C’est dans un rapport d’une trentaine de pages que la Section des comptes de la Cour suprême a compilé les conclusions de son audit réalisé à la commune de Moroni. Axé seulement sur la période de 2020-2021, ce contrôle se focalisait sur la gestion des ressources matérielles, administratives et financières de la mairie de la capitale. Et le tableau ressorti après cette enquête épingle malheureusement la gestion financière de ces deux années d’exercice passées au peigne fin.
Une hausse inexpliquée de la masse salariale
Le rapport révèle d’énormes écarts de caisse. « Le compte des résultats de la commune ne reflète pas fidèlement la situation financière de la mairie puisque les montants des subventions sont enregistrés à la fois en produit et en charges », soulève l’audit qui s’est interrogé sur la manière dont les 66.6 millions de francs de subventions accordées par l’État en 2020 et 2021 avaient été utilisés. La Section des comptes, dans ses recommandations, dit attendre la production par le service de comptabilité des pièces justificatives.
Parmi les anomalies répertoriées, figurent aussi le manque de statut du personnel et de compatibilité fiable sur la gestion des immobilisations, pour ne citer que celles-là. Pendant leurs investigations, les auditeurs ont également découvert que la commune comptait 146 agents, 8 élus, conseillers et 14 chefs de quartiers. Mais, après analyse, il s’est avéré que 7 agents de la préfecture continuaient à être payés par la commune. Percevaient-ils encore des salaires de la préfecture ? La Section des comptes n’a pas été en mesure de répondre à cette question.
Seulement, elle a constaté que l’absence de procédure de recrutements et le flou entourant la gestion du personnel avaient engendré une hausse inexpliquée de la masse salariale. En effet, dans la colonne des dépenses, les responsables audités ont déclaré 149.663 millions de francs pour les salaires de 2021. Ce qui représente une augmentation de près de 59.56 millions par rapport à l’année précédente. En l’absence d’états de salaires, les inspecteurs ne sont pas parvenus à apporter des éléments de réponses sur cet écart.
Créances, comptabilité jugées défaillantes …
Sachant que rien que le personnel, les salaires en 2020, s’élavaient à plus de 82 millions de francs. La même incompréhension a éveillé la curiosité des auditeurs lorsqu’ils se sont intéressés aux recettes recouvertes auprès de la préfecture. D’après les documents fournis pendant l’audit, il est fait mention de 3 millions de recettes pour les documents d’état-civil. Toutefois, pour l’année 2021, ce montant est passé à 18 millions. Une différence qui a interpellé la section des comptes. «Les vérificateurs de la section des comptes restent non convaincus de la sincérité de ces recettes.
D’autant qu’aucune explication n’a été fournie pour justifier le faible recouvrement remarqué de 2020 », précise le rapport dont nous avons obtenu copie.
Lancé officiellement depuis le 22 février 2022, ce contrôle visait à vérifier si les activités, les transactions financières et la gestion en général de la mairie sont conformes aux textes réglementaires et législatifs. Rendu public il y a plus de deux mois, ce rapport a surtout révélé d’énormes écarts de caisse. « Le compte des résultats de la commune ne reflète pas fidèlement la situation financière de la mairie puisque les montants des subventions sont enregistrés à la fois en produit et en charge », soulève le rapport.
Une insuffisance présumée de pièces justificatives
A noter que sur les six principales sources de revenus dont dispose la commune, les subventions de l’État et les ventes de tickets des marchés (54. 316 millions en 2021 pour seulement le grand marché) se hissent en tête. Toutefois, malgré ces sommes amassées, la mairie détenait toujours une comptabilité jugée défaillante caractérisée par une insuffisance présumée de pièces justificatives. En 2020 par exemple, la section des comptes a remarqué des prestations non justifiées s’élevant à plus de 28 millions.
L’année suivante, la moitié de ce montant aurait servi à payer les mêmes charges, mais là encore, pas de preuves. « Nous avons constaté de manière récurrente qu’aucun bordereau ne peut justifier presque toutes les opérations de recettes effectuées courant 2020-2021. Souvent des écarts apparaissaient entre le montant total enregistré dans les cahiers des recettes et les sommes totales réelles perçues», note le document, finalisé depuis janvier 2023.
Les auditeurs ont enfin décelé une faible trésorerie et «une dette de 12 millions» que la municipalité doit encore à des fournisseurs. Si le prêt de 10 millions contracté auprès de la Meck de Moroni a été payé, la section des comptes est convaincue que la commune reste encore endettée envers l’institution de microfinance.