C’est au cours d’une conférence ce jeudi 14 mars que la famille de Yazid Chakir Mladjao, en présence de son avocat, Me Hadji Chaabani, a annoncé avoir porté plainte le 11 mars pour « négligence médicale » présumée auprès du procureur de la République.Yazid, 16 ans, est décédé le 26 février au service de réanimation d’El-Maarouf. Une semaine plus tôt, le 19, après un test positif au choléra, il avait été admis au Centre rural hospitalier de Samba où sont traités les malades du choléra à Ngazidja. Son frère, Housni Mohamed Chakir, venu spécialement de France, pointe « une série de défaillances dans la prise en charge».
«Un isolement total dès son admission»
L’émotion était palpable lors de la rencontre avec les journalistes. Par le détail, Nomane Mohamed, autre frère et secouriste, est revenu sur les circonstances de l’admission du lycéen. «Après une sortie entre amis, Yazid a été pris de crampes douloureuses, de diarrhées et de vomissements. Très rapidement, nous le conduisons à l’hôpital El-Maarouf. Le test au choléra s’avère positif et il est admis à Samba », a expliqué le conférencier.
Aucun membre de la famille ne l’accompagne comme le veut le règlement. «Yazid est soumis à un isolement total dès son admission», a-t-il affirmé. Son état ne s’améliore pas, loin de là. L’adolescent, à l’en croire, a du mal à se nourrir et régurgite la SRO, la Solution de réhydratation orale, à peine bue. «Par téléphone, Yazid nous explique ce qui se passe. Nous comprenons alors qu’il lui faut une présence familiale pour le soutenir. Nous plaidons cette cause auprès des responsables qui ne veulent rien entendre», a-t-il développé. Le vendredi 23 février, vêtu de son uniforme de travail, il se présente à l’hôpital, la sécurité le laisse entrer. «Il est très faible, je le réfère au personnel soignant, qui argue qu’il a développé des troubles psychologiques qui vont se régler avec notre présence», a-t-il avancé. En réalité, raconte-t-il, l’adolescent avait besoin que quelqu’un «le pousse à manger, à boire, le personnel soignant se contentait de lui déposer sa nourriture sans plus», a-t-il affirmé. Son état continue de se dégrader.
Vu l’état général du malade, sa mère est autorisée à rester auprès de lui. Samedi 24, «il sombre dans l’inconscience et c’est là qu’ils prennent conscience de la gravité de la situation ». Un médecin aurait même déclaré que « cet enfant aurait dû être déplacé vers El-Maarouf depuis longtemps». Une ambulance le transfère à El-Maarouf. Mais là-bas, «il passera plusieurs heures, la plupart du temps sans assistance respiratoire, avant d’être accepté au service de réanimation dans la nuit. Les médecins exigeaient au préalable un test négatif du choléra, ce qui était compliqué puisque notre frère n’allait plus à la selle», a-t-il développé.
Pour ne rien arranger, «on nous dit que le chlorure de potassium qui allait servir au traitement de notre frère qui avait une hypokaliémie (faible taux de potassium dans le sang ndlr) n’était pas disponible au service de réanimation, ce qui était faux», a-t-il avancé. Et de poursuivre : « Yazid s’est mis à convulser et c’est seulement en ce moment qu’il a été envoyé en réanimation. Notre frère a rendu l’âme peu après».«Nous voulons des réponses à nos questions, d’où notre plainte. Nous avons tenté d’avoir des explications en vain. Il est important que nous sachions quelles sont les circonstances qui ont mené au décès de Yazid», a déclaré Me Hadji Chaabani.
Un sandwich, du choléra, et l’absence de chlorure de potassium en toile de fond
Le tragique récit de la mort de Yazid Chakir Mladjao, un adolescent comorien de 16 ans, débute par un message posté sur les réseaux sociaux par son cousin, Mladjao Abdoul Anlym, résidant en France. Yazid est tombé malade après avoir partagé un sandwich avec des amis après l’école. Son état s’aggrave rapidement et il est diagnostiqué positif au choléra, puis transféré à l’hôpital de Samba pour un traitement approprié. Cependant, les complications commencent lorsque le médicament nécessaire, le chlorure de potassium, est introuvable. Ce qui retarde son traitement, de manière fatale. Yazid décède à El-Maarouf dans la nuit du 25 au 26 février.
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