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Financement des activités associatives I Entre orthodoxie budgétaire et «fins politiques»

Financement des activités associatives I Entre orthodoxie budgétaire et «fins politiques»

Société | -   Mariata Moussa

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Un ancien ministre des Finances nous aide à décrypter les mécanismes de financement gouvernemental des associations, révélant des processus et des enjeux politiques derrière les subventions publiques.

 

L’on sait que l’augmentation des prix des produits est parfois préconisée pour résoudre les difficultés financières et de trésorerie des sociétés d’État afin d’éviter la faillite. Cependant, ces problèmes, officiellement annoncés par certains directeurs de sociétés d’État, et les solutions mises en œuvre au détriment des revenus des ménages, cachent souvent une réalité différente. En se basant sur des informations fournies par un reçu de décaissement de 10 millions de francs comoriens, daté du 23 juillet dernier et émis par un directeur pour financer une activité culturelle d’une association, il semble que l’argent public peut s’évaporer par des moyens peu orthodoxes.


Deux membres d’une association, le président et son secrétaire général, ont certifié par écrit avoir reçu cette généreuse somme de 10 millions de francs comoriens « dans le cadre de la subvention accordée par le gouvernement » pour l’organisation de leur activité. Cette transaction, effectuée par ces trois individus, suscite des interrogations sur les modalités de financement des activités associatives par le gouvernement ainsi que sur leurs mécanismes de décaissement.Au cours d’un entretien avec un ancien ministre des Finances du pays, celui-ci a expliqué que pour de petites sommes, telles que 2, 3 ou 4 millions, le ministre des Finances peut ordonner le paiement seul en utilisant une rubrique qui n’est pas souvent utilisée.

Des pièces justificatives…

Cependant, l’ancien ministre a souligné que la période est essentielle. Selon lui, si cela doit intervenir pendant la période de paiement des salaires des agents de l’État, le ministre prend des précautions, car même de petites sommes ont de l’importance à ce moment-là. En revanche, pour des sommes plus importantes, comme les dix millions mentionnés, le ministre des Finances doit en référer au président. Il doit le tenir informé pour deux raisons : les mécanismes financiers sont souvent une question politique et sont également liés aux crises chroniques de trésorerie. Cette situation n’est pas récente.En ce qui concerne le décaissement, l’ancien ministre a expliqué que, qu’il s’agisse d’une petite ou d’une grosse somme, le ministre des Finances ordonne le paiement sur la base de pièces justificatives.


Ces pièces doivent suivre un circuit bien précis : directeur du budget, contrôleur financier et trésorier payeur. Le ministre est l’ordonnateur, et le trésorier payeur général est le liquidateur. Pour garantir une gestion financière conforme aux règles, toutes ces étapes doivent être respectées.Selon notre interlocuteur, un autre moyen de financement de l’État peut également intervenir via la Banque centrale des Comores (Bcc), mais toujours en se basant sur des pièces justificatives. Par cette voie, le ministre identifie un compte de l’État hébergé à la Bcc et ordonne au gouverneur de la Bcc de procéder au paiement. Pour permettre au bénéficiaire de recevoir l’argent, le gouverneur transfère les fonds sur un compte du trésor, et le liquidateur effectue le paiement.En ce qui concerne les sociétés d’État, l’ancien ministre a précisé que le ministre des Finances a un contrôle à travers le comptable de la société, qui doit en référer au ministre.


Lorsqu’un directeur finance une activité associative, il le fait au nom de l’État et ne peut pas utiliser cet argent à sa discrétion, car il s’agit de fonds de l’État et non du gouvernement. L’ancien ministre a souligné que le budget de l’État est voté par les députés afin de permettre aux représentants de la nation de décider comment l’argent public sera utilisé. En fin de compte, selon notre interlocuteur, « financer une activité associative au nom du gouvernement est une question politique, et cela équivaut à utiliser les biens de l’État à des fins politiques».

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