Le Groupe de la Banque mondiale a entamé l’élaboration de sa nouvelle stratégie (Cadre de Partenariat Pays) en soutien à l’Union des Comores pour les dix prochaines années, centrée sur la création d’emplois et la promotion de la prospérité partagée entre l’ensemble des Comoriennes et des Comoriens. Au moment où nous nous apprêtons à engager les consultations avec le Gouvernement et l’ensemble des parties prenantes, je voudrais faire quelques réflexions sur l’importance de soutenir la création d’emplois en Union des Comores.
Au cœur de l’Union des Comores, la résilience et l’ingéniosité des femmes et des hommes façonnent chaque jour l’avenir du pays. Pêcheurs, agriculteurs, commerçants, jeunes entrepreneurs : tous incarnent l’espoir d’un avenir meilleur. Pourtant, cet espoir se heurte à une réalité persistante : près de 45,2 % de la population vit encore sous le seuil de pauvreté, avec des disparités particulièrement marquées en milieu rural.
La reprise économique récente en Union des Comores est encourageante, mais elle reste fragile. Le chômage et le sous-emploi des jeunes constituent une urgence sociale. Un quart des Comoriens âgés de 15 à 24 ans ne sont ni scolarisés, ni en formation, ni en emploi. L’accès à une éducation de qualité et à de véritables opportunités professionnelles reste limité, freinant l’insertion des jeunes sur le marché du travail. Les envois de fonds jouent un rôle essentiel dans le soutien familial et social, mais ils ne peuvent bâtir une économie solide, autonome et résiliente s’ils ne contribuent pas à l’investissement dans les secteurs promoteurs de croissance inclusive et créateurs d’emplois.
L’économie comorienne repose encore majoritairement sur l’informel : plus de 80 % des emplois sont concentrés dans des secteurs à faible valeur ajoutée comme l’agriculture de subsistance, la pêche artisanale, ou les petits commerces. Le secteur privé formel peine à émerger, avec plus de 90 % des entreprises de type micro ou informel.Ce constat appelle des réformes audacieuses et coordonnées, agissant à la fois sur la création d’emplois et sur l’amélioration de leur qualité. Dans le sillage de la récente Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, il est essentiel de rappeler que l’emploi digne et de qualité est la clé pour sortir durablement de la pauvreté et promouvoir la prospérité partagée. Faire de la création d’emplois et del’inclusion le cœur de notre nouvelle stratégie n’est pas seulement une nécessité économique, c’est un impératif moral.
L’Union des Comores dispose d’atouts considérables. Un capital naturel exceptionnel, notamment marin et côtier, et une jeunesse dynamique. L’agriculture, l’économie bleue et le tourisme, encore largement sous-exploitées, peuvent devenir un levier puissant de transformation économique, pouvant conduire le pays vers l’émergence. Moderniser l’agriculture et la pêche, développer le tourisme maritime, valoriser les ressources côtières, investir dans les compétences et le capital humain sont autant de pistes pour diversifier et transformer l’économie nationale, tout en créant des emplois durables et de qualité.
Au-delà de ces priorités, l’assainissement constitue également un pilier essentiel pour améliorer durablement les conditions de vie et soutenir la création d’emplois. Un accèsfiable à des services d’assainissement de qualité est indispensable non seulement pour prévenir les maladies hydriques et renforcer la résilience des communautés face auxrisques sanitaires, mais aussi pour stimuler l’activité économique. Le développement d’infrastructures modernes, la gestion durable des déchets liquides et solides, ainsi que la professionnalisation des métiers liés à l’hygiène publique peuvent générer de nouvelles opportunités d’emploi local, tout en améliorant l’attractivité des villes et des zones rurales.
Le changement climatique représente, lui aussi, un défi majeur pour l’Union des Comores, avec des impacts déjà visibles sur la vie quotidienne des populations. L’érosion côtière, la diminution des ressources en eau et la fréquence accrue des chocs climatiques fragilisent les moyens de subsistance, en particulier dans les secteurs de l’agriculture, de la pêche et du tourisme. Face à cette réalité, l’action climatique n’est plus une option : elle est un impératif pour protéger les communautés et préserver le capital naturel du pays. En soutenant des investissements résilients, la gestion durable des écosystèmes, l’adaptation des infrastructures et le développement d’emplois verts, l’Union des Comores peut transformer cette contrainte en une opportunité de croissance durable, inclusive et porteuse d’avenir.
En cohérence avec le Plan Comores Emergent 2030, la Banque mondiale est pleinement engagée aux côtés des Comores, avec 14 projets en cours pour un montant total de375 millions de dollars, dans des secteurs clés : santé, protection sociale, éducation, énergie, transport, eau, agriculture, résilience climatique, inclusion financière et développement statistique. Dans le cadre de notre nouvelle stratégie, notre ambition va plus loin. Nous placerons la création d’emplois durables et de qualité au cœur de notre engagement, en soutenant les catalyseurs de la transformation économique nationale en appui au Plan Comores Emergent.Aujourd’hui, l’Union des Comores a une opportunité unique de moderniser les infrastructures, de renforcer les compétences des jeunes, d’investir dans l’éducation et la formation, de saisir les opportunités dans l’agriculture, l’économie bleue et le tourisme, et de bâtir une économie créatrice d’emplois, plus forte, plus inclusive et plus résiliente.
Ensemble, agissons. Pour que chaque Comorienne et chaque Comorien aient la chance de réaliser leur potentiel. L’avenir de l’Union des Comores dépend de la capacité à transformer les défis en opportunités, et la création d’emplois est la clé de cette transformation.
Par Boubacar-Sid Barry, Représentant Résident de la Banque mondiale en Union des Comores
