Dans une intervention maîtrisée et précise, le doyen des ambassadeurs, Sultan Chouzour, est revenu sur les luttes menées avant l’indépendance. Il a, notamment, évoqué le rôle crucial des mouvements et partis politiques comoriens de l’époque, tels que le Mouvement de libération nationale des Comores (Molinaco) et le Parti socialiste des Comores (Pasoco), actifs à l’extérieur du pays. «Le combat pour la libération des Comores a commencé aux années 1960 et 1970, initié par des Comoriens vivant en Tanzanie qui ont fondé le Molinaco», a-t-il expliqué en précisant que le premier secrétaire général du mouvement était Abdou Bakari Boina. En 1967, l’Organisation de l’unité africaine (Oua) a reconnu le Molinaco comme mouvement légitime de lutte pour l’indépendance. Il a également mentionné la grève historique des élèves comoriens en 1968.
Après le Molinaco, le Pasoco, un parti «marxiste et indépendantiste», a vu le jour en 1969. «Fondé par des travailleurs, des artisans, des commerçants, etc., le Pasoco comptait des orateurs éloquents qui ont popularisé le mot d’ordre «Mkolo na lawe», scandé, partout, à l’époque», a-t-il rappelé.En 1972, un accord sur l’indépendance a été signé entre le président du Conseil, Ahmed Abdallah Abdérémane, et la France. «La France avait compris que la lutte pour l’indépendance était irréversible. Après le référendum, le «Oui» l’a emporté», a-t-il poursuivi. Le 6 juillet 1975, Ahmed Abdallah allait proclamr l’indépendance des Comores sur l’ensemble des quatre îles, soutenu par des figures révolutionnaires tels que le Cubain, Fidel Castro ou encore le Chinois, Mao Zedong.
«Mayotte, priorité diplomatique»
L’ambassadeur Alloui Saïd Abbasse a souligné que la proclamation unilatérale de l’indépendance des Comores le 6 juillet 1975 fut un acte de rupture avec la France, puissance coloniale, qui s’est alors repliée sur l’île de Mayotte, malgré les nombreuses résolutions des Nations unies réaffirmant la comorianité de cette île.
Il a soutenu que le président Ahmed Abdallah avait engagé le pays dans une dynamique diplomatique d’intégration continentale en sollicitant l’adhésion à l’Oua (actuel Union africaine). Mais ce processus a été interrompu par le coup d’État du 3 août 1975. «Le 12 novembre 1975, les Comores ont, tout de même, été admises aux Nations unies», a-t-il rappelé.
Sous Ali Soilih Mtsashiwa, une politique d’ouverture internationale a été engagée. La Chine fut le premier pays à reconnaître l’indépendance des Comores et à y ouvrir une ambassade. «A cette époque, la Chine devenait l’un des tous premiers partenaires des Comores», a indiqué le diplomate. C’est, par ailleurs, durant cette période que le Sénégal a assuré la représentation diplomatique des Comores dans l’Hexagone.
Depuis l’indépendance, la question de Mayotte reste la principale priorité de la diplomatie comorienne, a affirmé Alloui Saïd Abbasse. A la demande des Comores, l’Oua a mis en place, en 1977, le «Comité des sept» sur Mayotte, composé des Comores, du Gabon, du Sénégal, du Cameroun, de l’Algérie, de la Tanzanie et de Madagascar. Ce comité avait pour mission d’appuyer le pays dans son combat pour la réintégration de l’île dans l’ensemble national.
«Plusieurs défis»
Le ministre Mbae Mohamed a rappelé les grandes étapes qui ont marqué le parcours diplomatique des Comores depuis l’indépendance. Il a notamment souligné l’importance de l’adhésion du pays à plusieurs organisations internationales et régionales, dès les premières années telles que l’Organisation de l’unité africaine (Oua), l’Organisation des Nations unies, l’Organisation de la coopération islamique ou encore les «Pays non-alignés». Au fil des décennies, les Comores ont renforcé leur présence sur la scène régionale, en rejoignant la Commission de l’Océan indien, la Ligue des États arabes, puis l’Association des pays riverains de l’Océan Indien.
Mais la diplomatie comorienne doit encore faire face à plusieurs défis. La question du recouvrement de l’intégrité territoriale reste au cœur des priorités, notamment à travers la délimitation des frontières nationales. A cela s’ajoute la nécessité de mobiliser des financements pour concrétiser les projets du Plan Comores émergent et la consolidation des relations avec les pays de la région.
Depuis son arrivée à la tête du ministère, Mbae Mohamed s’est attelé à restructurer l’appareil diplomatique. Il met l’accent sur le «renforcement des compétences du personnel», dans un contexte géopolitique en constante évolution. Il a également annoncé un redéploiement du personnel «basé sur des critères de compétence», ainsi qu’un projet de construction d’un centre de conférences international à Moroni, pour doter le pays d’un outil moderne de diplomatie et de rayonnement international.