logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

EDITO / L’exigence de mieux faire

EDITO / L’exigence de mieux faire

Société | -

image article une
"L’histoire de l’indépendance éditoriale d’Al-watwan n’est plus seulement celle d’une génération ou d’un groupe quelconque de personnes. C’est l’histoire de tout un métier, qui se perpétue et se transmet d’une génération à une autre. "

 

 

J’arrive à Al-watwan dans une période particulière, pour remplacer une figure aussi illustre, en la personne d’Ahmed Ali Amir. Et le minimum de choses, c’est l’exigence de bien faire à défaut de mieux faire. L’engagement de mon prédécesseur pour une presse affranchie et un espace médiatique assaini dans le pays n’est pas à démontrer tellement, il a presque consacré toute sa vie pour les défendre.

L’histoire de l’indépendance éditoriale d’Al-watwan n’est plus seulement celle d’une génération ou d’un groupe quelconque de personnes. C’est l’histoire de tout un métier, qui se perpétue et se transmet d’une génération à une autre. Et ce n’est pas à l’ère du numérique, du foisonnement des titres de parutions dans le pays et du rajeunissement de son personnel que cette histoire devrait s’arrêter en si bon chemin. A noter que le débat sur l’indépendance des médias ne date pas d’aujourd’hui. Il restera, par contre, inassouvi aussi longtemps que les mé- dias resteront confinés dans la logique du payeur commandeur. Car même dans les pays à tradition démocratique, si la libéralisation a pris le dessus sur tout, il n’en reste moins que l’épée de Damoclès plane toujours au-dessus des têtes des travailleurs de l’information. Car l’arme de la subvention ou d’action, c’est selon le positionnement du bailleur, est à double tranchant. Si ce n’est la pression du pouvoir; c’est un autre lobby, comme celui du «magna», qui s’abat. Cette situation, qui n’est pas nouvelle surtout en Afrique, suscite alors de nombreuses interrogations quant aux limites du journalisme et de la communication et quant à une véritable indépendance des mé- dias.Dans le cas des Comores, le Conseil national de la presse et de l’audiovisuel (Cnpa) est au front depuis des années, engageant des ré- flexions dans ce sens.

Des ateliers ont été même organisés pour enrichir le nouveau Code de l’information en gestation. N’empêche que la question revient avec beaucoup d’insistance sur comment passer d’un organe d’Etat à un organe de service public libre et indépendant politiquement et économiquement. Autrement dit, comment réussir cette mission avec une dotation annuelle de l’Etat et une gestion autonome des médias d’Etat dans des pays où la notion d’annonceur est quasi inexistante ? Mais pour en arriver là, un travail de conscientisation s’impose, en amont et en aval, à une classe politique peu enclin aux critiques constructives.

Pour revenir à Al-watwan, je crois, que les défis ne se limitent pas uniquement sur la défense des principes du journalisme. Il sont surtout sur un modèle d’un métier en voie d’extinction dans le pays, menacé, il faut l’avouer, par un paysage mé- diatique anarchique. Al-watwan se doit d’investir son rôle de défenseur non seulement des sacrosaints du journalisme mais aussi et surtout de tout un métier, sans pour autant perdre de vue les attentes de ses lecteurs qui n’exigent que de la qualité et de la diversité dans ses colonnes. Il faut noter que l’enjeu est aussi celui de répondre aux objectifs fixés par l’ordonnance lui conférant le statut d’un établissement public à caractère industriel. Notamment : la formation, la maitrise de sa chaine de production et surtout un plan d’investissement pour le court et le moyen terme. Il est anormal qu’après 34 ans d’existence, ce journal étatique continu à employer 98% de personnel, jeune, formé dans l’exercice du métier.

La relève doit être assurée, certes. Mais elle doit être formée et l’Etat comorien doit s’y impliquer, s’il veut être bien servi. Car «le journalisme n’est pas un métier comme les autres», dira Patrick Poivre d’Arvor, ancien présentateur vedette du 20h de Tf1. Et c’est notre cheval de bataille.

 

Maoulida Mbaé

 

Commentaires