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Déploiement de la 5G I Entre opportunités et des questions sans réponses

Déploiement de la 5G I Entre opportunités et des questions sans réponses

Société | -   Abdou Moustoifa

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Si un déploiement limité à Moroni est annoncé par les deux opérateurs d’ici deux mois, aucun calendrier pour l’extension globale sur l’ensemble du territoire n’a en revanche été communiqué.

 

Depuis jeudi dernier, les deux opérateurs de télécommunications présents dans le pays ont obtenu le feu vert du régulateur pour lancer la 5G sur l’ensemble du territoire. Une fois déployée, cette cinquième génération de réseau mobile représentera une avancée notable vers l’innovation technologique (à condition, toutefois, qu’elle soit utilisée à bon escient).
Globalement, et c’est un avis largement partagé, la 5G offre de nombreux avantages dans les pays où elle est disponible. Dans un communiqué, Yas Comores a d’ailleurs présenté les perspectives pour ses clients : visionnage de vidéos en très haute définition avec une vitesse de chargement optimisée, déploiement d’objets connectés intelligents, développement de villes intelligentes (Smart Cities), télémédecine, et bien plus encore. Cependant, peu d’informations sont disponibles à ce jour sur le calendrier du déploiement du réseau à l’échelle nationale, ou sur les équipements compatibles. De nombreuses interrogations subsistent du côté des consommateurs.


Le président de l’Association des consommateurs des technologies de l’information et de la communication (Actic), Hamidou Mhoma, s’est exprimé à ce sujet : «Les opérateurs veulent propulser le pays au sommet en matière d’infrastructures réseau. La 5G, c’est le summum. Cette ambition interpelle les usagers que nous sommes. Les technologies 2G, 3G et 4G ne sont pas encore pleinement maîtrisées. Aujourd’hui encore, certaines zones ne sont pas couvertes. La qualité des appels, des SMS et de la connexion data laisse à désirer. Au lieu d’améliorer l’existant, les opérateurs nous proposent déjà une nouvelle technologie», a-t-il déploré.


Hamidou Mhoma dit saluer «les efforts des opérateurs» sur ce projet. Pour lui, l’arrivée de la 5G place les Comores dans le cercle des pays africains déjà dotés de cette technologie.«Nous leur disons merci pour cette initiative. Mais ont-ils les moyens de leurs ambitions ? Cette technologie, coûteuse pour les usagers, notamment en raison du changement de terminaux qu’elle impose, ne risque-t-elle pas d’être discriminante?», interroge-t-il, tout en s’inquiétant du temps que mettront Yas Comores et Comores Télécom pour la rendre accessible au plus grand nombre.

L’importance de former des compétences locales

Pour l’instant, seule la capitale devrait servir de ville pilote, avant une éventuelle extension vers d’autres localités. Dotée d’un très haut débit, la 5G est perçue comme une technologie prometteuse pour le développement économique, notamment à travers l’Internet des objets. Mais pour en tirer pleinement parti, le pays devra impérativement renforcer ses infrastructures. «L’arrivée de la 5G en Union des Comores représente à la fois une opportunité stratégique majeure et un enjeu essentiel pour la transformation numérique. Elle permettra d’accélérer le développement du numérique en ouvrant la voie à des services innovants comme la télémédecine ou l’enseignement à distance de haute qualité. Mais certains défis doivent être anticipés», affirme Ahmed Bacar, directeur général de l’Institut universitaire des technologies (Iut).


À la tête du seul institut national spécialisé dans les métiers du numérique, il insiste sur l’importance de former des compétences locales. «Nous avons besoin de techniciens, d’ingénieurs et d’experts en cybersécurité pour exploiter et sécuriser ces nouvelles infrastructures. Il faut également mener des actions de sensibilisation afin d’éviter que des inquiétudes, notamment liées à la santé, ne freinent l’adoption de cette technologie», plaide-t-il. Selon lui, l’Iut pourrait jouer un rôle majeur en formant la future génération à travers des cursus spécialisés dans les réseaux mobiles et la 5G.
Du côté de l’Actic, son président reste prudent, notamment sur la question des coûts. «Depuis 2021, le régulateur a déjà imposé une hausse des tarifs. Cela risque d’être pire avec la 5G. On parle ici d’une vitesse de connexion dépassant 1 Go par seconde. Il appartient aux autorités de régulation de veiller au respect des cahiers des charges, à la qualité des services, mais aussi à la protection des consommateurs», insiste Hamidou Mhoma.Et de conclure : «Il ne faut pas que la 5G se limite à TikTok et Messenger. Nous devons développer des usages dans la santé, l’éducation, l’agriculture, afin que cette technologie soit véritablement utile et rentable. Cela suppose davantage de créativité, notamment chez les jeunes évoluant dans le secteur».

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