Pouvez-vous nous parler de votre centre et comment faites-vous pour aider vos élèves, les jeunes surtout, à mémoriser le Coran?
Tout d’abord, cette école est appelée centre Saad Bin Muadh pour la mémorisation du Saint Coran. Créé en 2005, sous la direction de l’organisation internationale pour la mémorisation du Saint Coran de l’Arabie Saoudite à l’époque; le centre est actuellement sous l’administration de la Ligue islamique mondiale. La principale matière enseignée est le Coran. Toutefois, nous enseignons d’autres matières liées à la science religieuse, notamment les hadiths, la jurisprudence musulmane, la langue arabe, la grammaire, entre autres. Une fois admis au centre, l’élève apprend durant une période de trois ans, équivalent au niveau du collège. Au terme de ces trois ans, il entame le lycée et étudie la littérature arabe série A2. Entre temps, il doit au cours de sa première année mémoriser neufs djuz’u (Chapitre). L’année suivante, il passe à vingt-trois djuz’u qu’il doit mémoriser et la troisième année, il s’agira du Coran entier. Habituellement, la majorité des élèves les mémorisent dès la deuxième année, toutefois, une année supplémentaire leur est accordée. Je rappelle également que durant tout le cursus, les élèves sont en internat.
Quelles sont les conditions d’admission au centre et quelle est là capacité d’accueil pour chaque année ?
Nos élèves sont tous en internat, ils vivent et apprennent ici. Nous les hébergeons et les prenons en charge durant toute leur formation. Par conséquent, nos places sont limitées entre 50 et 55 élèves. Chaque année, nous recrutons par concours en fonction de ceux qui terminent leur cursus et quittent le centre. Si par exemple nous avons quinze sortants, nous en recrutons quinze pour l’année suivante. L’enfant doit être âgé de 12 à 15 ans, et avoir mémorisé au minimum cinq djuz’u. Pour le déroulement du concours, nous avons trois méthodes de sélections, la mémorisation à 50%, 30% de la lecture et puis 20% pour l’écriture. Nous lançons des publications et des communiqués sur l’organisation du concours et la rentrée s’effectue au début de l’année. Depuis sa création jusqu’à maintenant, nous avons à peu près 250 sortants et la plupart d’entre eux ont mémorisé le Coran tout entier.
Nous constatons que des enfants, très jeunes, de dix à douze ans, mémorisent le Coran ces derniers temps dans le pays. Est-ce que votre centre joue un rôle sur cet aspect, ou bien il y a un effort particulier des concernés seulment?
Par rapport aux années précédentes, nous avons eu des enfants qui ont mémorisé le Coran, très jeunes. A peu près, quatre élèves qui sont agés de 10 à 14 ans. Je citerai par exemple Moukrim Djae et Soultoine Abdou de l’école Mohamed Mahmoud, mais également d’autres enfants venant des écoles coraniques. En général, la plupart des élèves de notre centre mémorisent le coran à l’âge de 14 ans. Pour le cas de Moukrime Djae, il a mémorisé le Coran en intégralité à l’âge de 10 ans. Actuellement, il est au niveau 3, en ce qui concerne la mémorisation. II fait partie des plus jeune élèves ayant participé à un concours international de mémorisation du Coran. C’était aussi, la première fois que notre centre, voire notre pays, a participé à ce niveau de concours. Nous saissons cette occasion pour saluer les efforts déployés par la ville de Mitsamihuli pour son accueil à l’aéroport. Cela servira à montrer l’importance du Coran et encourager les autres enfants à embrasser cette matière dans leur apprentissage. La majorité de nos élèves passent directement au lycée, en littérature arabe au Maahad, au Madaris Al Imane et dans les autres écoles qui enseignent la littérature arabe, autrement dit série A2, à l’exception des élèves qui choisissent d’aller continuer leurs études avec les modules en français.
Les jeunes comoriens participent aux concours internationaux pour la mémorisation du saint Coran. En tant que président du jury au niveau national, comment procédez-vous à la sélection?
Chaque année, nous organisons ce concours sur l’ensemble du territoire national. Nous lançons l’appel à candidature pour la participation au concours éliminatoire et nous sélectionnons les meilleurs pour représenter le pays au niveau régional et international. Ce programme de phase éliminatoire national, mis en place à l’époque par l’ancien ministre des Affaires islamiques, Mohamed Housseine Djamalilaili, a donné ses fruits sur deux aspects. Le premier est que celui qui représente le pays dans ces concours ne nous déshonore pas. Il y en a qui sortent vainqueurs. L’importance est de faire savoir qu’aux Comores, il y a des jeunes qui mémorisent le Coran.
Etes-vous satisfaits des résultats de ces concours? Et que devrait faire l’Etat pour encourager ces enfants ?
Nous remercions tout d’abord le ministère des Affaires islamiques pour son appui sur l’organisation de la cérémonie pour les élèves candidats aux concours internationaux, une fois sélectionnés, avant leur départ. Par contre, je proposeras à l’Etat d’organiser un concours national, gouvernemental, pour la mémorisation du Coran, au lieu de celui de récitation. Pour moi, ce dernier risque de détourner l’enfant de l’objectif de la mémorisation, or au niveau international, le concours de récitation penche beaucoup sur la mémorisation. Nous pouvons le faire si nous voulons, comme le font le Djibouti et le Kenya au niveau de l’Afrique. Pourquoi ne serions-nous pas en mesure de l’organiser pour la région de l’Océan indien ?
Il y a les collectifs de récitateurs du Saint Coran qui sont en vogue ces derniers temps. Cependant, ces derniers font plusieurs erreurs de lecture du Coran, selon certains connaisseurs du domaine. Qu’en pensez-vous? Et quelle solution proposeriez-vous ?
Premièrement, si vous voyez quelqu’un qui récite le Coran en s’ajoutant de la respiration, ce n’est pas bon. Ce n’est pas la bonne méthode, alors que nous supposons que c’est bien. Un concours de récitation a des normes et conditions comme l’intonation. Si vous récitez, vous devez contrôler votre souffle pour pouvoir lire comme il se doit. Personnellement, je n’adhère pas à l’idée de mélanger le concours avec des votes. Cela érrone la compétition.
La popularité n’a rien à voir avec le talent et la technique de réciter. Nous devons respecter le Coran. Et j’appelle aux responsables de prendre les précautions et mesures nécessaires, surtout de sensibiliser nos enfants lecteurs. Et je saisis cette occasion pour déplorer une situation qui secoue le pays actuellement, à savoir la réduction ou bien le remplacement de nos écoles coraniques (Payalashio) par des écoles (coranique, ndlr) primaires rénovées, crèches et maternels. La plupart de nos enfants de ces derniers temps y sont inscrits en oubliant l’école coranique, laquelle joue un rôle majeur dans l’éducation de nos enfants.
Propos recueillis par Faissoil Fatihoudine (stagiaire)