Aux Comores, le hidjab n’est plus seulement une affaire de foi ou de culture : il est devenu un véritable look des podiums improvisés dans les ruelles et dans les boutiques. Longtemps perçu comme symbole de chasteté et de sobriété, mode vestimentaire est désormais une pièce maîtresse des garde-robes et du business local.
Dans un twarab (soirée dansante traditionnelle), rares sont celles qui osent défiler sans ce voile désormais revisité. Certaines femmes l’assument avec une désinvolture fashion. «Je ne m’habille que très rarement ainsi, mais si je le fais aujourd’hui, c’est parce que c’est la mode», lâche une jeune participante, tout sourire. Pour d’autres, c’est plus une question de règlement que de goût. «Le hidjab n’est pas vraiment une tenue à moi, mais comme c’est la tenue scolaire, je n’ai pas le choix», confie une élève de l’école Ibn Khaldoun, qui semble vivre son voile comme on vit un uniforme, avec un soupçon de résignation.
certe, derrière les couleurs pastel et les coupes sophistiquées, certaines tiennent à rappeler la profondeur du vêtement. «Avant je le portais plus souvent parce que c’était la culture comorienne, mais aujourd’hui je comprends que c’est aussi religieux. Et franchement, rien n’est plus élégant qu’une femme en hidjab », affirme avec conviction une croyante qui voit dans ce tissu autant un symbole spirituel qu’une parure chic. Et que disent les religieux ? Bourhane Ibrahim, conseiller juridique du recteur de l’Université des Comores, remet les pendules à l’heure.
«Le hidjab a toujours été cultuel avant d’être culturel. Il doit être porté par pudeur et non comme simple effet de mode», tranche-t-il. Un rappel qui, même s’il sonne sérieux, ne freine pas vraiment l’élan des commerçants. Les boutiques débordent de voiles en tous genres, du plus sobre au plus extravagant, et pas seulement pour des raisons spirituelles : le business du hidjab rapporte gros, surtout pendant les fêtes.
En somme, le hidjab comorien vit une double vie : entre vêtement sacré et accessoire tendance. Et à en croire les jeunes clientes qui réclament sans hésiter «le dernier modèle à la mode», il est bien parti pour rester au sommet, de la tradition et du style.
Toimayat Hassane (stagiaire)