Les relations entre les Comores et le Maroc remontent à plusieurs décennies, mais ce n’est qu’en 2021 que les Comores ont ouvert leur ambassade au Maroc, et en 2022 que le royaume chérifien a ouvert le sien chez nous. Pourquoi cela a-t-il pris tant de retard ?
Je voudrais souligner que dans les relations internationales, il y a toujours des opportunités. Mais comme vous le savez les relations entre les pays ne s’arrêtent jamais. Le temps était juste pour les deux pays d’ouvrir leurs missions diplomatiques dans les deux capitales comme symbole de cette dynamique. Secundo, c’est aussi une façon de manifester cette volonté de développement de ces relations qui datent de plusieurs décennies en ces moments historiques.Les relations bilatérales sont exceptionnelles parce que les Comores, historiquement, ont toujours été du côté du Maroc et sont le premier pays africain à ouvrir un consulat à Dakhla. Puis s’en est suivie plus d’une dizaine de pays qui ont ouvert les leurs.
Maintenant que c’est fait, quelles sont vos priorités ?
Notre priorité est de prêter main forte et un soutien renforcé à la réalisation du développement des Comores, surtout dans le cadre du Plan Comores émergeant, initié par le président Azali Assoumani, qui est aussi le président en exercice de l’Union africaine.L’autre priorité est l’enseignement, la formation professionnelle. Comme je l’ai dit tout à l’heure, on commence par la santé, la douane, la sécurité civile, tout ce qui concerne le département de l’intérieur, les investissements et l’économie. Il y a presque 25 secteurs de coopération dans lesquels nous disposons de formations. Mais on se focalise beaucoup plus sur l’élément humain à travers l’accompagnement, l’échange d’expertise en tenant compte bien sûr des priorités fixées par le gouvernement comorien.
L’année dernière a eu lieu la 1ère session de la Commission mixte de coopération comoro-marocaine. Plusieurs axes de coopération ont été définis. Concrètement qu’est-ce qui a été fait depuis ?
Concrètement, il y avait un échange, des experts marocains sont même venus aux Comores. D’autres cadres d’échange sont en préparation dans le but de dépêcher encore d’autres missions d’expertise. Des étudiants, des cadres comoriens sont également partis au Maroc, que ça soit au niveau de la douane ou de la société civile.
Des fonctionnaires du ministère de la justice et celui des affaires étrangères y ont effectué des visites. Nous souhaitons que cette coopération soit davantage dynamique et concrète. Nos perspectives se basent dans un premier temps sur la mise en place d’un mécanisme de suivi et de mise en œuvre des 11 accords déjà signés. Puis le renforcement de l’échange et des visites d’experts marocains aux Comores, et sans oublier l’accueil de Comoriens chez nous pour des formations bien précises.
Dans le cadre de cette commission mixte, l’on parle de coopération gagnant-gagnant. Qu’est-ce que le Maroc espère bénéficier de cette coopération ?
Vous savez cette formulation de coopération gagnant-gagnant c’est dans la perspective d’une vision globale que le Maroc a adopté envers les États africains, donc tout le continent, pas seulement avec les Comores. Je vois beaucoup de développement, d’efforts, qui se sont opérés au niveau des Comores, on s’attend à ce que cela soit encore plus rapide dans les années prochaines.
Vous savez chaque pays, aussi petit ou grand soit-il, a des choses à donner aux autres. Je crois que c’est une philosophie qui a été mise en place par sa Majesté, le Roi. C’est la coopération sud-sud renforcée, gagnant-gagnant.
Les Comores présentent un taux de chômage élevé résultant d’un secteur primaire fragile, et de secteurs secondaires et tertiaires encore peu exploités. Le Maroc peut-il encourager son secteur privé à venir investir chez nous ? Quelles sont les opportunités d’investissement aux Comores pour les entreprises marocaines ?
Effectivement il y a beaucoup à faire au niveau des investissements. Cela a été concrétisé par la signature d’un accord dans le cadre la commission mixte en 2022 et ça parle beaucoup de ce que vous avez avancé. L’objectif est d’encourager les investisseurs marocains à venir ici. Il y a bien sûr des impératifs pour que cette présence marocaine s’opère. C’est faisable. Vous avez tout l’arsenal juridique. Toutefois, Il y a d’autres éléments qui doivent être renforcés pour qu’on puisse avoir une présence visible des investisseurs marocains.
On est en train de planifier une visite d’un ensemble d’investisseurs marocains pour échanger avec leurs homologues comoriens et voir quels secteurs prioritaires on peut avoir ici dans le cadre des investissements venant du Maroc vers un pays africain frère, un partenaire de premier ordre. Je crois aussi que parmi les secteurs visibles, c’est le secteur bancaire, l’eau et l’électricité.Cette année il y eu deux visites d’investisseurs marocains. Les contacts sont déjà établis. Il faudrait premièrement qu’on les renforce avec des visites officielles concrètes, qu’on puisse avoir de visu les conditions propices à l’arrivée d’investisseurs comme ceux du Maroc.
Tout à l’heure, lors d’un point de presse, vous avez dit que le Maroc est prêt à soutenir les Comores dans tout, il suffit d’en recevoir la demande. Est-ce que nous, Comoriens, faisons déjà assez cet effort de formuler des demandes d’assistance auprès de votre gouvernement ?
Dans certains secteurs, les demandes affluent ; dans la sécurité civile, la douane. Récemment j’ai reçu des dossiers de formation pour les transmettre.
D’autres départements l’ont fait et sont en attente de réponses. Mais ce qui est très important, ce qu’on doit noter, c’est qu’il y a encore une panoplie d’opportunités et d’offres qui sont ouvertes aux Comoriens.Il suffit qu’il y ait une demande pour que le Maroc les satisfasse. Ces demandes se font au fur et à mesure, par rapport aux priorités et aux nécessités exprimées.
Les Comores ont toujours soutenu et soutiennent encore le Maroc dans leurs revendications territoriales du Sahara occidental. Quelle est la position du Maroc par rapport à la question de Mayotte ?
Je crois que c’est une position réciproque. Le Maroc ne pourrait que s’aligner sur la position comorienne car les Comores ont toujours soutenu la question nationale du Maroc. On voit une concordance des visions des deux pays. C’est dans ce sens que nous constatons une harmonisation de nos positions. Et le Maroc ne pourrait être que pour l’intégrité territoriale d’un pays frère et ami comme les Comores.
Propos recueillis par Sardou Moussa, transcris par Abdou Moustoifa