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Justice : un homme passe deux ans en prison avant d’être reconnu innocent

Justice : un homme passe deux ans en prison avant d’être reconnu innocent

Société | -   Abdou Moustoifa

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Le quinquagénaire, un boulanger, était poursuivi pour agressions sexuelles sur deux mineures, qu’il a hébergées chez lui un soir, mais la cour l’a finalement acquitté, faute d’éléments.

 

Bonnet traditionnel et maillot vert des Cœlacanthes floqué «Mbaba Wudjohoma», Mhadji Ibrahim, alias L3, 50 ans, s’est tenu debout pendant près de vingt minutes, lundi dernier, pour répondre aux chefs d’accusation portés contre lui. Originaire de l’île de Mwali, ce père de famille comparaissait devant la cour d’assises de Moroni pour des faits présumés d’agressions sexuelles commises sur des mineures.Sa bonne foi, en réalité, s’est retournée contre lui. Alors qu’il pensait porter assistance à deux jeunes filles rencontrées tard dans la rue à Maluzini, dans le sud de Moroni, Mhadji Ibrahim a passé deux ans et deux mois en prison pour des faits qu’il n’avait jamais commis. La cour d’assises l’a finalement acquitté le 29 septembre.


Son récit, raconté devant le tribunal a ému l’assistance. Un soir, Mhadji, est sorti du travail, une boulangerie sise au quartier de Magudju, à Moroni. «Ce jour-là, on avait reçu une commande. Depuis 3h du matin, j’étais donc sur place. Ce n’est que vers 23h que je rentrais. Fatigué, j’arrête un taxi qui me dépose au stade Baumer. Une fois descendu, je décide de marcher jusqu’à chez moi, à Maluzini», poursuit, ce père de huit enfants.

Deux matelas

Une fois arrivé à Bonzami, Mhadji Ibrahim enlève sa chemise avant de continuer son chemin. «Avant de dépasser le siège de la Meck d’Iconi, j’entends des voix m’interpeller avec un swamahani [pardon en shikomori]. Je me retourne et je vois deux jeunes filles sortir derrière le bâtiment. L’une d’elles sollicite mon aide avouant qu’elles avaient faim. Je leur demande où résidaient-elles et répondent Sahara», a expliqué à la cour le prévenu, qui dit s’être tourné vers une dame qui vendait des brochettes à côté. «J’ai sorti 2000 francs. Mais elle n’avait que quelques brochettes de viande valant 500 francs. Elle leur donne. Toutefois au moment de partir, les filles demandent encore si je pouvais les héberger chez moi. Puisque mes enfants n’étaient pas avec moi ce samedi-là, j’ai accepté. À la maison, il y avait deux matelas, j’ai dormi dans ma chambre, elles, dans l’autre. Il ne s’est rien passé», a conclu le prévenu, accusé par la suite par les deux filles, dont l’une âgée de 16 ans, d’agressions sexuelles avec violence.S’il a tout nié en clamant son innocence, Mhadji Ibrahim a également affirmé qu’il n’avait jamais été confronté à ses accusatrices durant toute la procédure.


L’avocat de la défense, Me Saïd Issa, a dénoncé «des mensonges colportés» contre le quinquagénaire, estimant que si les plaignantes existaient réellement, elles seraient présentes à l’audience. Quant au parquet, qui semblait convaincu de l’innocence de M. L3, il a préféré s’en remettre à la sagesse des membres de la cour. Souvent, lorsque le ministère public ne requiert aucune peine au cours d’un procès, cela traduit une absence d’éléments suffisants pour prouver la culpabilité du prévenu, lequel finit alors par bénéficier d’un acquittement. Une clémence à laquelle ne peuvent prétendre les agresseurs sexuels ayant été reconnu coupables. La preuve : lundi dernier, onze personnes ont été condamnées à des peines allant jusqu’à quinze ans de prison ferme, après avoir été déclarées coupables par la cour d’assises.

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