Aboubacar Hadji Saandi Kassim, Doctorant en économie
« Cette initiative me dépasse. En réalité, il s’agit d’une question ambigüe qui nécessite des analyses approfondies. Sur le plan social, cette mesure n’est pas du tout salutaire, car elle représente un recul par rapport aux efforts des bailleurs visant à promouvoir l’éducation pour tous. Dans plusieurs régions, certains collèges et lycées accueillent moins de dix élèves. Il n’est pas efficace d’allouer des fonds considérables là où le besoin n’est plus significatif. Cela entraîne des pertes financières, affecte les ratios quotidiens et la mobilisation des fonds. Cependant, le ministère devrait préalablement envisager des alternatives pour les quelques élèves qui fréquentent uniquement les établissements publics et qui n’ont pas les moyens d’accéder aux écoles privées, notamment en ce qui concerne leurs déplacements.»
Salim Youssouf Idjabou, cadre du parti Naribarikishe ye Komori
« Il s’agit d’une mauvaise idée qui ne devrait à aucun moment être avancée dans un pays comme le nôtre. «Gouverner, c’est prévoir». Qu’a fait notre gouvernement pour anticiper et étudier la question de l’école publique en général, et du sous-effectif en particulier ? Nous savons tous que la majorité des familles envoient leurs enfants dans le privé en raison de la négligence ou de l’échec des gouvernements dans l’enseignement public. À mon avis, il serait nécessaire de mener une consultation populaire avec les élus locaux, la diaspora et d’autres cadres pour réfléchir ensemble et trouver des solutions pérennes. Cela permettrait également de revoir en profondeur les statistiques fournies par les techniciens du ministère de l’Éducation nationale. Il est grand temps de réformer notre système éducatif afin de rendre l’école publique attractive et de redonner à cette éducation ses lettres de noblesse. »
Anchouroi Msoma, parente
«Je pense que cette initiative résulte d’une erreur et j’espère que les décideurs reviendront sur cette décision. L’école publique est délaissée par les autorités chargées de son développement. Plutôt que de la renforcer, le gouvernement envisage sa fermeture en évoquant le faible effectif et les pertes budgétaires, ce qui est très regrettable. La plupart des écoles privées existantes dans nos villes et villages ne respectent plus les normes pédagogiques. Elles profitent de l’incompétence et du manque de civisme des responsables du ministère de l’Éducation. Finalement, le ministère favorise ces écoles privées au détriment du public, alors que le niveau de vie actuel est difficile. J’appelle les cadres du ministère de l’Éducation nationale à revoir cette décision et à réfléchir aux conditions de travail des acteurs de l’éducation, notamment en mettant fin aux grèves répétitives des enseignants.»
Abdoulghafour Matain, ancienne cadre du ministère de l’Éducation
« Cette initiative tend à privatiser l’éducation, car les enfants des écoles publiques concernées seront contraints de poursuivre leurs études dans des écoles privées, ce qui conduira à la disparition progressive du public. Avant de mettre une telle mesure en œuvre, le gouvernement doit prévoir des dispositifs d’accompagnement pour ces enfants. Dans certaines zones rurales, un collège peut desservir trois à cinq localités. Si le gouvernement autorise la création d’écoles privées dans chaque localité, il doit en assumer les conséquences. Le ministère devrait également revoir la loi de l’orientation qui fixe les priorités pour l’école publique, en encadrant les effectifs et les taux horaires des enseignants dans le privé et le public. Or, ces mesures ne sont plus contrôlées, et le gouvernement risque de pénaliser les élèves qui choisissent l’école publique malgré ses conditions difficiles.»
Achata Maoulida, directrice de collège rural
« Les communautés proches des collèges et lycées publics doivent se réunir pour réfléchir à cette initiative, jugée négative par une grande partie de la population rurale. Étant donné l’état des écoles publiques, certaines familles hésitent à y envoyer leurs enfants. Les collèges ruraux accueillent pourtant des élèves brillants qui pourraient exceller, mais ces derniers sont victimes de la mauvaise gestion et de l’absence des enseignants, eux-mêmes négligés par les inspecteurs pédagogiques. Ce sont là des causes du faible effectif. Au lieu d’améliorer les infrastructures et les conditions pédagogiques, le gouvernement envisage de fermer ces établissements. À mon avis, les élèves admis à l’examen d’entrée en sixième issus d’écoles publiques devraient automatiquement intégrer les collèges ruraux. »
Abdoulfatah Ali, enseignant de français
«Il est essentiel de s’interroger sur les raisons de la désertion de ces établissements. Les élèves fuient les écoles où règnent indiscipline, irrégularité du corps enseignant et manque de rigueur du personnel administratif, ce qui fait perdre confiance aux parents. Le gouvernement doit apporter les solutions nécessaires pour convaincre élèves et parents. Avant de fermer ces écoles, le ministère doit approfondir l’analyse des causes réelles de la désertion. Une autre question importante : ces écoles produisent-elles de bons résultats malgré le sous-effectif ? Un effectif réduit peut faciliter la transmission des connaissances. Si un faible effectif s’accompagne de résultats catastrophiques, le problème est profond. Dans tous les cas, fermer ces établissements serait un échec du ministère de l’Éducation.»