Un peu plus de deux semaines après la tristement célèbre descente des forces de l’ordre au lycée de Moroni, les élèves de cet établissement ont repris le chemin des classes avant-hier matin. Il faut dire qu’entre les échauffourées du lundi 20 février et cette reprise des cours, il y a eu un arrêt de cours de 72 h des enseignants, la grève des élèves, un téléthon pour financer l’évacuation du jeune Assad Ibrahim, blessé par balle, et la démission (toujours pas acceptée par les autorités de l’île) du proviseur Msa Hadji.
Autant de sujets qui n’ont pas manqué d’alimenter les débats entre élèves. En groupe ou seul sur leurs téléphones, ils semblent, à première vue, avoir oublié les événements du 20 février. Souriants et distraits, ils sont contents de se retrouver après deux semaines de grève. Si les cours ont, dans leur majorité, bien repris, l’essentiel était ailleurs.
Théoriquement, la reprise de cours a eu lieu la semaine dernière, mais sans grand succès, les élèves n’ayant pas été tenus au courant de la nouvelle à temps. Et même avant-hier, des absences ont été enregistrées dans plusieurs classes. Certains tentent d’expliquer cela par «la peur et le manque de confiance», d’autres par «l’ignorance de cette reprise».
Toujours pas de courant
Qu’importe, ceux qui ont choisi de se rendre au lycée ont bien fait cours, du moins la majorité. Il y en a même qui ont eu des interrogations et des devoirs. Bientôt, ce sera même les compositions pour le compte du second trimestre. Néanmoins, pour qu’il y ait composition lundi prochain, il faudrait que «l’on puisse saisir et imprimer les sujets, ce qui n’est pas gagné vu qu’on a toujours pas de courant», explique Ahmed Mohamed Ahmed, enseignant d’histoire-géographie.
Certes, Msa Hadji, le proviseur démissionnaire, a fait venir du matériel informatique ; seulement voilà, sans électricité ces équipements ne servent à rien. Pour Ahmed Mohamed Ahmed, il n’est pas possible de repousser les examens vu que la grève des élèves n’a été observée qu’au lycée de Moroni. L’absence d’un proviseur complique encore une situation déjà difficile.
«Je peux comprendre qu’il soit indigné, mais il n’avait pas à nous laisser maintenant et dans de telles circonstances», se plaint Halima Issa M’madi de la première A1.
Si la jeune femme critique la décision de son (ex) proviseur, d’autres disent comprendre malgré tout. C’est le cas de deux jeunes élèves de la seconde G1.
Temps perdu pour rien
Pour le premier, Elhadj Saïd Youssouf, «il a ses raisons et je les respecte, mais nous avons besoin de lui. Son passage ici est un tournant dans l’histoire du lycée». Son collègue, Radjab Abdou Athoumane, exprime les mêmes regrets.
Les deux reprochent, par ailleurs, aux responsables du Collectif des étudiants et élèves comoriens du secteur public de les avoir induits en erreur. «Nous n’avons vu aucune solidarité, nous étions seuls à faire grève. Nous avons perdu du temps pour rien». Soibah Maoulida, lui, revient sur le cas du proviseur. Cet élève de la terminale G2 ne tarit pas d’éloges à l’endroit de Msa Hadji.
«Il a su sensibiliser et stabiliser l’administration. Je ne crois pas que son départ puisse arranger les choses, bien au contraire». Ahmed Mohamed Ahmed reconnait ‘‘une décision unilatérale’’ de la part de Msa Hadji, toutefois «il est resté avec nous et il est toujours avec nous». «Nous regrettons la façon dont les autorités ont traité les événements».
Les autorités insulaires, elles, sont restées muettes sur le sujet. Une situation qui laisse perplexe, le lycée étant placé sous la tutelle du gouverneur Hassani Hamadi.