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Importation de produits contrefaits I Une ombre menaçante plane sur l’économie, la santé et la tradition

Importation de produits contrefaits I Une ombre menaçante plane sur l’économie, la santé et la tradition

Société | -   Nourina Abdoul-Djabar

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La contrefaçon représente une menace sérieuse pour l’économie, la santé et la tradition nationale des Comores. Les produits contrefaits provenant principalement d’Asie sont de plus en plus présents sur les marchés locaux, mais les autorités semblent fermer les yeux et les textes de réglementation sont négligés.

 

Au marché de la capitale, Volo-volo, Abdou Aliou, un vendeur ambulant, propose à ses clients une pâte à tartiner. Bien que les emballages et le design ressemblent étrangement à ceux de la célèbre marque Nutella de Ferrero, il s’agit en réalité d’un produit différent baptisé Noisella. Cette ressemblance peut parfois induire les clients en erreur, car beaucoup ne prêtent pas toujours suffisamment attention aux détails.«J’ignore de quoi vous me parlez, le plus important est que c’est du chocolat », réagit le vendeur d’un air nerveux.

L’ampleur significative de la contrefaçon dans le pays

Il est cependant crucial de noter que la vente de produits semblables à des marques renommées peut être risquée, car leur origine et leur composition soulèvent souvent des questions légitimes. Récemment, en mars 2023, un cas notoire a été celui des tomates « Al Mudhish » contrefaites qui ont été mises en vente et ont suscité de sérieuses préoccupations (Lire notre Edition du 7 mars 2023). Au cours d’un entretien à ce sujet, Alexis Djaffar, responsable de la direction de la propriété industrielle, a souligné l’ampleur significative de la contrefaçon dans le pays, touchant divers secteurs.


Et l’Ocpi, dont le rôle est d’assurer le contrôle des produits, reconnaît qu’il peut y avoir des lacunes dans les contrôles frontaliers : «Les produits contrefaits peuvent parfois passer sans être détectés. Pour améliorer cela, il faudrait que les douaniers reçoivent une formation spécifique sur la détection, en collaboration avec l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (Oapi), représentée par l’Ocpi aux Comores», précise Alexis.


Al-watwan a aussi interrogé sur le même sujet le conseiller juridique du directeur des douanes, Saïd Hamza Youssouf, dans son bureau à la direction des douanes. Bien que toutes les solutions soient sur sa table, rien n’est visiblement appliqué, à quelques mètres de là, dans le grand marché de Volo-volo. « Nous accordons une importance capitale à la lutte contre les produits contrefaits. Le pays se prépare activement à rejoindre l’Organisation mondiale du commerce pour renforcer sa protection contre la contrefaçon. Sur le plan juridique, nous avons mis en place des mesures conformes aux accords internationaux, notamment l’Accord de Bangui au niveau régional», affirme-t-il.

«300 entreprises sensibilisées»

Nous avons toutefois appris au cours de nos multiples échanges avec les acteurs du domaine que « l’un des principaux défis est le non-respect des accords internationaux auxquels les Comores ont adhéré en matière de propriété intellectuelle », d’après une source ayant requis l’anonymat.Néanmoins, l’Ocpi se targue d’avoir entrepris plusieurs actions supplémentaires pour renforcer la lutte contre la contrefaçon, notamment la mise en place d’un organisme de gestion collective, l’encouragement des entreprises à déposer leurs marques, et la réalisation de campagnes de sensibilisation porte à porte. «En 2022, nous avons effectué une campagne de porte à porte auprès de 300 entreprises sensibilisées, dont 100 ont répondu favorablement, 48 ont signé un protocole d’accord et seulement 6 se sont enregistrées auprès de l’Ocpi », résuma Alexis Djaffar. Malgré le fait que la contrefaçon soit considérée comme une infraction grave, passible de sanctions pénales selon les accords de Bangui, Said Hamza Youssouf souligne que les fraudes persistent.

 

L’un des principaux défis auxquels font face les douaniers est la capacité des fraudeurs à camoufler leurs produits contrefaits, rendant ainsi leur détection difficile. De plus, le conseiller juridique affirme que jusqu’à présent, la douane a négligé l’aspect industriel de la contrefaçon, et le plein respect de ces accords n’a pas encore été atteint, principalement en raison du manque de laboratoires pour vérifier l’authenticité des produits.Cependant, une prise de conscience est en cours, et des mesures sont prises pour combler cette lacune. Des formations sont actuellement en cours pour sensibiliser les douaniers aux fondamentaux de la contrefaçon et renforcer leur collaboration avec d’autres services d’intervention. Un plan stratégique, couvrant la période de 2023 à 2026, a été mis en place pour orienter ces activités, comme l’a également annoncé Said Hamza Youssouf.

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