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Crash du Cessna d’Ab Aviation I Un membre de la famille des victimes se pose des questions

Crash du Cessna d’Ab Aviation I Un membre de la famille des victimes se pose des questions

Société | -   Faïza Soulé Youssouf

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Un mois après ce crash, je me pose beaucoup de questions. A supposer que l’avion ne devait pas être exploité parce qu’il présentait un danger, ne devrait-on pas chercher aussi du côté de ceux qui lui ont malgré tout octroyé l’autorisation de voler ?



« Je suis un peu inquiet. A dire vrai, je m’interroge. Près d’un mois après le terrible crash qui a coûté la vie à mon frère et à 13 autres passagers, je me pose beaucoup de questions. Maintenant, il est des évidences, est-il besoin de les souligner. Dans pareilles circonstances, la responsabilité de la compagnie aérienne est toujours engagée et tout indique que ce sera le cas aussi pour cette fois. Il ne devrait même pas y avoir de débat là-dessus. Moi mon inquiétude réside dans le fait que les autorités veulent tout mettre sur le dos de la seule compagnie aérienne. Ab Aviation est responsable mais assurément, elle ne peut pas payer seule. Il y a eu des défaillances certaines du côté de cette société privée mais elles ne doivent pas occulter celles de notre administration. J’ai perdu mon petit frère, il ne reviendra plus. Aucune indemnité ne le fera revenir, fut-elle de 1million d’euros. En revanche, pour l’avenir, il est impératif que toutes les responsabilités soient dégagées. Si nous ne tirons pas les enseignements de ce tragique accident, demain il y en aura encore et s’il arrivait, nous verrons mourir nos proches à quelques kilomètres de nos côtes. Dois-je rappeler que ce sont nos autorités qui empruntent le plus souvent ces appareils pour rallier toutes les îles de l’archipel.  Le commun des comoriens n’est pas concerné parce que les prix des billets sont hors de leur portée.

Un mois après ce crash, je me pose beaucoup de questions. A supposer que l’avion ne devait pas être exploité parce qu’il présentait un danger, ne devrait-on pas chercher aussi du côté de ceux qui lui ont malgré tout octroyé l’autorisation de voler ? Il y a des questions que je me pose. L’heure à laquelle l’avion a perdu le signal ? Qu’est ce qui doit être fait dans ces circonstances ? Qu’est ce qui a été effectivement fait pour secourir les victimes, retrouver le fuselage le plus rapidement possible ? Les premières interventions dans la zone d’impact ont eu lieu à quel moment exactement ? Pourquoi à ce moment-là et pas un autre ? Ces questions-là, il faut bien que quelqu’un me réponde.

Je me pose beaucoup de questions sur les conditions météorologiques de ce 26 février. Aurait-on dû laisser l’avion décoller ? Pourquoi a-t-il décollé avec du retard ? La veille, soit le 25 février, l’on m’a dit que le même appareil a passé plus d’une heure pour rallier Moroni au départ de Ouani. N’était-ce pas un élément à prendre en compte ?

Quid de la piste d’atterrissage de l’aéroport de Bandar-Salam ? Une piste d’atterrissage à vue, me dit-on. Mais comment fait-on quand la visibilité est réduite ? Les pilotes à l’évidence ne voyaient rien, à la commission d’enquête de le confirmer ou de l’infirmer. L’on m’indique que la procédure quand la visibilité est réduite est de revenir sur ses pas, dans le cas d’espèce, c’aurait été de revenir sur Moroni. Nous sommes obligés de reconnaitre que les malheureux pilotes n’ont pas pu. Quel rôle a joué ou aurait dû jouer la Tour de Contrôle de l’aéroport de Bandar-Salam ?

 

Je me pose beaucoup de questions sur la sécurité des aéroports de Ndzuani et de Mwali ? N’est-il pas temps qu’ils soient pourvus d’instruments de navigation quand la visibilité est problématique ? Ils coûtent chers me répond-on ? Plus chers que quoi ? Que qui ? Nos vies ?

Il est peut-être temps que nous tous nous nous posons ces questions. Nos pouvoirs publics n’ont découvert aucun corps malgré tous les moyens à leur disposition alors que tout indique que la zone d’impact n’est pas située très loin de l’aéroport de Bandar Salam. Celui qui a été repêché le 03 mars par des pêcheurs de poulpe n’a toujours pas été identifié. On ne sait toujours pas de qui il s’agit. Cela fait plusieurs semaines que les recherches ont cessé. Pour la reprise de l’enquête et l’identification des corps, on attend le Bureau d’Enquête et d’Analyses (français) qui se fait attendre. Il a peut-être des interventions plus urgentes à mener en terre française. Des plongeurs étaient pourtant prêts à continuer. On leur a demandé de mettre les voiles parce que le Bea arrive alors que depuis il n’arrive pas. Doit-on attendre des français qu’ils retrouvent mon Comorien de frère ?

Et même si la mer le recrachait lui, nos enfants, nos autres frères, nos mères, nos sœurs, où les conserverions-nous le temps d’effectuer les formalités ? Nous n’avons pas de morgue.

Il faut que ce qui est arrivé à mon frère ce 26 février nous serve de leçon pour l’avenir. Nous ne pouvons plus continuer à l’insulter cet avenir, en n’apprenant pas de nos erreurs. Nous n’avons rien appris de l’accident de la Yemenia, ni du rapport publié suite au crash. Apprenons enfin de nos erreurs. Ce n’est qu’en empruntant cette voie-là qu’un Etat le devient ».


Propos recueillis par Faïza Soulé Youssouf 

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