Comment se portent les relations entre les Comores et les Etats-Unis ?
Les relations bilatérales entre les Etats-Unis et les Comores se portent mieux que jamais. Nos deux pays ont travaillé dur pour cela. Nous avons 5 grandes lignes de coopération actuellement.
Quelles sont-elles ?
Les questions de démocratie, de droits de l’homme, de développement économique, de coopération à la sécurité et de relation entre les peuples des Etats-Unis et des Comores.
L’année dernière, lors de la visite de Richard Verma, secrétaire d’État américain à la gestion et aux ressources, Azali Assoumani avait plaidé pour l’ouverture d’une ambassade américaine avec résidence à Moroni. Sa demande a-t-elle des chances d’être entendue ?
Nous avons travaillé à mettre en place, dans un premier temps, un bureau au lieu d’une ambassade, ce qui sera fait d’ici la fin de l’année. C’est donc une première étape. L’ouverture de ce bureau devrait générer plus d’interactions avec nos homologues et interlocuteurs comoriens. Après sa mise en place, nous espérons, à l’avenir, pouvoir établir une ambassade.
La signature d’un protocole d’accord entre le gouvernement et une société américaine avait suscité beaucoup d’espoir. Huffine Global Solutions avait alors promis d’investir 34 millions de dollars dans la Société nationale de pêche (Snp). Les activités n’ont toujours pas démarré, plus d’une année après cette annonce. Qu’est ce qui bloque ?
C’est un long processus qui est également compliqué. Néanmoins, nous sommes très engagés à faire avancer ce projet. Par ailleurs, il y a une question qui nous tient à cœur et dont nous discutons avec le gouvernement comorien : l’amélioration de l’environnement des affaires. D’autres compagnies américaines seraient prêtes à investir aux Comores, mais avant que cela puisse se faire, le gouvernement comorien devrait créer un environnement propice aux investissements, un environnement équitable et transparent.
C’est vraiment un effort intergouvernemental qui doit être réalisé. Outre l’environnement des affaires, il y a toute la législation régissant les impôts et la douane. Un traitement égalitaire pour les investisseurs est également primordial.L’aide au développement, c’est bien, c’est même très bien, mais ce n’est pas suffisant. Pour que les Comores puissent se développer, il leur faut des investissements industriels privés.
Peut-on comprendre que c’est à cause d’un environnement des affaires peu propice que la reprise de la société de pêche par Huffine Global Solution se fait toujours attendre ?
Non, non, cela n’a rien à voir. Cela n’a rien à voir avec le climat des affaires. C’est le processus concernant le secteur de la pêche qui est compliqué.
Dans quels domaines les Etats-Unis comptent-ils investir ?
Nous avons commencé par un investissement de 5 millions de dollars s’étalant sur une année pour l’agriculture, les énergies renouvelables, l’emploi et l’éducation civique. Sur les questions relatives à la démocratie et aux droits de l’homme, nous lancerons un nouveau projet de 500 mille dollars pour lutter contre la corruption aux Comores.
Dans le domaine de la sécurité, notamment maritime, des drones sont donnés aux garde-côtes pour les appuyer dans leurs efforts de sauvetage de vies en mer. Ils serviront également à protéger la zone exclusive économique comorienne.
Il est également question du renforcement de la diplomatie entre les Etats-Unis et les Comores.
Chaque année, nous attribuons environ une douzaine de bourses et d’assistance à des programmes d’échange à des jeunes et des professionnels. L’un des programmes les plus important est le Young Africain Leader Initiative parce qu’il permet de soutenir les jeunes Comoriens.
Qu’est ce qui explique ce regain d’intérêt des Etats-Unis à l’endroit des Comores ces derniers temps ?
C’est en lien avec la lutte contre la traite des personnes. Aux Etats-Unis, la législation nous restreint dans les activités que nous pouvons mener. La présidence, le ministère de l’Intérieur, celui des Affaires étrangères ont collaboré avec nous et les agences des Nations Unies pour faire face aux défis liés à la traite des personnes. En 2022, après ces efforts conjoints, les restrictions ont été levées, ce qui nous a permis d’accroitre notre coopération. Je saisis l’occasion pour féliciter les Comores pour l’adoption de la loi contre la traite des personnes le 28 juin, ainsi que pour la mise en place de la brigade qui lutte contre ce fléau.
Les progrès effectués par les Comores en matière de lutte contre la traite des personnes serviront de modèle pour beaucoup de pays africains.Au niveau politique, le porte-parole des candidats de l’opposition, Aboudou Soefo, a annoncé la rupture du dialogue avec le camp présidentiel. Quelle est votre appréciation ?
Nous continuons toujours à prôner le dialogue entre les deux partis. Nous félicitons le rôle joué par les Nations Unies pour sa tenue. Le dialogue est l’unique solution.
Justement, l’opposition vous reproche de l’avoir convaincue de se présenter aux élections de janvier et de participer au dialogue avec les résultats que l’on connait…
Nous continuerons à encourager les deux parties à poursuivre les discussions.
Votre pays a justement appelé à réformer le processus électoral pour garantir des élections libres et équitables. Cet appel a-t-il des chances d’être entendu alors que des législatives se profilent dans un peu plus d’un semestre ?
Nous encourageons les réformes électorales. Il y a toujours un besoin d’examiner les réformes à mettre en place. Nous appelons la société civile et les autres partenaires à se joindre à nous afin de continuer ce processus des réformes électorales ainsi que leur mise en œuvre.
Les Etats-Unis dénoncent régulièrement la dégradation des droits humains ; l’impunité de l’armée a été épinglée dans le dernier rapport du département d’Etat américain. De quels leviers disposez-vous pour renverser la tendance ?
Concernant le rapport sur les droits humains, nous en faisons pour tous les pays. Il faut le voir comme un encouragement pour l’amélioration des droits de l’homme. Les observations du dernier rapport sur les Comores sont sensiblement les mêmes que celles relevées dans les précédents.
L’opposition demande la libération de l’ex-président Sambi, de l’ex-gouverneur Salami et des détenus politiques. Avez-vous déjà plaidé en ce sens ?
C’est une question qui a été évoquée avec le gouvernement. Nous savons également qu’une discussion à ce sujet a lieu actuellement entre l’opposition et le gouvernement, même si nous n’en connaissons pas les détails. C’est une question compliquée. Une question plus compliquée qu’il n’y parait en surface.
L’on note en Afrique l’influence grandissante de la fédération de Russie, cela vous inquiète-t-il ?
Généralement, chaque Etat a besoin de s’assurer que ses partenariats se fondent sur les meilleurs intérêts de son peuple. Peu importe le pays avec lequel il va collaborer. Le problème se pose si les décisions sont prises sur la base de rétributions financières donc de corruptions, d’intérêts personnels, privés.
Les Comores ont un différend territorial avec la France, au sujet de l’île comorienne de Mayotte. Lors de la visite de Richard Verma, Azali Assoumani n’avait pas exclu que votre pays se positionne en médiateur. Est-ce une possibilité à envisager ? C’est une question bilatérale entre les Comores et la France. Nous espérons que les deux États pourront trouver une solution ensemble. Les États-Unis n’ont pas de rôle à jouer.