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Disparition d’Abdou Bakari Boina : Sur les réseaux sociaux, les comoriens pleurent la mort de Mdrehuri, le libérateur

Disparition d’Abdou Bakari Boina : Sur les réseaux sociaux, les comoriens pleurent la mort de Mdrehuri, le libérateur

Société | -   Maoulida Mbaé

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“C’est avec beaucoup de tristesse que j’apprends, ce matin, la mort de Abdou Bakari Boina, le leader du Molinaco, indépendantiste de première heure et véritable “père de l’indépendance” des Comores”, écrit l’historien Mahmoud Ibrahime.

 

La disparition d’Abdou Bakari Boina n’a laissé personne indifférent. Dès l’annonce de son décès, les réactions se sont multipliées sur les réseaux sociaux…

L’ancien ministre Dini Nassur, revenant sur le parcours du “fils prodige”, se souviendra de son retour triomphal à Moroni ce jour d’octobre 1973. De “l’accueil populaire” qui lui a été réservé, de la “communion intime entre un peuple et un leader”. Et, par-dessus tout, du “vibrant appel à l’indépendance” que “celui qu’on appelait Mdrehuri (libérateur)” a lancé ce jour-là : “Tsihumu ye mare. Pvo walo wandru wambawo pvanu mi ngozi ya mzungu, asha, tsihumu ye mare (j’ai la salive sèche, entendre dire que j’ai une peau d’européen, cela me fait sécher la salive)”. Des mots qui reflètent “le sens de son combat, l’essence de sa vie et la mécanique de son idéal”.


“Mdrehuri”, le libérateur !

Dini Nassur soulignera la singularité de Abdou Bakari Boina, soit “un dirigeant politique qui ne se battait pas pour un pouvoir, qui ne visait pas un positionnement, qui ne cherchait pas à en faire une carrière. Il faisait la politique pour une cause. Il était une perle rare, une oasis dans un désert.

 

Mila Comores s’attardera, lui, sur la “légendaire résistance (de Abdou Bakari Boina) contre l’hégémonie du Milanantsi wugangi”. “Une des luttes les plus dures, même si elle peut paraître moins importante ; la lutte la plus vile, la plus délicate car contre un ennemi de l’intérieur, insaisissable, diffus, amorphe et impersonnel ; une lutte féroce contre un ennemi qui peut prendre le visage des proches (d’une sœur d’un frère d’un parent ou d’un ami), peut-on lire.
Pour Mila Comores, cette “lutte contre les mentalités, contre l’archaïsme, est une lutte qui mérite d’être menée car constitue le plus souvent le lit de l’ennemi de l’extérieur”.


“La lutte continue !”

En se détachant ainsi du “système discriminatoire spécifique à une île”, poursuit-il, Abdou Bakari Boina s’est “érigé humblement en véritable homme d’État (des Comores) et non pas en grand “notable” (de Ngazidja)”. Et à Mila Comores de clore son hommage sur cette formule qui résume, en un sens, ce que symbolise Abdou Bakar Boina aux yeux des Comoriens : “Ton Mharuma est plus honorable. Il n’est pas en tissu, il est indéchirable, il n’est pas ostentatoire, il n’a jamais été sur ton épaule ; il est dans nos cœurs”.

C’est pour toutes ces luttes que “Abdou Bakari Boina fait partie des immortels. Ceux qui ne meurent jamais dans le cœur des hommes parce qu’ils ont mis leur vie au service des autres, parce qu’ils ont porté haut l’étendard de leur nation”, pour reprendre Ali Moindjié. Il est vrai que “tout départ n’égale pas l’autre dans l’histoire de l’humanité”, comme le souligne si bien Houmed Msaidié. Abdou BaKari Boina représente “la part comorienne de l’âme libre africaine, il fait l’histoire, pas celle des Comores seulement mais celle également de cette Afrique en quête d’émancipation”, écrit l’ancien ministre de l’Intérieur.

Il ne nous reste donc plus qu’a nous incliner, à l’instar d’Ali Moindjie, “devant la mémoire de notre El hadj Omar Tall à nous, notre Almami Touré à nous, notre Omar Mouhtar à nous, notre De Gaulle à nous, notre Georges Washington à nous, notre Aline Sitoe Diatta à nous”.

Un autre jeune, a fait part de sa frustration, lui “qui est allé à l’école dans ce pays indépendant sans entendre ton nom de la bouche d’aucun de mes professeurs, et sans le lire dans aucun manuel ; pourtant, j’aurais pu de ton vivant, te conter la crise de la baie des cochons, la convention de Philadelphie. Avec précision, je t’aurais parlé de Yalta, de Robespierre”. Il poursuivra plus loin, amer : “A ton propos ? Même ton nom, je n’aurais pas su l’orthographier”. Ce jeune, s’appelle Mohamed Rafsandjani, doctorant en droit constitutionnel, qui comme des milliers d’autres jeunes, n’avait jamais entendu parler de Abdou Bakari Boina. A l’école, on étudiait plutôt Charles de Gaulle et autres Winston Churchill.

“Va léger, va au paradis !
La lutte continue !”


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