C’est devenu le principal calvaire de la plupart des jeunes comoriennes qui se rendent en France pour poursuivre les études supérieures. Sur place, de nombreuses étudiantes doivent faire face à un problème auquel elles ne s’attendaient pas : les mariages forcés. Alors qu’elles ont accepté de les aider dans toutes les démarches en leur promettant un bel avenir, les familles d’accueil, changent tout d’un coup de discours. Une jeune étudiante d’origine comorienne qui a subi les foudres de sa famille d’accueil pour avoir refusé d’abandonner ses études pour se marier.
En 2019, Mbahuwa décroche une inscription pour aller faire une licence dans une université implantée à Paris. En plus du visa, elle devait trouver un appartement dans la capitale française. C’est à ce moment-là que son oncle maternel intervient et se porte volontiers pour l’accueillir chez lui. Pour lui, il était inacceptable que la fille de sa propre sœur se débrouille à Paris pour trouver un endroit où loger alors qu’il y réside.
Après insistance, la famille accepte de lui confier la jeune étudiante. Au bout de 4 mois, tout se passe bien jusqu’au jour où Mbahuwa tombe malade. C’est le début de l’enfer. «J’ai passé un mois entre l’hôpital et la maison. Une période qui correspondait à mes partiels du 1er semestre. Subitement, mon oncle a commencé à me parler mal sans raison. Un jour, j’ai décidé d’aller à la fac pour ne pas tout rater. Mais je n’ai pas pu tenir. Je suis donc retourné. Pour mon oncle ce n’était que des mensonges. J’étais allée voir mon petit ami. Ce qui n’est pas vrai. Trois jours plus tard, je me suis même évanouie à la maison. Mais, malgré ces souffrances mon oncle continuait à me crier dessus en me traitant d’idiote”, se remémore encore la jeune étudiante qui jusqu’à présent ne comprends pas l’origine de cette haine.
De la nourriture cachée
Après cette maladie, Mbahuwa a repris le chemin de la fac, mais était loin d’être tirée d’affaires. Cette fois, elle était obligée de se débrouiller pour manger puisque la femme de son oncle cachait les provisions. «Ils ne donnaient à manger qu’à leurs enfants. Quand je rentais le soir vers 22h, je ne trouvais rien à manger. Mais plutôt de la vaisselle à faire. Je dormais donc le ventre vide. Un soir, j’avais demandé à un ami de me payer un Uber. Une fois le livreur parti, mon oncle a repris les insultes. Comme quoi je mangeais de la nourriture qu’il ne payait pas», a-t-elle raconté. Entre petit boulot et aide d’une cousine qui venait à sa rescousse en lui octroyant des tickets de restaurant et de l’argent de temps à temps, Notre interlocuteur essayait de joindre les deux bouts.
L’oncle n’a payé qu’un mois de ticket de transport depuis sa souscription. Puis, il a commencé à parler de mariage. Le seul moyen, selon lui, de s’assurer que sa nièce soit sous la responsabilité de quelqu’un d’autre. C’était pour le tonton, une porte de sortie que sa nièce refusait. «Il m’a interdit de sortir même pour aller à la bibliothèque le wee-kend. Pour lui, je ne valais rien. Un soir une fois rentrée, il m’intimait de ne plus jamais utiliser son adresse et que je devais chercher une autre». Deux mois après ses problèmes de santé, Mbahuwa reçoit les factures de l’hôpital chez son oncle qui lui balançait la même phrase. «Tu n’as pas compris que je t’ai viré de chez moi et tu te permets d’utiliser mon adresse».
Tentative de viol
Confuse et perdue elle a laissé un message à son oncle lui invitant de discuter. Elle récoltera trois semaines de silence. Personne ne lui adressait la parole. Le jour où son oncle la convoque avec les autres membres de la famille, Mbahuwa a eu droit à un : «j’ai compris que tu as trouvé un autre endroit. Donc, tu dégages de chez moi, sans rien ajouter». Fin de la discussion. L’aventure de Mbahuwa chez son oncle a pris fin au mois de mars 2020, l’avoir hébergé pendant 7 mois. C’était un dimanche. Ce soir-là, un ami comorien comme elle l’a hébergé. Chez cet ami, elle y passait une soirée cauchemardesque et a échappé à un viol.
Depuis, un autre ami l’a accueilli chez lui. Les charges courantes : transports, restaurants, constituent souvent la principale cause de ce revirement des familles d’accueil. Les plus chanceux sont ceux qui atterrissent chez leurs propres parents. Ce n’est pas seulement la gente féminine qui est confronté à ce problème. Les étudiants eux sont contraints d’abandonner les études pour travailler. Le mariage devienne une seconde obligation pour eux. «Venir étudier en France doit faire l’objet d’une minutieuse réflexion» conseille Mbahuwa.