Rendue public, dans la soirée d’hier 21, suite à une longue audience tenue le même jour, sur les intérêts civils, cette décision a condamné le prévenu à verser 17 millions de francs comoriens à sa victime, Moinahalima Andhumdine, à titre de dommages et intérêts.
Ce délibéré rendu trente minutes après l’audience a surpris plus d’un. “Je ne m’attendais pas à ce que l’affaire soit délibérée tout de suite”, a soutenu un des avocats de la défense, Me Mahamoudou Ahamada, à la sortie de l’audience.
De son avis, si le tribunal avait mis l’affaire en délibéré, “la décision pouvait être autrement car, ils auraient eu le temps de lire le dossier”. Quant à Me Saïd Larifou, un autre avocat du prévenu, juridiquement, cette décision est discutable car le tribunal n’a pas pris le temps d’examiner tous les éléments qui composent le dossier, relatif à la prescription de l’information et la constitution des faits d’escroquerie. “A mon avis, le tribunal s’est prononcé sur les sentiments, mais pas sur le droit”.
Selon l’avocat saint-pierrois, leur client s’est résigné et ne souhaite pas faire appel. Satisfait de cette décision, Me Azad Mzé, avocat de la partie civile a déclaré certes que les dommages et intérêts accordés par le tribunal ne vont pas couvrir tous les préjudices subis, mais la décision est juste.
Dans son intervention, l’avocat ancien procureur de la République a déclaré être choqué de la stratégie de défense qui a voulu faire passer la victime en coupable et le coupable en victime. “Certes c’est de bonne guerre, cependant, je trouve indécent cette manière d’inverser la chaine du moral, les bons passent pour des méchants et les méchants pour les bons”.
Entre les larmes de joie de Moinahalima Andhumdine, qui avait l’exercice complexe de se plier au contre interrogatoire des avocats de la défense, les fans de Chaéhoi M’madi scandaient “Allah Akbar” au moment du retour du détenu à la maison d’arrêt.
Les juges savent très bien que fundi est innocent de ce qu’on l’accuse, mais la décision de l’incarcérer vient d’en haut, a déclaré un certain Mouigni, qui n’a pas voulu dire plus sur son identité.
Poursuivi pour les faits d’escroquerie, le prévenu a rejeté ces accusations, mais a reconnu avoir pris de l’or et de l’argent auprès de Moinahalima Andhumdine en guise de sacrifice afin de pouvoir la guérir des mauvais esprits qui la hantaient.
Quant à la victime, il n’a jamais été question de sacrifice, mais le prédicateur lui demandait de l’or et de l’argent pour la protéger de ces esprits. Il nous a strictement interdit de toucher le sac où il faisait semblant de mettre l’or en menaçant que ces esprits maléfiques s’attaqueraient à quiconque toucherait ce sac et nous l’avons cru.
Notons qu’à l’ouverture de l’audience, la défense a in limine litis soulevé une exception sur la prescription de l’infraction. Selon Me Saïd Larifou, la plainte est déposée en 2011 et depuis le 11 septembre 2013, le juge d’instruction n’a pris aucun acte sur la procédure.
Quant à la partie civile, Me Azad Mzé a soutenu qu’il s’agit d’une affaire qui était en instruction, la défense avait le temps de soulever ses exceptions devant le juge, mais a préféré récuser le juge, or une fois que l’ordonnance de renvoi a été rendue, “cet acte purge toutes les nullités qui auraient pu être soulevées”. Ces exceptions ont été rejetées par le tribunal en les déclarants mal fondées.