À sa troisième année, le contrat entre la Sonelec (Société nationale d’électricité) et Cen (Comores énergies nouvelles) Sarl, portant sur une production d’énergie à partir d’un système solaire de 3 mégawatts crête (Mwp), avec un système de stockage d’énergie de 2,85 mégawattheures (MWh), pose problème. Ce contrat régit aussi la construction, la mise en service, l’exploitation et la maintenance de la centrale de Lingoni, des installations de raccordement, ainsi que la vente et l’achat entre la Sonelec et Cen Sarl.
La société d’État constate que son fournisseur privé ne parvient pas à remplir ses obligations. «Comores énergies nouvelles ne parvient pas toujours à nous livrer les trois mégawatts pendant les périodes ensoleillées. Pourtant, la société a démarré en même temps que la société Innovent [une autre centrale solaire d’une autre société privée implantée au sud de Ngazidja]. Ce manquement nous pénalise évidemment sur l’île. Sur les 3 mégawatts, nous ne recevons que 2 mégawatts, voire parfois 1 mégawatt», affirme le directeur général de la Sonelec, Soilihi Mohamed Djounaid.
Ce dernier soulève également la nécessité d’installer des batteries de stockage pour que son partenaire puisse lui fournir de l’énergie également le soir. Selon lui, l’absence de batteries de stockage rend difficile pour la Cen de remplir ses obligations envers ses clients. « Il est maintenant impératif de revoir le contrat. Il est crucial d’installer des batteries de stockage pour obtenir des mégawattheures le soir, comme le fait actuellement Innovent», compare-t-il, avant d’insister sur la nécessité de réduire le prix d’achat du kilowattheure auprès de Comores énergies nouvelles Sarl.
Une marge bénéficiaire de 88%
Il serait actuellement de 105 francs, tandis que la Sonelec le revend à sa clientèle à 198 francs, soit une marge bénéficiaire de 88 %. Face à ces réclamations de la société d’État, une source proche du dossier avance une autre explication. Elle met en cause l’état vétuste du réseau pour justifier l’incapacité de Cen Sarl à fournir la quantité d’énergie requise par le contrat. «En raison du réseau électrique défaillant, le fournisseur ne pourra jamais livrer les mégawatts souhaités. Il y a eu un temps où il livrait les 2/3 alors qu’il pouvait garantir les 3 mégawatts. Cependant, en raison de l’énergie réactive produite par le réseau vétuste, tout est compromis», explique notre source, évoquant les dommages causés par les fréquents déclenchements de la Sonelec au niveau des équipements du fournisseur.
Notre source soulève également la question du programme aléatoire de la Sonelec concernant le fonctionnement des groupes électrogènes. Elle révèle que la société d’État pénalise son fournisseur en éteignant ses centrales quand bon lui semble, même lorsque l’ensoleillement est au rendez-vous. «La Sonelec peut parfois arrêter de faire fonctionner ses groupes à partir de 14 heures, 13 heures ou 12 heures car elle souhaite réserver du carburant pour alimenter la nuit. Pourtant, il était clairement spécifié dans le contrat qu’elle devait maintenir ses groupes en marche pour que Cen Sarl fonctionne de manière synchronisée», avance-t-elle. En ce qui concerne l’installation des batteries, notre source rappelle que celles mentionnées dans le contrat doivent répondre aux fluctuations, notamment lors du passage des nuages.
L’impact de l’introduction des centrales solaires
Elle fait remarquer que l’ajout de batteries pose un problème environnemental car elles ont une durée de vie limitée. «Leur charge et décharge fréquentes entraînent une dégradation rapide. Remplacer ces batteries usées est compliqué. Elles doivent être éliminées car il n’y a pas de moyens de recyclage aux Comores, ce qui contribue à la pollution. Contrairement aux panneaux solaires qui peuvent durer trente ans», souligne-t-elle, en rappelant que l’objectif initial était de promouvoir les activités génératrices en alimentant Ndzuani pendant la journée.
Selon un rapport récemment publié par le Fonds monétaire international (Fmi), l’impact de l’introduction des centrales de production électriques solaires n’est pas encore visible aux Comores, car la Sonelec n’a visiblement pas réduit sa demande en carburant fossile. Le rapport souligne également que la Sonelec a considérablement augmenté ses achats de gazole en 2021, une augmentation de plus de 25% ayant été prévue pour 2023.