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Libération de certains condamnés I Une exécution qui poserait un problème «sur le fond et la forme»

Libération de certains condamnés I Une exécution qui poserait un problème «sur le fond et la forme»

Société | -   Faïza Soulé Youssouf

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L’arrêté ministériel sur lequel s’est basé le parquet général pour libérer de façon conditionnelle 60 prisonniers pose tant «un problème de fond que de forme». Ainsi, les critères relatifs à l’âge des condamnés, aux chefs d’inculpation et à la purgation «n’ont été que très peu respectés», selon l’avis de certains. Pour ce qui est de la forme, l’arrêté «n’a tout simplement pas été visé par le secrétaire général du gouvernement», comme le veut la procédure .

 

Le 30 mars, sur des vidéos tournant en boucle sur les réseaux sociaux, l’on a vu plusieurs prisonniers quittant la prison de Moroni et se jetant dans les bras de leurs proches, émus.Il s’agit précisément de 60 condamnés qui ont bénéficié d’une libération conditionnelle sur la base d’un arrêté du ministre de la Justice, Djae Ahamada Chanfi, datant du 28 mars.On apprend que tous les détenus n’étaient pas éligibles à la décision ministérielle, destinée notamment à désengorger les prisons, qui sont surpeuplées. «Les personnes âgées de plus de 60 ans et celles âgées de moins de 25 ans ayant accompli plus de la moitié de leurs peines et justifiant d’une bonne conduite et d’une capacité d’intégration sociale sont mises en liberté conditionnelle», peut-on lire dans l’article 1er. Celui-ci précise que «cette mesure de clémence ne concerne pas les personnes condamnées pour les chefs de meurtre, d’assassinat, de détournement des biens publics ou de viols».

«Soit des violeurs soit des agresseurs sexuels»

Cependant, un malaise a remplacé la joie des débuts quand l’opinion publique s’est rendu compte que beaucoup de bénéficiaires de la mesure ministérielle seraient, «soit des violeurs soit des agresseurs sexuels». Al-watwan n’a pas pu confirmer ou infirmer cette information.Une source proche du palais présidentiel qui a requis l’anonymat est formelle : cette situation met le gouvernement «extrêmement mal à l’aise». Cet arrêté pose «un problème tant de fond que de forme».


Les critères sur l’âge, les chefs d’inculpation et la purgation des peines définis par l’arrêté «ont été très peu respectés», indique-t-on. Et notre interlocuteur de poursuivre : «Le parquet général qui était chargé de l’exécution de l’arrêté ministériel explique que les condamnés pour agression sexuelle qui ont bénéficié de la mesure étaient tous des mineurs au moment des faits qui leur sont reprochés et ont purgé au moins la moitié de leur peine.

Un argument qui ne tient pas puisque l’examen de la liste des bénéficiaires révèle que beaucoup d’entre eux n’étaient pas mineurs au moment des faits et n’avaient pas non plus purgé la moitié de leur peine», croit savoir notre interlocuteur. Notons que l’arrêté du Garde des Sceaux est clair sur ce point : pour être éligibles, les condamnés devaient avoir purgé plus de la moitié de leurs peines.Si le gouvernement est aussi gêné aux entournures, pour cet interlocuteur, c’est parce que cette catégorie de condamnés n’était tout simplement pas éligible. «En l’état actuel des choses et compte tenu de la volonté manifeste du chef de l’Etat de lutter contre de telles infractions, il est inenvisageable qu’on puisse accorder des remises de peine à de tels délinquants et autres criminels», devait-il appuyer.

«Exécuté en catimini»

Et ce n’est pas tout. Sur le plan formel, «l’arrêté n’a pas été visé par le secrétaire général du gouvernement. S’il l’avait été, les pouvoirs publics auraient pu prendre connaissance du document, l’étudier. Sauf qu’il a été exécuté en catimini», considère notre source qui ne compte pas s’arrêter en aussi bon chemin. «En outre, l’arrêté devait non seulement poser les critères d’éligibilité mais aussi lister de façon nominative la liste des bénéficiaires. Il n’a même pas mentionné que la liste se trouvait en annexe», regrette notre interlocuteur.Au final, l’on ne sait toujours pas sur quoi repose le choix du nombre de prisonniers libérés.

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