Des groupes d’adolescents se sont étripés en début de semaine à Mitsamihuli. En tout, quatre jeunes ont été agressés dont l’un par pointe américain et un autre par une chaise. Un phénomène qui prend forme lentement par deux regroupements plus ou moins structurés de mineurs qui privilégient la violence pour obtenir «la reconnaissance» et «le respect». Ces échauffourées deviennent un jeu chez ces adolescents, on commence à compter des victimes.
Interrogé sous l’anonymat, un des principaux bagarreurs reconnait que leur jeu prend une autre ampleur. Mais il trouve qu’ils ont atteint un point de non-retour. «Nous avons franchi le rubicon du fait que certains sont blessés par arme blanche. Contrairement aux deux premiers duels, juste des coups de poing. Toutefois, il n’est pas question que les jeunes de l’autre quartier nous marchent dessus», lance-t-il.
Bien que la cause de ces rixes ne soit réellement connue, ces collégiens et lycéens sont tous loin d’agir en âme et conscience lors de ces querelles violentes. Notre jeune interlocuteur avance certains éléments à en tenir compte. «Certains sont sous l’emprise d’herbe, de cannabis et de l’alcool. Et c’est aussi du fait de la pagaille qu’ils sèment que nous sommes arrivés là aujourd’hui. Malgré cela, nous ne pouvons pas laisser les autres tabasser nos frères», nous laisse-t-il sans voix.
Un jeune d’un autre groupe estime que certains deviennent de plus en plus revanchards. Il prétend toutefois être conscient que leurs accrochages risquent d’engendrer des conflits familiaux ou inter-quartiers. «Toute personne blessée ne sera jamais d’accord de tout oublier. Ce qui est normal. Une famille ou un quartier ne pourra pas tolérer ces agressions», reste-t-il convaincu.
Face à cette délinquance juvénile au sein de la capitale du nord, l’opinion pointe du doigt les parents des principaux bagarreurs. Pourtant, certains de ces parents donnent d’autres impressions.
Mesures préventives et mêmes répressives
Gardant l’anonymat, un parent des éléments perturbateurs regrette l’inaction de tous les acteurs sociaux en vue d’une solution pérenne. «Nous sommes dépassés du tabagisme, drogue et alcoolisme de ces enfants. Cette fois-ci, nous devons nous mobiliser pour éviter le pire. Ils ont commencé à pratiquer l’école buissonnière et maintenant la situation devient incontrôlable», reconnait-il, avant d’exprimer son inquiétude sur l’avenir de son enfant.
La situation est de plus en plus inquiétante dans les rangs des autorités locales. Parmi les pistes imaginées pour résorber cette situation, le préfet du nord tient à rassurer que des mesures de prévention seront concrétisées prochainement. «Nous comptons prendre des mesures adéquates contre ce fléau. Mêmes répressives s’il le faut. Cette situation devient de plus en plus dangereuse car certains d’entre nous ne veulent pas des mesures proportionnelles aux actes dangereux de ces jeunes. Nous n’allons pas tolérer des interventions et négociations venant de nulle part», martèle le préfet du nord-ouest, Mchangama Abbas.
Interrogé hier en tant que sociologue, Mistoihi Abdillahi relève quelques causes sur ces dérives des jeunes et insiste sur le fait que le phénomène varie d’un jeune à un autre. Selon lui, certains jeunes se droguent ou vont à la dérive par simple curiosité et une fois dedans il leur est difficile à abandonner. «Il peut être question de rébellion parce que ces jeunes savent que leurs familles ne s’occupent pas d’eux. Un moyen de se révolter. Sinon, une façon de cacher son échec scolaire. L’autre cas, plus dangereux, c’est lorsque les jeunes veulent une reconnaissance, veulent se distinguer alors qu’ils sont bien perdus. Ils veulent que les gens parlent d’eux», clarifie brièvement le sociologue.
Vouloir se distinguer
Le moins que l’on puisse dire, les heures durant lesquelles se déroulent ces échauffourées ont été, jadis dans cette ville, des moments où l’on accueillait toute la jeunesse au centre de lecture et d’animation culturelle (Clac). Un centre qui ne fonctionne plus malheureusement.