais officiellement saisi la Fop sur ce sujet. Il arrive que ce soit glissé lors d’une rencontre fortuite, mais cela n’a jamais été d’une manière officielle».

La conséquence du non-respect des avancements

Du côté de la Caisse, on concède en effet que pour ce qui est des indices, il faut s’adresser à la Fop. Et pour ce qui est des cotisations, se rapprocher de la Trésorerie publique. En revanche, on déclare qu’«accuser la caisse, c’est voir les conséquences au lieu des causes». Chabane Mohamed, le syndicaliste, estime, par conséquent, que le fait d’amener le prochain retraité à un plafonnement indiciaire six mois avant son départ à la retraite ne règle pas le problème des compensations demandées par la Caisse. Et, effectivement, ce plafonnement à quelques mois de la retraite est la conséquence du non-respect des avancements.


Malgré ces divergences entre les trois parties, elles sont toutes d’accord sur la nécessité d’avoir une table-ronde autour de ce sujet. Fatima Mouigni, affirme en effet qu’il faut qu’il y ait un dialogue social pour éviter ce genre de situation. Du côté de la Fop, on explique que la Caisse devrait appeler les employés actifs. «On pourrait le faire ensemble et les sensibiliser sur la retraite, parce que ce n’est pas au retraité de poser ce problème, d’autant que c’est un problème qui est mal posé. Le débat, c’est la gestion des carrières. Mais cela n’est pas lié au fait de demander à un agent d’aller chercher de l’argent pour avoir une pension».


Aussi, «nous sommes en fait heurtés à un problème de gestion de ressources humaines à tous les niveaux plutôt qu’à une question de finances et d’argent. Cela augmente l’anarchie et le paiement des agents fictifs même si un travail est actuellement réalisé contre ce fléau». En attendant, le syndicat à travers Chabane Mohamed est formel, «nous avons toujours demandé une réunion tripartite (gouvernement, caisse de retraites et syndicats) pour réfléchir à cette problématique puis trouver une solution juste, mais notre requête est toujours restée sans suite».

 

 

‘’Chabane Mohamed de l’Intersyndicale des agents de l’Education affirme pour sa part que «la Caisse des Retraites des Comores demande presque systématiquement aux personnes nouvellement admises à la retraite de mobiliser des sommes parfois très importantes, en guise de compensation des indices non cotisés, et ce, à cause du dégel de notre carrière depuis 1994». Une affirmation que partage la directrice générale de la Caisse de retraite des Comores, Fatima Mouigni, pour qui cette situation est due aux problèmes d’avancement et d’évolution de carrière’’.

Commentaires