L’ancien secrétaire général des Nations-unies, Kofi Annan, est décédé samedi à Berne en Suisse, à l’âge de 80 ans à la suite «d’une courte maladie», selon sa fondation citée par de nombreux medias du monde entier. Aussitôt annoncé, son décès a provoqué une pluie d’hommages à travers les cinq continents. Plusieurs dirigeants de la planète, organisations et institutions internationales ont salué la mémoire d’un grand faiseur de paix.
Un défenseur du multilatéralisme
«Aujourd’hui nous pleurons la perte d’un grand homme, un leader et un visionnaire», a indiqué le Bureau des Nations-unies à New-York. «Il est sorti des rangs pour diriger l’organisation vers le nouveau millénaire avec dignité et une détermination sans égales», a souligné Antonio Guterres dans un communiqué où il ajoute que le Ghanéen était «une force qui guidait vers le bien». Médiateur au génie indiscutable, Kofi Annan a consacré toute sa carrière aux Nations-unies en participant activement à la résolution de nombreux conflits à travers le monde. Ce qui lui a valu le Prix Nobel de la Paix en décembre 2001 conjointement avec l'Onu en reconnaissance pour «leurs efforts en faveur d’un monde mieux organisé et plus pacifique». Discret et pragmatique, il est considéré comme un fervent défenseur du multilatéralisme et un afro-optimiste convaincu.
Kofi Annan est né en 1938 à Kumasi au Ghana. Il intègre, les Nations-unies en 1962 à la Division des Finances, travaillant activement au sein de l’Organisation mondiale de la Santé (Oms). Il sera diplômé d’économie en 1972 à la Massachussetts Institut of Technologie (Etats-Unis).
«Un modèle» de l’Elite africaine
Il sera affecté au Bureau du Haut-commissariat des Nations-unies pour les réfugiés (Hcr) après avoir été en poste à la Commission économique des Nations-unies pour l’Afrique à Addis-Abeba. Auteur de nombreux ouvrages sur le règlement des conflits et la réforme de l’Onu, l’ancien secrétaire général est considéré comme «un modèle» de l’Elite africaine, le premier noir africain à occuper le prestigieux poste. Sous-secrétaire chargé des opérations de maintien de la paix, il a été cependant critiqué, à tort ou à raison, sur la gestion de la crise politique rwandaise à l’origine du génocide des Tutsi en 1994. Une expérience mal vécue qui lui pousse à revoir les nouveaux rapports des relations internationales à inventer pour «un monde juste» tourné vers la paix durable après sa confortable élection à la tête de l’Onu en 1997.
Kofi Annan succède à Boutros Boutros Ghali. Il énonce et défend cette vision d’un monde juste dans ces deux grands ouvrages : «Nous, les peuples : le rôle des Nations-unies au 21eme siècle» ou l’autre ouvrage à la forme d’un manifeste : «Rénover les Nations-Unies» où il propose et engage un ambitieux chantier de réforme de l’institution (le droit de veto notamment) avec plus de justice et de représentativité dans les plus hautes instances de décisions comme le Conseil de sécurité. Fustigeant la politique «des puissants» au détriment «des petits Etats», Kofi Annan craignait une multiplication des conflits souvent fabriqués par les grandes multinationales dans le sillage de la diplomatie agressive et des guerres économiques.
Il quitte l’institution en 2006, succédé par le sud-coréen, Ban-Ki Moon, mais continuait à mettre son expérience au service de l’institution et de la paix en Afrique notamment. «Il a continué à œuvrer sans relâche pour la paix mondiale, au sein de la fondation Kofi Annan et comme représentant du groupe « The Elders : les Anciens », groupe fondé par Nelson Mandela pour promouvoir la paix dans le monde», indique encore le Bureau de l’Onu à New-York. Premier médiateur du conflit syrien, il démissionne cinq mois après, reconnaissant «l’échec» et surtout «les blocages manifestes» sur cette crise qui dure encore.
Kofi Annan avait, ces dernières années, appelé la société civile africaine à se battre pour mettre fin «aux graves problèmes de gouvernance» en Afrique. Le Sage prônait «des sous-espaces économiques» pour «développer les échanges intercontinentaux» car, selon lui, «les pays africains ne commercent pas entre eux, les frontières ne sont pas ouvertes». Le Ghana décrète une semaine de deuil national qui sera couplée par des cérémonies d'obsèques. Le gouvernement comorien salue, dans un communiqué, un «défenseur acharné de l’environnement et avocat infatigable des plus démunis».