Dans une conférence de presse ayant eu lieu hier 4 novembre, le directeur de cabinet et le secrétaire général du ministère de la Sécurité civile, respectivement Abdoulfatah Boina et Tadjidine Ben Ahmed ont appelé les grévistes, qui ont fait le choix de partir tant que leur supérieur hiérarchique ne se démettra pas de ses fonctions, à reprendre le chemin du travail.

Ce geste d’apaisement est à applaudir. Il est probable que le ministère de tutelle, ou en tout cas certains de ses membres ont senti quelque part qu’ils devaient entendre et écouter les appels au secours de ces paramilitaires.

De multiples sacrifices

Parce que ne nous méprenons pas, les sorties médiatiques des pompiers, de ces derniers jours ne sont rien d’autre que des appels au secours. Et pour cause : les offres d’emploi aux Comores sont tellement rares que quand on en trouve un, on essaie de toutes ses forces, par tous les moyens, au prix de multiples sacrifices de le garder.

Que plusieurs soldats du feu, dont certains ont fait des pieds et des mains pour être recrutés à la Dgsc, se soient dit prêts à se retrouver sans emploi plutôt que de retourner sous le commandement de leur supérieur hiérarchiqué, en dit long sur l’atmosphère pesant qui prévaut sur leur lieu de travail.

Le climat délétère, anxiogène voire toxique

Et c’est ce qui doit nous interpeler aujourd’hui. En l’espèce, nous sommes bien obligés d’admettre qu’ils n’ont eu d’autre choix que de mener un mouvement de grève après les injures publiques proférées par le Colonel qui dirige la maison.

Elles ont été l’occasion pour eux de faire connaitre à l’opinion et aux pouvoirs publics le climat délétère, anxiogène voire toxique qui règne à la Dgsc En off, ils admettent que les bâtiments ont été réhabilités, que le trottoir bordant la maison a été refait à neuf, que le cadre y est plus agréable, et que les moyens d’intervention se sont améliorés. 

Mais en off également, ils regrettent amèrement que « toutes ces bonnes choses ne soient pas suivies d’un meilleur management ». « Franchement, tout ce qu’on lui reproche, c’est qu’il nous insulte collectivement dès lors que quelque chose le contrarie », a soupiré un pompier. Maintenant, il ne s’agit pas de lui jeter la pierre. Il ne faut pas non plus qu’il se méprenne sur les intentions de ceux et celles qui tenteront de lui faire entendre raison. Il s’agit plutôt de rectifier le tir.

Une grande précarité

Qu’une médiation soit menée par l’inspection du travail afin de faire en sorte que le climat aujourd’hui si délétère pour ces hommes et ces femmes qui prennent des risques énormes pour sauver des Comoriens, ces hommes et ces femmes qui sont pour la plupart dans une grande précarité, qui ne sont toujours pas dotés de statut, soit le meilleur possible. Jusqu’ici, ce sont les ministères de la Sécurité civile et de la Défense qui s’y sont attelés.

Pourtant, la loi est limpide. Article 239 du code du travail : «tout différend collectif doit être immédiatement notifié par les parties à l’Inspection du Travail et des lois sociales du ressort». Le Colonel Tachfine Ahmed veut, semble-t-il, en tout cas selon une interview accordée à Al-watwan en juin 2020, réaliser de grandes et belles choses à la Dgsc, et c’est tout à son honneur. Il se sent investi d’une mission. Encore faudrait-il qu’il comprenne que rien de beau, que rien de grand ne se réalisera sans les sapeurs-pompiers qui sont la raison d’être même de la maison qu’il dirige.

Ils doivent pour cela, se sentir accompagnés, soutenus, aimés. Ces sapeurs-pompiers qui sont prêts à risquer leur vie pour sauver celle de leurs concitoyens, ont besoin, (peut-être même plus que du statut du personnel qui leur fait défaut et qu’ils appellent tous de leurs vœux) de pouvoir garder en tout temps et en tout lieu l’entièreté de leur dignité.