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Justice : Rédaction des décisions, une question récurrente

Justice : Rédaction des décisions, une question récurrente

Société | -   Mariata Moussa

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Chaque jour ou presque voit s’ajouter des affaires à la déjà très longue liste des décisions de justice non rédigées. Au palais de justice de Moroni, si les affaires passent devant les juges sans trop d’encombres, la rédaction des décisions de justice qui en découlent ne suit souvent pas. Une situation lourde de conséquence et qui n’est pas sans répercussion sur le secteur, les avocats et leurs clients. Ces derniers se retournent souvent contre eux jugeant que leurs conseils sont léthargiques. Outre ces mécontentements, la non rédaction d’une décision de justice ralentit tout le système judiciaire. Certaines de ces décisions remontent à cinq ou six ans et, de l’avis de beaucoup d’avocats, elles ne seront jamais rendues.

 

Bien que quelques améliorations se fassent constater, la question des jugements non rédigés est récurrente au palais de justice de Moroni. Huit jugements non rédigés pour Me Bahassane Ahmed, trois pour Me Abdillah M’madi Saïd et une dizaine pour Me Azad Mzé ou Me Youssouf Atiki et Me Mahamoudou Ahamada, qui ne comptent plus car la liste est longue, cette situation s’étend et s’éternise.

Cette question demeure centrale dans la bonne marche du système judiciaire comorien car elle empêche les différentes voies de recours et à l’exécution des décisions de justice.
Selon Me Mahamoudou Ahamada, cette situation concerne toutes les affaires, avec une légère différence sur les dossiers liés aux banques. “Les décisions relatives aux banques sont plus rédigées par rapport à d’autres”, soutient l’avocat.

Sur cette situation de non rédaction des décisions de justice, Me Bahassane Ahmed précise que sur ses huit dossiers en instance de rédaction, composés de quatre arrêts et quatre jugements, le plus ancien remonte à 2008. “Je pense que cette décision ne sera jamais rédigée”. Quant à son confrère Me Mahamoudou Ahamada,

 

certaines décisions ne seront jamais rédigées car les juges qui les ont rendus savent pertinemment qu’elles feront l’objet de recours. Pour éviter cette procédure de recours, la décision ne sera jamais rédigée. Pas de décision rédigée, pas de recours possible.


Au sujet de cette légère amélioration constatée par Me Youssouf Atiki, son confrère Me Mahamoudou Ahamada ne partage pas cet avis car il estime que les jugements n’ont pas été rédigés par les juges qui les ont rendus. “Il y a une époque où le président du tribunal avait lancé une opération de rédaction de jugement en souffrance, mais le travail a été confié aux greffiers, or c’est le juge qui a siégé qui doit rédiger le jugement”.

Du côté des magistrats, les décisions sont rédigées, cependant des négligences sont constatées de part et d’autre. Certains avocats ne viennent pas demander les décisions, “j’ai là des arrêts et jugements rédigés depuis 2014 et personne n’est venu les réclamer”. Au sujet de cette absence de motivation, le juge a précisé qu’auprès des tribunaux de “Mwali et Ndzuani, le juge perçoit une légère indemnité prélevée sur les frais des décisions et à Moroni, ce n’est pas le cas”.     
Pour démontrer les réels difficultés liées à la non rédaction des décisions de justice, les avocats relèvent le cas de décès d’un juge, alors qu’il avait siégé seul. Sur ce cas, le jugement ne sera jamais rédigé.

En dehors d’installer une lenteur dans le système judiciaire et des  problèmes d’exécution des décisions de justice, la non rédaction de jugements ou d’arrêts suscite une incompréhension entre les avocats et leurs clients.
Le client qui le plus souvent ne comprend pas la question de rédaction des décisions de justice accuse son avocat de laxisme ou de négligence .Les plus impatients changent carrément d’avocat et au final la situation n’évolue pas. En attendant, les avocats rêvent d’un jour où aussitôt qu’une affaire sera délibérée, la décision sera déjà prête.


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